Catégorie : Réchauffement Climatique

  • De moins en moins d’Américains croient en la réalité du réchauffement climatique

    De moins en moins d’Américains croient en la réalité du réchauffement climatique

     Un sondage réalisé au début du mois par l'institut de sondages Pew Research auprès de 1500 américains indique que le réchauffement climatique fait de moins en moins recette dans ce grand pays. Ils étaient il y a un an 71% à affirmer qu'il existe de solides évidences d'un réchauffement climatique, ils ne sont plus que 57% cette année à répondre positivement. Inversement ils étaient 21% il y a un an pour affirmer qu'il n'existe aucune évidence sérieuse, ils sont 33% cette année.

    Une analyse plus détaillée montre que la réponse est politiquement très clivée entre Démocrates et Républicains (FIG.) mais que les deux sensibilités politiques sont touchées par la décroissance des réponses positives à la question posée.

    Climat-Pew-2009-10

    La classe des 18-29 ans avec 64% des réponses positives, en baisse de 10 points par rapport à la réponse d'il y a un an, est à 7 points au dessus de la moyenne.

    Enfin, géographiquement on peut observer de nets clivages entre le Sud Atlantique des Etats-Unis régulièrement touché par les ouragans (66% de réponses positives) ou l'Ouest Pacifique qui connaît de longues périodes de sécheresses (65% de réponses positives) et le Midwest qui après un été pourri ne répond positivement qu'à 48% à la question.

    Une question plus complexe concernant la politique de "Cap & Trade" des émissions de CO2 aux Etats-Unis montre que 55% des américains n'en ont jamais entendu parler. La moitié des américains se déclarent favorables à la mise en place de règles de limitation des émissions de GHG. Ils sont majoritaires dans le Nord Est et le Sud Ouest des Etats-Unis et minoritaires ailleurs. Les personnes diplômées sont majoritairement (59%) favorables à de telles mesures.

    L'intérêt de ce sondage réside dans la mise en évidence de clivages profonds dans la perception du monde par la population américaine. Clivages en fonction de la sensibilité politique, de la région et de l'âge. Il ressort également que la mission de vulgarisation de ces problèmes par l'Administration en place, après la période obscurantiste précédente, est pour l'instant un échec. Est-elle peut-être trop occupée par les querelles et la recherche de compromis avec les élus du Congrès à Washington et pas assez par une opinion publique de toute évidence sous informée?

    LIRE les résultats détaillés de ce sondage

    Le 23 Octobre 2009

  • Le gaz naturel de par son abondance et de son énergie par tonne émise de CO2 devrait s’imposer comme première source d’énergie primaire

    Le gaz naturel de par son abondance et de son énergie par tonne émise de CO2 devrait s’imposer comme première source d’énergie primaire

    Il a été illustré ici, de façon très simple, à partir des données de base de la thermodynamique, qu'une centrale au gaz à cycle combiné moderne, avec un rendement énergétique de 60%, émet trois fois moins de CO2 qu'une centrale au charbon pulvérulent actuelle ayant un rendement de 40% (LIRE). Ce résultat connu de tous les énergéticiens du monde provient deux données fondamentales:

    1) la combustion du méthane produit deux fois plus d'énergie que la combustion du carbone par tonne de CO2 produite (5,07 MWh pour le CH4 par rapport à 2,48 MWh pour le Carbone).

    2) la combustion du gaz naturel permet d'atteindre des températures très élevées, allant jusqu'à 1600°C à ce jour (LIRE), au sein de la chambre de combustion des turbines à gaz à hauts rendements, couplées à des génératrices à vapeur alimentées par les gaz de combustion de la turbine. Les ensembles modernes à cycle combiné annoncés par les Siemens, les Alstom et autres Mitubishi Heavy atteignent ou dépassent les 60% de rendement. Un des points technologiques clés est de disposer de pièces mécaniques sophistiquées, en matériaux modernes suffisamment réfractaires, pour tenir le choc mécaniquement dans les chambres de combustion des turbines. Des progrès sont encore attendus dans la température extrême des turbines avec un objectif de 1700°C pour les japonais, mais également dans les génératrices à vapeur associées comme le montre un récent accord entre GE et MHI dans le domaine (LIRE).

    Liquefaction-offshore 

    Ces deux paramètres font qu'il est possible à ce jour, de générer un MWh électrique en émettant 330 kg de CO2 avec du gaz naturel alors qu'il faut en émettre une tonne avec du charbon pulvérulent de très bonne qualité. Bien sûr l'utilisation de lignite de basse qualité énergétique aggrave encore plus le score aux dépens du combustible solide. Ajoutons en prime, à l'avantage du gaz naturel que sa combustion, contrairement à celles de diverses houilles et lignites permet de s'affranchir de rejets toxiques dans l'air et de cendres polluantes dans la nature.

    Un tel score sans appel suppose que l'extraction du gaz naturel se fait elle même sans rejet du CO2 avec lequel il est naturellement mélangé dans les champs gaziers. Cela suppose que l'unité de purification du gaz comme à Sleipner ou à Snövhit est équipée d'une unité de capture et de séquestration du dioxyde de carbone. Sinon il faut ajouter le CO2 associé au méthane dans le bilan. Pour un mélange très riche en CO2 du style 50/50 molaire, ce sont 330 kg de CO2 par MWh qu'il faut rajouter aux rejets de combustion du gaz. Pour un mélange courant à 25% de doxyde de carbone et 75% de méthane c'est le tiers, ou 110 kg de CO2 par MWh qu'il faut rajouter au bilain, ce qui conduit à des rejets totaux de gaz carbonique de 440 kg par MWh électrique.

    Quand aux rejets de méthane respectifs, il faudrait comparer les émissions de grisou lors de l'exploitation de la mine de charbon aux éventuelles fuites lors de l'extraction, de la purification et de l'acheminement du gaz naturel. Les méthaniers modernes reliquéfient à bord le gaz évaporé de leurs cuves.

    Compte tenu de ces considérations il apparaît que de remplacer les vielles centrales au charbon ou au lignite par des centrales au gaz modernes est une méthode qui permet de diviser par 2,5 ou plus les émissions de CO2 dans la nature pour une quantité d'électricité produite.

    L'équation environnementale est donc très favorable au gaz naturel, mais jusque là l'équation économique était largement favorable à la filière charbon. Ce qui explique la primauté actuelle du charbon dans la génération d'électricité, mais cette situation n'est à mon avis que provisoire.

    En effet, un certain nombre d'éléments devraient faire rapidement décroître l'usage du charbon, tout au moins et dans un premier temps, dans les pays de l'OCDE.

    Il y a tout d'abord tout ce qui est des domaines règlementaires ou des pénalités financières. Les droits d'émissions de CO2, les obligations de réduire la teneur en CO2 par MWh d'électricité distribuée, le non octroi des autorisations administratives nécessaires, sous la pression de l'opinion publique, sont des moteurs puissants de dissuasion d'installation de nouvelles unités.

    Mais la vraie question est de faire peu à peu disparaître les centrales au charbon des pays membre de l'OCDE, pour ensuite s'attaquer aux centrales chinoises et indiennes. C'est la seule méthode qui permettra de réduire significativement les émissions mondiales de CO2 qui sont à 40% originaires de la combustion de lignite ou de charbon. Les rêves éveillés de Tanaka, de l'Agence Internationale de l'Energie, qui veut équiper en CCS 850 centrales en 2030 pour capturer et séquestrer 2,5 milliards de tonnes de CO2, ne doivent pas être pris au sérieux (LIRE et voir la dernière slide). Si le dixième de cet objectif était atteint à cette date ce serait déjà bien.

    Le point de basculement économique pour un gaz naturel à 7$/MMBTU ou 24$ par MWh thermique, se situe aux environs d'un prix du charbon de 150$ la tonne ou 18$ par MWh thermique. En Europe le prix du charbon sud-africain livré dans les ports européens doit être aux environs de 100$ la tonne. Une taxe carbone de 50$ par tonne de charbon sous une forme ou une autre, fera basculer l'équation économique au profit du gaz. Aux Etats-Unis les prix du charbon étant très bas, seuls des prix très bas du gaz naturel pourraient permettre de déstabiliser le charbon. Il faudrait que les cours du gaz naturel ne dépassent pas les 5$ le MMBTU ou 17$ le MWh pour que le gaz devienne compétitif face à un charbon qui reviendrait taxes comprises à 100$ la tonne.

    Gondwana3

     La troisième condition est la disponibilité du gaz naturel. Les réserves de gaz dans le monde sont immenses et régulièrement révisées à la hausse au gré des découvertes  au coeur des continents ou sur les marges des blocs de l'ancien Gondwana (gaz de l'arctique, schistes bitumineux américains, carbon bed, gisements offshores australiens, rives sud atlantiques). Alors que le charbon est difficilement transportable et donc faisant l'objet de peu d'échanges internationaux (LIRE), le gaz naturel s'achemine aisément soit par gazoduc quand un réseau existe, soit sous forme liquéfiée par méthanier pour le transport maritime. Les grands pétroliers et les grands gaziers internationaux veulent réduire leurs investissements pour pouvoir exploiter de façon rentable les gisements offshores de plus en plus profonds et éloignés de la terre ferme. Pour éviter d'avoir à construire des gazoducs onéreux, ils imaginent de développer d'immenses usines de liquéfaction en pleine mer (LIRE).

    Bloomberg nous apprend, à partir d'une interview d'un responsable de Technip, que Shell serait sur le point de commander trois immenses usines offshores de liquéfaction de gaz naturel au consortium Technip-Samsung Heavy Industries (FIG.I). La première de ces unités offshores, où viendraient accoster les méthaniers les plus gros du moment, devrait être installée d'ici 4 à 5 ans au large des côtes nord-ouest de l'Australie. De telles usines flottantes capables de liquéfier 3 millions de tonnes de gaz par an pourraient être installées par la suite au large des côtes de l'Afrique de l'Ouest ou du Brésil.

    Des développements de ce type, sont de nature à faire du gaz naturel la première ressource mondiale d'énergie primaire d'ici à une ou deux décennies. Un large marché spot à partir de méthaniers chargés de GNL est appelé à se développer, reléguant les ressources russes à leur juste rang de numéro deux ou trois mondial. L'ouverture maritime de l'Europe doit lui permettre de faire du gaz naturel sa principale ressource énergétique pour le plus grand bien des émissions des gaz de combustion des centrales électriques à flamme encore trop largement alimentées au lignite ou au charbon. Les immenses ressources de gaz américaines qui ont propulsé les Etats-Unis au premier rang des producteurs mondiaux de gaz naturel, vont pousser les Etats de ce pays à utiliser d'avantage le gaz dans la génération d'électricité et ceci en complément des ressources renouvelables. L'option dite "clean coal" ne permet pas d'atteindre des niveaux de rejets de gaz carbonique adéquats, elle manque de flexibilité et nécessite des investissements de gazéification du charbon très élevés et polluants.

    Par la suite il faudra convaincre l'Inde et la Chine qu'elles ont fait le mauvais choix avec leurs investissements massifs dans centrales au charbon. Ce sera beaucoup plus complexe à gérer. Rappelons pour l'anecdote, que l'Inde qui possède les cinquièmes réserves mondiales de charbon, mais qui est incapable de le transporter sur son vaste territoire, construit ses centrales électriques dans les ports pour les alimenter à partir de charbon importé.

    LIRE le communiqué de l'Agence Bloomberg

    Le 21 Octobre 2009

  • Les grandes questions que vont devoir aborder les délégués du GIEC à Bali

    Les grandes questions que vont devoir aborder les délégués du GIEC à Bali

     Du 26 au 29 Octobre à Bali va se tenir la 31ème Session Pléniaire de l'IPCC (Intergovernmental Panel on Climate Change), plus connu en Français sous le doux acronyme de GIEC. Ce Groupe d'experts va devoir tout d'abord revoir les chiffres d'émissions gaz à effets de serres (GHG) et plus particulièrement ceux de dioxyde de carbone qu'il manipule. Il serait même indispensable qu'il se projette vers 2014 ou 2016 pour élaborer ses données compte tenu de l'inertie des décisions et des actions dans le domaine énergétique. Les centrales au charbon indiennes ou chinoises en cours de construction émettront inéluctablement leur gaz carbonique dans deux ou trois ans. Alors ces experts peuvent tabler sur des émissions qui atteindront les 36 milliards de tonnes de gaz vers 2014, malgré un certain infléchissement du rythme de progression en raison de la crise économique en 2009 (FIG.). 

    CO2-1980-2016

     Traditionnellement ces experts ajoutent à ces émissions anthropiques identifiées avec une bonne précision, une émission "forfaitaire" de 5,5 milliards de tonnes de CO2 (1,5 milliards de tonnes de Carbone) due à aux changements dans l'utilisation des sols (LUC ou Land Utilisation Change) qui englobe en particulier les déforestation des grandes forêts équatoriales. Sans vouloir minimiser la gravité de ces destructions et des émissions liées qu'il faut réduire de toute évidence, leur part dans les émissions globales de CO2 admises par tous comme représentant 20% des émissions, n'en représenteront plus que 13% en 2014. En comparaison, les émissions de CO2  dues à la combustion de lignite et de charbon représentaient, avec 12 milliards de tonnes, 40% des émissions totales en 2006 (EIA). Elles devraient tendre vers 50% des émissions dans les années à venir. Le GIEC ne peut pas ne pas pousser un grand coup de gueule contre la combustion croissante de charbon et de lignite dans le monde. Cette croissance doit cesser! Les publications de l'UNEP qui veulent faire croire que le réchauffement planétaire pourrait être maîtrisé par un meilleur aménagement des espaces verts et des rivages mondiaux est à la limite de l'escroquerie. En fait, d'oublier 87% du problème lui évite de s'affronter aux Nations industrielles récalcitrantes qui sont aussi les employeurs de l'UNEP.

     Le deuxième problème de fond repose sur la répartition des émissions de CO2 anthropiques entre ciel, terre et mer. Jusque là, la fraction se retrouvant dans l'atmosphère ou "airborne fraction" est réputée croître lentement au cours du temps. Il existerait une boucle positive entre la fraction de répartition du CO2 dans l'atmosphère et le réchauffement de la planète. Il est possible d'invoquer de nombreuses raisons (réchauffement des océans absorbant moins de gaz, automnes plus chauds provoquant des émissions de CO2 plus importantes par les forêts, etc.). Mais cette tendance longue qui exacerberait l'effet des émissions de gaz carbonique, ne semble pas s'appliquer depuis 2003, comme cela a été chiffré ici de façon très simple en comparant les accélérations des émissions de dioxyde de carbone et celles d'apparition dans l'atmosphère (LIRE). Or cette inversion, mettant en évidence une boucle de régulation négative, correspond à la forte croissance des émissions de dioxyde de carbone chinoises. N'y a-t-il pas là la preuve d'un effet inverse à celui attendu? La compréhension de ce phénomène me semble essentielle. Plusieurs hypothèses prenant en compte la pression partielle de CO2 et la fonte de la banquise dans une zone de puits de gaz carbonique, qui accroîtraient la vitesse et la surface de dissolution de ce gaz dans l'océan, devraient être étudiées. Les travaux de Takahashi et Col. dans le domaine, qui reposent sur trois millions de mesures de teneurs en CO2 dans les eaux de surface maritimes, réalisés depuis 1970, montrent clairement que cette zone de l'Atlantique Nord, autour du Groenland, est de toute première importance pour assurer la dissolution du gaz carbonique de l'hémisphère nord dans les océans (FIG.II, zone bleue et parme en haut à droite).

    FIG.II Vitesses d'apparition et de disparition du CO2 dans les océans d'après Takahashi et Col.

    Les zones parme correspondent aux puits de dioxyde de carbone qui peuvent absorber jusqu'à 400 tonnes de CO2 par km2 et par an. Des variations moyenne de la surface de la banquise de l'ordre du million de km2 peuvent donc expliquer un accroissement de l'absorption de 400 millions de tonnes de gaz annuellement. La surface de la banquise au mois de Septembre, représentait dans les 7 millions de km2 en 1990. Elle est descendue à moins de 5 millions de km2 en 2007. Cette différence peut expliquer une plus forte décroissance de la concentration en CO2 durant la saison d'été dans l'hémisphère nord.

    Takahashi-CO2-sinks-2009 

     La réunion plénière de l'IPCC de la semaine prochaine sera d'une grande importance en raison de sa proximité avec la réunion sur le climat de Copenhague du mois de Décembre. Il y a là une occasion de passer quelques messages sobres mais bien sentis, à la Communauté Internationale, avec cependant une condition nécessaire: bien les hiérarchiser.
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    Le 19 Octobre 2009

  • Les publications de l’UNEP sur la climat rivalisent avec les catalogues de Club de Vacances

    Les publications de l’UNEP sur la climat rivalisent avec les catalogues de Club de Vacances

     L'UNEP (United Nations Environment Program) bras armé universel de la lutte contre le réchauffement climatique, est en train de publier les documents de base censés servir de support au prochain sommet de Copenhague. Ces brochures sont absolument merveilleuses, on y parcourt des paysages de rêves allant de mangroves en îles féériques. De vrais catalogues de Club de Vacances de grand luxe. Mais la lecture de ces brochures vous laisse parfois un goût amer en bouche. Les données chiffrées sont le plus souvent datées. Elles remontent 8 ou 9 ans en arrière, bien avant l'explosion énergétique chinoise. Elles sont même parfois incohérentes (FIG.) et les émissions de CO2 sont exprimées en pétagrammes ou en téragrammes de Carbone, unité du système cgs abandonné dans les années 50. C'est moins agressif que l'unité de base simple de ces problèmes qui se chiffrent en milliards de tonnes de CO2.

    UNEP-BlueCarbon-2009

     Les thèmes abordés ne s'attaquent pas au coeur du problème : les émissions anthropiques de CO2. Ils parlent de préservation de l'environnement et autres thèmes que personne ne peut challenger, mais qui ne concernent, au mieux, que 20% de l'équation globale. Se poser la question de la compétence et de l'efficacité de cette institution qu'est l'UNEP me semble être indispensable. Les éventuelles négociations concernant des objectifs concrets de réduction des émissions de GHG, si elles ont lieu, à Copenhague ne seront sûrement pas à créditer à l'action de cette institution.

     Consulter ces deux prestigieuses brochures, objets de communication de l'UNEP, sans trop croire aux valeurs mentionnées ni à la réelle efficacité des amorces de solutions proposées.

    THE NATURAL FIX

    BLUE CARBON

    Le 17 Octobre 2009

  • Quelle va être la clé de répartition des émissions de CO2 entre l’atmosphère, les océans et les sols au cours de ce siècle?

    Quelle va être la clé de répartition des émissions de CO2 entre l’atmosphère, les océans et les sols au cours de ce siècle?

     Les problèmes posés par le réchauffement global de notre planète, en raison du forçage radiatif des gaz à effet de serre, mesuré à partir d'une base non polluée choisie sous le règne de Louis XV, vont dépendre de deux facteurs importants: tout d'abord des émissions de gaz directement dues aux activités humaines ou conséquences indirectes de ces activités, et d'autre part de la répartition de ces gaz entre l'atmosphère, les océans et autres eaux lacustres, la végétation et les sols. Alors que le premier paramètre peut être assez bien cerné dans le cas du dioxyde de carbone par les émissions dues à la combustion des énergies fossiles et à la production de ciment dans le monde, le second paramètre qui concerne la clé de répartition entre ciel, terre et mer est beaucoup plus difficile à quantifier.

    Fraction-atmosphérique-Fossile-1980-2008

     Une première approche empirique consiste à comparer chaque année les émissions de CO2 dues aux activités anthropiques, rapportées à la teneur totale de gaz carbonique dans l'atmosphère, avec la croissance annuelle moyenne atmosphérique en dioxyde de carbone. Le ratio entre ces deux vitesses d'apparition et d'émission de gaz permet d'accéder à ce que les spécialistes appellent la fraction atmosphérique (airborne fraction) qui détermine la quantité de gaz qui chaque année se retrouve dans l'atmosphère. Un calcul simple des émissions anthropiques, depuis 1980, à partir des données de l'Energy Information Administration pour ce qui est des combustions d'énergies fossiles, auxquelles il faut ajouter les émissions dues à la production mondiale de ciment et rapportées à la teneur globale de ce gaz dans l'atmosphère, calculée à partir de la teneur globale en CO2 dans l'air sec fournie par le NOAA permet d'établir la courbe d'émission de gaz carbonique anthropique jusqu'en 2008 (FIG., courbe rouge). Il est possible de distinguer sur cette courbe deux époques. Entre 1980 et 2003 la croissance des émissions anthropiques est sensiblement linéaire, puis à partir de 2004, l'arrivée de la croissance économique de la Chine, accompagnée de la construction de multiples centrales au charbon (VOIR le diagramme des puissances installées) transforme complètement la donne et fait emballer les émissions mondiales de gaz carbonique. Venant de 0,7% au début des années 80, elles ont franchi le seuil symbolique de 1% en 2005 et elles ont atteint en 2008 avec 32,4 milliards de tonnes de gaz carbonique, 1,08% de la quantité de CO2 contenu dans l'atmosphère qui est de 3000 milliards de tonnes. La crise économique va stabiliser ce ratio en 2009, mais les besoins en énergie électrique de la Chine et d'autres pays d'Asie, comme l'Inde qui investit massivement dans les centrales au charbon, vont continuer à faire croître les émissions mondiales de CO2.

     En parallèle avec ces émissions croissantes, la teneur en CO2 dans l'atmosphère poursuit son parcours parabolique mais sans changement réel de tendance. La variation annuelle de la teneur globale en CO2, publiée par le NOAA montre une croissance continue qui était de 0,36% en 1990 et qui est passée à 0,52% en 2008 (FIG., courbe violette). Mais tout se passe comme si l'absorption de CO2 par les océans et la végétation avait amorti l'accélération des émissions de dioxyde de carbone due à la Chine.

     Ceci apparaît encore plus clairement lorsque on calcule pour chacune des années la fraction atmosphérique aFOSS en divisant vitesse d'émission du CO2 par la vitesse de croissance dans l'atmosphère. Ce ratio qui avait atteint 0,56 en 1998-2002 a plongé ces dernières années pour atteindre 0,49 en 2007 et 2008. Les terres et les mers absorbent en ce moment la moitié du CO2 émis par l'homme.

     Dans une publication datant de 2008, Raupach et Col. ont réalisé une étude plus approfondie et détaillée où ils introduisent des émissions anthropiques dues aux changements d'utilisation des sols (Land Use Change ou LUC) provenant du déboisement et de l'extension des surfaces cultivables. Ils estiment, avec beaucoup d'incertitudes, ces émissions à 5,5 millards de tonnes de CO2 par an pour la période comprise entre 2000 et 2006. (Remarque: les savants estiment les émissions annuelles de CO2 en pétagrammes de Carbone, comme cela ils sont sûrs de ne pas être compris, ce qui est à la base de toute forte renommée scientifique). L'introduction chaque année d'émissions de ces 5,5 milliards de tonnes de CO2 dans les calculs conduit à modifier la courbe d'émission vers le haut (FIG.II, courbe rouge) et donc à faire baisser la fraction atmosphérique aE vers 0,42 (FIG.II, courbe pointillée verte).

    Fraction-atmosphérique-1980-2008

     Donc si l'on tient compte des émissions dues aux changements d'utilisation des sols ce sont 58% des émissions de gaz carbonique qui sont piégées dans les océans et la végétation. Notre calcul simplifié est en accord avec la valeur moyenne de 57% (aE=0.43) proposée par Raupach et Col.

     Une étude toute récente de Thornton et Col. vient de se pencher sur le piégeage du CO2 par les sols et les plantes en introduisant un paramètre supplémentaire dans le développement de la végétation qu'est le cycle de l'azote. Cette étude complexe, sur un sujet mal maîtrisé, conclut que d'ici à la fin du siècle les sols auront de moins en moins tendance à piéger le CO2 et donc qu'une part de plus en plus importante se retrouvera dans l'atmosphère. Cependant leur modèle conduit pour la période passée de 1959 à 2006 à une fraction atmosphérique de 0,56 complètement en dehors de la plaque. Cette faiblesse porte atteinte à la confiance qui peut être accordée à ce travail.

     Un examen attentif et si possible objectif sur tous ces travaux de simulation sur la répartition du CO2 dans la nature met en évidence tout d'abord une formidable incertitude sur les résultats annoncés. Il n'est pas rare de voir des résultats estimés varier du simple au double d'une publication à l'autre, à quelques années d'intervalle. Je pense que la principale faiblesse provient de l'insuffisance de résultats expérimentaux et de l'absence de mesures. 

     Pour évoluer positivement ces travaux doivent s'attaquer à un découpage fin de toute la surface de la terre, comme ont commencé à le faire les américains, et à conduire dans chacune de ces cellules, des mesures fréquentes de teneurs en CO2. Bien sûr, l'aide de satellites de mesures est indispensable pour mener à bien cette tâche. Ce n'est qu'à partir de ces milliards de valeurs que des programmes de consolidation des résultats ou de validation de simulations pourront être engagés, pour une meilleure compréhension des phénomènes.

     On peut dire aujourd'hui que 50% +/- 5% du gaz carbonique provenant de la combustion des énergies fossiles et de la production de ciment sont retrouvés dans l'atmosphère. 30% +/- 10% sont absorbés par les océans et le restant est capté par la végétation et les sols à la merci des déboisements, des reboisements, de l'humidité et de la température ambiantes et bien d'autres paramètres agricoles. L'évolution des ratios de répartition entre ciel, terre et mer semblent varier d'une année à l'autre. Leur tendance longue d'évolution est incertaine. Mais tout cela n'empêche pas d'être certain que de brûler moins de charbon et de planter des forêts ira toujours dans la bonne direction.

    LIRE le papier de Raupach et Col.

    LIRE le papier de Thornton et Col.

    Le 11 Octobre 2009

  • La respiration annuelle de la Terre met en jeu des milliards de tonnes de CO2

    La respiration annuelle de la Terre met en jeu des milliards de tonnes de CO2

    Malgré les affirmations péremptoires et parfois schématiques de certains groupes d'opinion, les variations de la teneur en CO2 de l'atmosphère de notre planète sont à l'heure actuelle profondément incomprises en raison de la multitude et de la complexité des paramètres mis en jeu. Seul un examen approfondi en temps réel des sources et des puits de CO2 pourra permettre, plus tard, de mieux appréhender les phénomènes.

    Je voudrais tout d'abord rappeler simplement ce que les analyses de CO2 réalisées régulièrement en divers sites de la Terre nous apprennent (LIRE). La quantité totale de CO2 dans l'atmosphère qui est de 3000 milliards de tonnes, croît annuellement de 15 milliards de tonnes (0,52%). Cette croissance moyenne correspond à la moitié environ des 32 milliards de tonnes de CO2 résultant de la combustion des énergies fossiles et de la production de ciment. Cela veut donc dire que, chaque année, 17 milliards de tonnes de CO2 sont absorbés par la croissance éventuelle du stock de végétaux et autres diatomées ou par des processus de dissolution du CO2 dans les masses d'eaux océaniques ou lacustres. Mais ce que l'on sait aussi c'est que le processus n'est pas monotone. Les analyses montrent que sur ce phénomène de croissance des teneurs en CO2, se superposent des variations importantes de CO2 dans l'atmosphère à l'intérieur d'un cycle annuel (FIG.I). Ces variations sont beaucoup plus intenses dans l'hémisphère Nord que dans l'hémisphère Sud (VOIR la petite animation très instructive du NOAA).

    NOAA-CO2-2004-2009

    Pour analyser de tels phénomènes il est pratique de supprimer la composante continue donnée par la droite de corrélation qui présente une pente de 15 milliards de tonnes par an. Pour cela en chaque point mensuel de la courbe on soustrait la valeur de la droite de corrélation. Le résultat mesure donc la distance entre la courbe expérimentale et une valeur d'équilibre du moment sur la droite. Il est important d'exprimer ce résultat en milliards de tonnes pour sortir de l'unité abstraite des ppm (FIG.II).

    NOAA-CO2-variation-2006-2009

    Que nous montre cet effet de loupe sur les variations?

    Partons par exemple du point de Septembre 2006 situé à -21 milliards de tonnes. On s'aperçoit que la traversée des 6 mois de l'automne puis de l'hiver dans l'hémisphère nord entre Septembre 2006 et Avril 2007 se traduit par un accroissement de la teneur variable en CO2 de 36 milliards de tonnes qui s'ajoute aux 7,5 milliards de tonnes de la partie monotone de la droite. Un total de 44 milliards de tonnes qui représente 2,7 fois les émissions anthropiques du semestre, soit 28 milliards de plus. Alors d'où proviennent ces exhalations de 28 milliards de tonnes de dioxyde de carbone? Du brassage des océans par les vents et les tempêtes disent les uns. Les couches profondes riches en CO2 remontent à la surface et comme le Coca ou le Champagne évacuent du gaz. De la décomposition et de la fermentation des matériaux cellulosiques, de leur combustion, etc. Bien des hypothèses sont avancées mais difficiles à quantifier et à localiser.

    Après le maximum à +15 milliards de tonnes du mois d'Avril 2007 (FIG.II), la teneur en gaz carbonique de l'atmosphère replonge rapidement pour atteindre un minimun de -21,5 milliards de tonnes au mois d'août. A cette chute de la teneur en CO2 de l'atmosphère de laquelle il faut enlever les 7,5 milliards de tonnes de la partie monotone de la droite, correspond donc en un semestre à la disparition nette de 29 milliards de tonnes de gaz alors que l'activité humaine en a produit 16 milliards. Ce sont donc 45 milliards de tonnes de gaz qui ont été inhalées durant ces 6 mois. Bien sûr la croissance végétale dans l'hémisphère nord joue un rôle important dans ce processus, mais le pompage et l'enfouissement de CO2 par les océans qui se rechargent en CO2 doit être également déterminant. Les courants et la circulation thermohaline (FIG.III) qui fait plonger vers le Groenland les couches superficielles du Gulf Stream chargées en gaz carbonique, dans les profondeurs océaniques, peuvent jouer pendant l'été un rôle majeur.

    Thermohaline-circulation

     La manipulation de ces grandes masses de gaz montre la complexité des mécanismes et la nécessité d'identifier en temps réel, sur toute la surface du globe, les multiples puits et sources de CO2 liés à l'activité humaine ou à des phénomènes naturels. Pour cela il existe une méthode particulièrement adéquate: l'observation satellitaire. En début 2009, il avait été mentionnée toute l'importance du lancement annoncé par la NASA du satellite OCO de mesure de CO2 (LIRE), à la fois pour la compréhension des phénomènes et pour la sensibilisation des populations et de leurs dirigeants. Mais, malheureusement le lancement de ce satellite très important a échoué (LIRE).

    Le lancement urgent d'un clone du satellite OCO devrait raisonnablement figurer dans la liste des priorités de la réunion sur le climat de Copenhague.

    Les chiffres de CO2 sont tirés des valeurs publiées par le NOAA (LIRE)

    Le 6 Octobre 2009.

  • La part des 4X4 et autres « light-trucks » vendus aux Etats-Unis n’est plus majoritaire

    La part des 4X4 et autres « light-trucks » vendus aux Etats-Unis n’est plus majoritaire

     Le citoyen américain aisé est généralement un amateur de gros 4X4 et autres SUVs, affichant ainsi sa bonne santé financière et convaincu que sa sécurité physique est ainsi beaucoup plus protégée en cas d'accident de la route. La forme exacerbée de ce comportement atteignant le ridicule avec l'inénarrable Hummer. Cependant comme pour tout geste de consommateur avisé, l'équation économique entre en jeu dans le choix du type de véhicule neuf acheté. C'est ainsi que durant 2007 le choix d'un light-truck était majoritaire (FIG., courbe verte), mais que dans la première partie de 2008 (FIG. courbe violette) le marché a connu une baisse de ces ventes de 4X4 sous l'impact de la folle ascension des cours des carburants. Ces ventes ont baissé bien avant le déclenchement officiel de la crise. Puis à partir du mois d'Août, la crise faisant baisser les ventes de berlines, le prix de l'essence baissant et les promotions commerciales battant leur plein, la part des ventes de light trucks se mit à remonter et redevenir majoritaire. Puis en 2009 (FIG., courbe rouge) le mouvement inverse s'amorça pour connaître un minimum provisoire avec la prime à la casse du mois d'Août.

    Ventes-4X4-USA-2009-09

     Ces oscillations des parts de ventes de 4X4 autour de la médiane montrent combien est long un processus de modification radicale des comportements d'achats. Les raisons de cette viscosité des comportements sont sûrement liées à l'agressivité des offres commerciales (il faut écouler les stocks de 4X4 à tout prix), à l'arrivée de nouveaux clients solvables avec la baisse des prix, à la fluctuation rapide des cours des carburants très faiblement taxés aux Etats-Unis, à l'absence d'offre alternative dans les créneaux haut de gamme qu'occupent traditionnellement ces produits.

     Il sera intéressant de suivre l'évolution de cette répartition des ventes avec l'apparition de nouvelles offres de berlines beaucoup plus sobres en carburants et les modifications éventuelles des règles de consommation des véhicules par l'Administration américaine. Mais il est évident que cette part importante de 4X4 dans les ventes, altère la capacité de ce pays à réduire son gaspillage énergétique.

    Le 2 Octobre 2009

  • Stabiliser la croissance de la teneur en CO2 de l’atmosphère: un vrai travail d’Hercule

    Stabiliser la croissance de la teneur en CO2 de l’atmosphère: un vrai travail d’Hercule

     La littérature sur le bilan carbone de notre planète est plutôt abondante et généralement agrémentée de maints détails qui risquent parfois de faire perdre de vue l'essentiel, ce qu'un homme de bien doit savoir simplement. L'atmosphère terrestre contient 3000 milliards de tonnes de gaz carbonique (sur la base de 1,77 E+14 moles par ppm multipliées par 44 en grammes et par 386 ppm). En 2008, les activités humaines ont généré 32 milliards de tonnes de CO2 (LIRE). Nous négligerons en première approximation toutes les autres sources savantes de ce gaz (sols, volcans, incendies, permafrost, hydrates, etc.). Chaque année le stock atmosphérique de CO2 jouit donc d'un apport frais de 1% venant essentiellement de la combustion des énergies fossiles et de la production de ciment. Nous avons vu récemment que la valeur expérimentale de la teneur moyenne annuelle en CO2 de l'atmosphère en fonction du temps pouvait s'assimiler à une parabole (LIRE). La pente de cette parabole en 2008 est de 2,02 ppm/an pour une valeur absolue de CO2 de 386 ppm (Source: NOAA). Ceci veut dire que la croissance annuelle de CO2 dans l'atmosphère est de 2.02/386 = 0,52%.

    On ne retrouve donc dans l'atmosphère

    que la moitié du dioxyde de carbone émis.

    En 2008, sur les 32 milliards de tonnes, 16 milliards de tonnes de CO2 ont été apportés en plus à l'atmosphère et 16 milliards de tonnes de CO2 ont été absorbés par la croissance éventuelle du stock de végétation et surtout par les océans avec formation de bicarbonates acides.

    CO2-variation anuelle 

     

     Une question raisonnable et simple consiste à se demander à quel niveau mondial d'émissions de CO2 faudrait-il descendre pour stabiliser la teneur de ce gaz dans l'atmosphère? Bien sûr, de grands savants, munis de puissants ordinateurs utilisant de multiples outils de simulation agrémentés de plusieurs centaines de paramètres pourraient tracer de multiples réseaux de courbes en fonction des hypothèses retenues. Mais nous en resterons au niveau des moyens de l'honnête homme qui est notre interlocuteur. Pour cela le faisceau de points représentant chaque année, entre 1980 et 2008, la variation des teneurs en CO2 (c'est la pente point par point de la parabole décrite dans le papier précédent) en fonction des rejets mondiaux de ce gaz (FIG.I) permet de constater que cette courbe n'est pas linéaire mais qu'elle a tendance à s'amortir avec le temps vers les fortes émissions. Deux types de mécanismes peuvent expliquer ce phénomène: les autres émissions de CO2 que nous avons initialement négligées, pèsent de moins en moins de poids au fur et à mesure que les émissions principales croissent, l'autre hypothèse est un accroissement, avec la montée de la pression partielle de CO2, de la vitesse des mécanismes d'absorption du gaz par la végétation et les océans. Quoiqu'il en soit il est possible d'établir une corrélation du second degré acceptable avec ce nuage de 29 points qui montre que la croissance de la teneur en CO2 serait nulle vers 8 milliards de tonnes de gaz carbonique émis, soit 4 fois moins que le niveau actuel.

     On peut donc déduire de cette approche empirique simple, supposant qu'aucun seuil d'irréversibilité des phénomènes n'ait été franchi,  basée sur des données expérimentales antérieures, que les variations des teneurs en CO2 dans l'atmosphère pourront retrouver leur niveau de 1960 (1ppm/an) a condition de réduire les émissions anthropiques par deux et qu'une nouvelle réduction par deux, se rajoutant à la première, permettra de stabiliser ces teneurs dans l'atmosphère.

    Comme dirait Angela: "Besser spät als nie".

    Le 30 Septembre 2009

  • Qui est ce qui pourrait arrêter la croissance parabolique avec le temps de la teneur en CO2 de l’atmosphère?

    Qui est ce qui pourrait arrêter la croissance parabolique avec le temps de la teneur en CO2 de l’atmosphère?

     La Terre constitue un vaste système hors d'équilibre, alimenté continument en énergie par le rayonnement solaire. C'est cette énergie qui est à la source de la vie animale et végétale sur notre planète qui, si on en croit les géologues, était constituée il y a de cela 3,5 milliards d'années d'une atmosphère à base de CO2 et de mers, d'un vert profond, très riches en Fer II et en Sulfures. L'apparition de la vie fit lentement disparaître le CO2, oxyda le Fer II soluble en Fer III insoluble, et transforma les sulfures en sulfates. L'atmosphère s'enrichit en oxygène, mais la vie laissa ce rôle primordial au CO2, même réduit à l'état de traces, pour assurer la croissance des végétaux et autres diatomées. Tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles jusqu'à l'arrivée de la machine à vapeur et du moteur à explosion qui incitèrent les hommes à aller extraire, pour les brûler, les énormes réserves de charbon, de pétrole et de gaz, résidus du CO2 des premiers temps du Monde, enfouis dans les profondeurs de la Terre. Ce phénomène anthropique, comme disent les savants qui ont un gros bulbe et connaissent leurs racines, tend à perturber le délicat équilibre énergétique qui s'était lentement établi. Ceci est lié à la croissance parabolique de la teneur moyenne annuelle en CO2 de notre atmosphère avec le temps, relevée par exemple à l'observatoire de Mauna Loa, au milieu du Pacifique depuis 1958.(FIG.I).

    CO2-MaunaLoa-1959-2008 

    Ces analyses conduites depuis 50 ans montrent que les teneurs en CO2 de l'atmosphère croissent de plus en plus vite. Les variations annuelles qui étaient de l'ordre d'un ppm entre 1960 et 1970 sont maintenant de l'ordre de 2ppm. La valeur mesurée en 2008 de 385,6 ppm de CO2 correspond à une valeur de x=54 dans l'équation de la parabole de corrélation, ce qui conduit à une pente dy/dx de la tangente en ce point de 2,02 ppm.

    Entre 1980 et 2008 la pente annuelle d'émission de CO2 en passant de 1.34ppm à 2.02ppm a affiché une croissance de 50%. Pendant ces 28 ans, la consommation mondiale de pétrole a crû de 35%, celle de charbon avec l'émergence de la Chine a affiché une croissance de 70% et celle de gaz naturel a plus que doublé avec un score de 110%, nous indiquent les tables de l'EIA. Le lien de cause à effet semble difficile à contester. 

    Cette croissance parabolique avec le temps, de la teneur en CO2 de l'atmosphère est à la base d'un réchauffement global de notre planète. En effet parmi les gaz à effets de serre qui absorbent les rayons infrarouges parce qu'ils possèdent des liaisons C=O ou C-H mais encore C-F ou N-O, le CO2 est le gaz qui provoque le plus de forçage radiatif parmi ces gaz. Il représente 63% de leur effet (FIG II).

    Forçage-radiatif-1980-2008

    On estime qu'en 2008 ce forçage radiatif des GHG a atteint 2,74 W/m2 (FIG.II), soit 0,8% de l'irradiance moyenne reçue par la Terre qui est de 341,5 W/m2 ou 1,15% du flux non réfléchi par l'albédo terrestre qui est de l'ordre de 239W/m2. Cette fraction de puissance semble très faible, mais en multipliant par les 510 millions de km2 de la surface de la terre on arrive à une puissance moyenne de 1400 TW. La puissance calorifique générée par 500 mille centrales électriques de 1000MW. Cette énergie absorbée va donner naissance à un flux de chaleur de plus grande longueur d'onde FL qui va venir accroître la température moyenne d'équilibre de la Terre (Voir la formule) .

    La puissance du forçage radiatif du CO2 est calculée par une loi du type T=5.35 ln(C/278) où intervient le logarithme népérien de la concentration en CO2 exprimée en ppm. La référence de 278 ppm étant la teneur en CO2 dans l'atmosphère estimée en 1750, le style Louis XV faisait alors fureur en France. Compte tenu de la croissance parabolique de la concentration en CO2 avec le temps et de la quasi stabilité des effets des autres gaz, la part du CO2 dans le bilan global tend à s'accroître de plus en plus nettement avec le temps (FIG.III) sous l'impact du développement économique de la Chine et autres BRICs.

    Forçage-radiatif-1980-2008b

    La menace aujourd'hui est donc clairement identifiée: c'est la croissance parabolique avec le temps de la concentration en CO2 dans l'atmosphère et c'est à ce paramètre que la Communauté Internationale doit s'attaquer en priorité, pour faire en sorte de ralentir puis de stopper cette croissance. Tant que les Organismes responsables n'auront pas fait un inventaire clair des sources d'émissions de gaz carbonique et n'auront pas établi un plan d'action détaillé pour, site par site, réduire ou stopper ces émissions, il sera nécessaire d'être très pessimiste sur les événements à venir.

    La Figure I montre que les 400 ppm moyens de CO2 seront atteints en 2015, compte tenu de la crise économique ce sera peut être en 2016, mais le niveau d'incertitude est très faible. Quand aux 420ppm avant 2025, ils sont pratiquement inscrits dans l'inertie des prises de décisions et la lenteur des procédures. Copenhague pourrait se fixer un objectif pour repousser cette échéance des 420 ppm qui semble un objectif à moyen terme raisonnable. Il faut savoir qu'au rythme ou vont les choses, la barre des 450 ppm qu'il faut éviter de franchir selon certains, est quelque part entre 2035 et 2040. C'est du peu au jus!

    Pour accéder aux détails chiffrés et aller plus loin dans la compréhension des phénomènes de base, on pourra se reporter au site du NOAA (VOIR).

    Le 29 Septembre 2009

  • L’éloignement du peak-oil rend toute son acuité au changement climatique

    L’éloignement du peak-oil rend toute son acuité au changement climatique

      Un certain nombre de voies raisonnables et compétentes s'élèvent pour challenger le caractère imminent du peak-oil. Nous avions rendu compte ici (LIRE) en 2008 des hypothèses de Richard Nehring qui au congrès de l'ASPO-USA à Houston en 2007 était venu mettre les pieds dans le plat, en argumentant que les réserves ultimes de pétroles avaient de bonnes chances de se situer entre 3400 et 5000 milliards de barils, avec une hypothèse moyenne au dessus de 4000 milliards de barils, soit le double de ce qui est jusqu'à présent admis par les peakistes (LIRE). Leonardo Maugeri de chez ENI vient d'apporter de l'eau au moulin de cette vision progressiste de la découverte et de l'exploitation des réserves de pétrole dans le monde. Dans un papier récent, intitulé "Squeezing more oil out of the ground", il estime pour sa part que pour des quantités globales de pétrole estimées par les géologues américains entre 7000 et 9000 milliards de barils, en 2030 les professionnels du pétroles avec un taux de récupération supérieur à 50%, estimeront alors les réserves ultimes entre 4500 et 5000 milliards de barils. Pour étayer cette prédiction Maugeri décrit les progrès accomplis dans la récupération assistée des ressources aux moyens de divers procédés tels que l'injection de vapeur d'eau, les forages horizontaux, les injections de CO2 ou d'Azote, la combustion partielle, les procédés chimiques et biologiques. Il insiste également sur l'existence de larges territoires encore inexplorés et sur les forages très profonds du type Pre-Sal au Brésil (FIG.) qui révèlent des ressources nouvelles. Pour Maugeri il reste assez de pétrole à trouver et à exploiter pour la totalité du siècle, ce à quoi que les hypothèses de Nehring conduisaient logiquement.

    Brésil-pré-sal

     

     Il est donc impératif de comprendre rapidement, afin d'éviter tout contresens, que la raréfaction des ressources pétrolières au rythme de consommation actuel ne se posera que dans un délai de l'ordre du siècle. Or, ce n'est pas le cas pour le changement climatique en cours qui va s'amplifier sur quelques décennies à venir, durant lesquelles les dirigeants des Nations vont encore essentiellement faire semblant d'agir, soutenus par une base populaire encore peu motivée et incrédule. Le réel problème de ce siècle sera le changement climatique qui imposera logiquement de réduire les consommations de pétrole par quatre ou cinq, ce qui repoussera de quelques décennies supplémentaires la fin des produits pétroliers naturels. Entre temps, les divers modes de transports terrestres, aériens et maritimes se seront adaptés à cette raréfaction de la ressource naturelle et à la contrainte climatique, ce que nous percevons déjà avec la montée en puissance des biocarburants et la timide apparition de la voiture électrique. Les carburants liquides de synthèse obtenus à partir du gaz, de charbon et de biomasse prendront peu à peu le relai du pétrole pour les applications comme le transport aérien, nécessitant un carburant liquide.

    LIRE un pre-print du papier de Leonardo Maugeri paru en Avril dernier. Le papier définitif (LIRE) est maintenant accessible librement sous le titre "Another Century of Oil".

     Le 26 Septembre 2009