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  • Réflexions sur un avenir énergétique incertain et complexe

    Réflexions sur un avenir énergétique incertain et complexe

     Il est une évidence: si l’espèce humaine n’a pas entre-temps disparu, les énergies fossiles seront un jour épuisées. Mais il en est également une autre qui nuance l’affirmation précédente: nul ne sait, pour chacune d’entre ces sources d'énergies, jusqu’à quelle date et à quel rythme se déroulera cette fin annoncée. En effet entre abondance et épuisement quasi-total, le monde passera durant les décennies et les siècles prochains par diverses phases de pénurie et de tensions plus ou moins vives qui agiront sur les prix et pèseront sur la demande. Elles induiront des progrès dans l’efficacité énergétique des processus, des phénomènes de substitution compétitive entre les diverses formes d’énergie, elles pousseront les industriels à une meilleure exploitation des ressources existantes identifiées, les inciteront à accroître leurs efforts de prospection dans des zones hostiles (Arctique) ou interdites à ce jour (grande part de l'offshore américain) et de mise en valeur de ressources « non conventionnelles » par des technologies innovantes. L’utilisation intensive de la biomasse devenue largement rentable soulagera avec ses ersatz (bioéthanol, biodiésel, biogaz, bio-oil, pellets et autres) la demande finale en énergies fossile.

    Peak-oil  La généralisation au monde du concept régional de «Peak-oil», par ailleurs formidable outil de Marketing, est une représentation naïvement simplifiée et figée d’une réalité beaucoup plus complexe et évolutive qui ne cessera de s’adapter grâce aux progrès technologiques, à des conditions d’un marché de l’énergie en constante évolution. Depuis que le concept de peak-oil a été avancé le bioéthanol et le biodiesel ont prouvé leur complémentarité avec les carburants classiques dont les prix ont quintuplé en dollars courants, des ressources d’huiles non conventionnelles au Venezuela puis dans l’Alberta on été mises en valeur, de nouvelles ressources de pétrole offshore ont été découvertes dans le Golfe du Mexique, en Afrique puis au Brésil à des profondeurs inattendues, les techniques de forage horizontal avec ou sans fracking, parfois couplées à l’injection de CO2 (EOR) a fait faire un pas décisif dans le taux d’extraction de ressources classiques (Californie) et non conventionnelles (gaz et huiles de schistes), les véhicules hybrides et électriques sont produits industriellement, la conversion du gaz naturel en produits pétroliers (GTL du Qatar) est devenue une activité hautement lucrative. La liste n’est pas exhaustive et pendant cette lecture les innovations et les adaptations se poursuivent.

     La notion de «transition énergétique» manipulée par la vision écologique actuellement en vogue, laisse accroire que le monde va passer en quelques décennies d’un temps diabolique de mauvaises pratiques polluantes à une ère de pureté écologique faite d’eaux courantes, de vents bienveillants et de soleil. Cette nouvelle forme de croyance réinvente le Ciel et l’Enfer, elle dit ce qui est bon et ce qui ne l’est pas, elle prédit des apocalypses climatiques qui viendront punir les impies qui ont abimé la Nature, elle utilise toutes les formes de propagande et d’intimidations, rappelant parfois de temps plus obscurs, pour imposer son idéologie romantique, vision schématique et dangereuse du monde.

     Dans la réalité cette soi-disant transition miraculeuse n’aura pas lieu. Le monde va vivre sous la contrainte économique et politique de longues phases successives d’adaptation de l’efficacité énergétique des processus et de son mix énergétique, avec des solutions différentes selon la démographie, la géographie et le climat des régions examinées. Ce futur mix évoluant au cours du temps, nul ne sait le prédire en détail mais il va être composé d’un cocktail de lignite, de charbon, de gaz conventionnels ou non (jusqu’aux hydrates de méthane), de pétrole conventionnel ou non, de nucléaire de diverses génération à base de fission ou de fusion, de biomasse, d’hydraulique, d’éolien de plus en plus offshore, de solaire photovoltaïque ou thermique et autres formes d’énergie extirpées des entrailles de la Terre, des vagues et des courants marins.

     La proportion au sein du mix de chacune des formes dépendra de l’accès aux ressources locales, des prix de marché, des applications évolutives à satisfaire et marginalement des choix politiques (interdictions, règlements, quotas, subventions, taxes, tarifs préférentiels, etc.) qui favoriseront telle ressource et défavoriseront telle autre. Pour d’évidentes raisons, les choix dans la composition du cocktail de la Norvège, de l’Arabie Saoudite ou de la Chine ne seront pas identiques.

    Ces évolutions du bouquet énergétique de chacune des nations se dérouleront selon des processus qui ne pourront guère s’éloigner d’un optimum économique local. Il est une chose de vouloir alimenter un réseau électrique avec 90% d’énergies intermittentes, il en est une autre que de le financer (subventions, tarifs préférentiels, etc.) accompagné d’une multitude de dispositifs redondants (stockages onéreux, gestion aléatoire des puissances appelées au travers de Smart-Grids, ressources traditionnelles sous-utilisées en secours pour éviter les délestages intempestifs, etc.) destinés à pallier l’instabilité intrinsèque d’un tel réseau. En raison de ces contraintes économiques il faudra toujours assurer un minimum de puissance de base à ces réseaux électriques. Cette base fait appel aujourd’hui au charbon, au gaz naturel, au nucléaire, à l’hydraulique au fil de l’eau et marginalement à la géothermie. Elle s’enrichira peut-être un jour de fission nucléaire ou beaucoup plus tard encore de possibles exploitations de l’énergie solaire en orbite géostationnaire… là où il fait toujours soleil.

     Un autre exemple schématique est donné par les hypothèses d’utilisation de l’hydrogène «propre» (non issu du gaz ou du charbon) qui apparaissent aux yeux de certains comme la solution pour demain. Un certain grand Ayatollah moustachu de l’écologie française nous prédit des poids lourds mus par l’hydrogène d’ici à quelques années. Il oublie, s’il l’a un jour appris, que cet hydrogène pour être propre ne pourra provenir que de la dissociation d’un corps composé parmi les plus stables sur notre planète: l’eau. Il faudra donc fournir beaucoup d’énergie pour dissocier l’eau puis pour isoler, laver, comprimer, stocker et transporter le gaz dihydrogène si volatil. Lors de son utilisation, la thermodynamique nous apprend qu’une part de l’énergie récupérée se retrouvera sous forme thermique, difficilement valorisable sur un véhicule. Pour ces raisons physiques et thermodynamiques l’hydrogène s’avère être un très mauvais vecteur énergétique (dans les 30% de rendement s’il est «propre», 40% s’il est produit à partir de gaz naturel) en comparaison avec les lignes électriques couplées à des batteries (autour des 75% de rendement)…pas de bol! Il faut donc prévoir, avant ces hypothétiques camions bouffeurs d'hydrogène, de futurs poids lourds et autres bus hybrides alimentés au gasoil, au gaz naturel ou avec des mélanges essence-éthanol présentant des consommations de l’ordre de 20 litres de gasoil aux cent kilomètres ou équivalent, cela semble beaucoup plus réaliste.

     En contrepartie il est possible d’attribuer un avenir majeur au vecteur électrique dans un monde qui va s’urbaniser et dont la population va vieillir. Aujourd’hui la moitié de la population mondiale (3,5 mrds) est urbaine, en 2045 les spécialistes démographes estiment que les deux-tiers des terriens (6 mrds) seront urbanisés le plus souvent dans de grandes agglomérations. Les transports de masse (métro, train, tramway) seront largement électrifiés, le conditionnement d’air et la maîtrise de l'humidité des appartements fera appel à des pompes à chaleur réversibles, les équipements de communication et de loisirs consommeront cette énergie, les équipements de transport individuels (vélo, scooter, voiture) seront le plus souvent électriques, les infrastructures urbaines (éclairage, balisage, feux, publicité, etc.) feront appel à l’électricité. Il faut donc imaginer un monde futur aux consommations énergétiques quasi constantes puis décroissantes, mais avec une part d’énergie électrique distribuée croissante. Une telle évolution sera favorable à la nécessaire substitution compétitive des sources d’énergies. Citons par exemple l’abandon du pétrole dans l’alimentation des centrales électriques, l’arrivée massive du gaz naturel abondant (gaz de schistes) et donc peu onéreux qui percutera la domination du charbon dans certains grands pays asiatiques (Chine sûrement, Inde peut-être), la valorisation des déchets lignocellulosiques comme combustibles ou transformés en biogaz, l’arrivée de nouvelles centrales nucléaires économes en matières fissiles, plus modulables et plus sûres.

     Dans le domaine des transports, ce qui ne sera pas électrique fera de plus en plus appel à des biocarburants devenus moins onéreux que les dérivés du pétrole. Ceci suppose des investissements massifs dans le développement agricole et le financement d’usines rurales de valorisation de la ressource des pays les plus pauvres (Amérique du Sud, Afrique, Asie). Selon les climats la cane à sucre, le maïs ou le manioc pourront par exemple mener au bioéthanol en utilisant la totalité de la plante (amidon et lignocellulose) dans des conditions économiques raisonnables.

    Il n’y aura pas de transition énergétique, mais adaptation continue du mix énergétique intégrant les contraintes économiques et parfois politiques du moment. L’Europe va vivre en temps réel une telle expérience avec l'Allemagne qui veut quitter le nucléaire, ressource énergétique de base précieuse. Il sera utile de voir combien de lignite, de charbon, de gaz supplémentaires vont être mobilisés pour compenser cette disparition à ce jour désirée. L'exemple japonais d'adaptation sera également instructif à suivre.

    Le 19 Mai 2011

  • La recharge d’un véhicule électrique ne nécessitera pas de réinventer l’eau chaude

    La recharge d’un véhicule électrique ne nécessitera pas de réinventer l’eau chaude

     Il apparaît opportun de rappeler quelques notions simples sur la charge des batteries des véhicules électriques afin de clarifier certains ordres de grandeur.

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    L'énergie embarquée dans la batterie:

    Typiquement les premiers EV de large diffusion mis sur le marché qui veulent afficher les psychologiquement nécessaires 100 miles d'autonomie, sont équipés de batteries de types Li-Ion qui présentent des énergies comprises entre 15 et 25 kWh. En effet la consommation d'électricité d'un véhicule équipé de la récupération d'énergie au freinage, va aujourd'hui consommer autour des 15 kWh aux cent kilomètres en cycle urbain. Les réductions de consommation par réduction de la masse et l'optimisation de la traction (motorisation in-wheel ) conduiront à terme à des valeurs inférieures à 10 kWh aux cent km, comme l'annonce le prototype de Sim-Drive de l'Université de Keio. Cette énergie embarquée que nous allons choisir égale à 20 kWh pour simplifier et ne facher aucun constructeur, sera constituée typiquement d'un ensemble d'accumulateurs connectés en série-parallèle du type 200V x 100 Ah (par exemple: 56 éléments, 3,6V, 100 Ah).

    La consommation moyenne quotidienne d'énergie:

    Pour un parcours moyen annuel de douze mille kilomètres la consommation annuelle d'énergie par le moteur sera de 120 centaines de km x 15 kWh/100km = 1800 kWh/an soit un peu moins de 5 kWh par jour.

    L'énergie annuelle appelée au réseau doit tenir compte du rendement de charge-décharge de la batterie donnée par le rapport entre tension nominale et tension de charge: 3,6V/4,2V = 0,857 et le rendement du redresseur estimé à 95%. Ces données conduisent à un rendement global charge-décharge de la batterie de 81%. Pour réaliser ces 12 mille kilomètres annuels le véhicule appellera donc au réseau en moyenne dans les 6 kWh par jour.

    Cette consommation moyenne est à rapprocher de celle d'un cumulus de 200 litres d'eau dont on doit remonter la température de 30°C en fin de journée. Soit: 200 x 30 x 4.18/3600= 7 kWh.

    Une voiture électrique consomme en moyenne l'énergie d'un cumulus d'eau chaude.

    La charge de la batterie:

    Un batterie Li-Ion se recharge aussi simplement qu'une batterie au plomb avec une limitation en tension (typiquement 4,2V par élément, soit 235V  pour notre exemple de 56 éléments connectés en série) et une limitation en courant au cinquième de la capacité (C/5) pour assurer une recharge complète en six ou sept heures. Ceci représente un courant continu de 20A dans notre exemple d'une batterie de 100 Ah. La puissance continue appelée en début de charge va donc être de 235V x 20A = 4700W soit, compte tenu du rendement du redresseur, un appel au réseau de 5kW environ.

    Remarque: de nombreux projets font appel à des modes de charge rapide qui devraient permettre de recharger une fraction de la batterie en quelques minutes. Il y a là une approche marketing du problème qui  tiendra difficilement la route sur le long terme parce que les bornes de charge qui devront débiter des puissances de 25 à 50 kW seront hors de prix par rapport au service rendu. Quand à ceux qui veulent réaliser des échanges standard de batteries chargées, en dehors du côté publicitaire évident de cette pratique, le prix de revient global de l'opération (investissement, besoin en fond de roulement, surveillance, etc.) sera sans commune mesure avec la faible valeur ajoutée du service. Mais ceci n'empêchera pas certains élus subitement épris d'écologie, de réaliser ces dépenses…au frais du contribuable. Le marché du véhicule électrique sera au démarrage un marché largement "municipal", avec toutes les mauvaises pratiques rattachées.

    Les contraintes horaires:

    Contrairement à un cumulus électrique toujours là et dont on peut programmer la chauffe à distance sur une ou plusieurs plages horaires, la voiture ne sera pas toujours à son poste de recharge le moment venu. Ce doit donc être au véhicule de signaler sa présence au chargeur et à déclarer la quantité d'énergie dont il a besoin pour sa recharge. Ces informations, compte tenu des contraintes du réseau, vont permettre de programmer l'heure de démarrage optimum de la charge et même, pourquoi pas, de programmer la puissance maximum nécessaire à cette recharge.

    Le 19 Mai 2011

  • RWE :des granulés de bois américains pour les centrales thermiques européennes par centaines de milliers de tonnes

    RWE :des granulés de bois américains pour les centrales thermiques européennes par centaines de milliers de tonnes

    Pellets  Une des façons les plus simples d'utilisation de la biomasse consiste à brûler du bois en tout ou partie dans les centrales électriques au charbon. L'électricien allemand RWE est en train de développer sa propre filière de "pellets" confectionnés à partir de grumes de l’État de Géorgie aux États-Unis. Ils seront acheminés par bateau à partir de cet été vers ses centrales thermiques néerlandaise et britanniques. L'électricien annonce qu'il vient d'inaugurer une usine américaine capable de produire annuellement 750 mille tonnes de granulés dans cet Etat le plus boisé des USA après l'Oregon. Ces productions alimenteront tout d'abord la centrale thermique de Amer en Hollande qui brûle déjà 30% de biomasse importée et qui devrait porter cette proportion à 50% tout d'abord puis à 80%. RWE a décidé d'autre part à partir de la fin de cette année de convertir sa centrale britannique de Tilbury de 750 MW à la biomasse jusqu'à sa fermeture prévue au plus tard en 2015. Elle consommera d'ici à sa fermeture dans les 2 millions de tonnes de bois.

     RWE, tout comme d'autres grands Groupes dans le monde, sait que les besoins de granulés et autres biomasses de la part des distributeurs d'électricité européens ou américains va aller en croissant s'ils veulent atteindre les objectifs réglementaires d'énergie renouvelable dans leur mix énergétique. C'est la façon la plus simple d'utilisation de la biomasse à l'aide d'unités largement amorties. Une contrainte cependant: compte tenu de la faible énergie volumique du bois, même compacté en granulés, il faut manipuler des volumes deux fois supérieurs à ceux du charbon pour la même quantité d'énergie de combustion.

    Remarque à mon avis importante: la production mondiale de granulés de bois croît très rapidement. Elle était de l'ordre de 13 millions de tonnes en 2009, dont 8 millions ont été consommés en Europe. Les USA en auraient produits dans les 7 millions de tonnes dont 5 ont été exportées vers l'Europe. Ces volumes restent cependant négligeables par rapport aux 7 milliards de tonnes de charbon brûlés annuellement dans le monde. Une alouette un cheval, la recette du green-washing que pratique RWE avec une aisance toute germanique.

    LIRE le communiqué de RWE sur le sujet.

    Le 16 Mai 2011

  • De nouvelles règles du jeu sur le photovoltaïque italien déçoivent bien des investisseurs

    De nouvelles règles du jeu sur le photovoltaïque italien déçoivent bien des investisseurs

    Après l’Espagne en 2008, la France à mi-2010, l’Allemagne à la fin de la même année, il ne fallait pas être grand clerc pour anticiper que le boom solaire ambiant allait être stoppé à son tour dans la Péninsule italienne. Et pourtant ils y croyaient tous. SunPower par exemple qui avait investi massivement en Italie et dont c’était le plus gros marché. Le voila très déçu et dans le rouge au premier trimestre avec un chiffre d’affaire de 451 M$, pas aussi ensoleillé que voulu. Mais ses concurrents américains, japonais ou chinois devront aussi rendre des comptes écornés par le marasme européen ambiant.

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    D’après Reuters, le Gouvernement Italien voudrait réduire progressivement les tarifs de l’électricité photovoltaïque à partir du mois de Juin jusqu’en 2013. On parle d’une réduction d’un tiers des tarifs, ce qui bien sûr a stoppé les investissements dans l’attente des nouvelles règles du jeu officielles.

    La grande faiblesse de l’industrie photovoltaïque réside dans le fait qu’elle dépend pour des lustres encore de subventions ou de tarifs spéciaux, taxes indirectes de plusieurs milliards d’euros prélevées sur le consommateur d’électricité européen, prélèvements dont on peut raisonnablement douter de l’efficacité économique. Il faudra pour qu’elle atteigne le break-even avec le MWh issu du charbon ou du gaz naturel à la sortie de la centrale que les prix de ces commodities se valorisent sur les marchés et/ou supportent des taxes, mais aussi que les prix au Watt du module photovoltaïque installé et connecté soit fortement réduit. Ceci suppose toute une étude méthode tout au long de la chaîne de valeur photovoltaïque, des composants à la main d’œuvre d’installation sur site, aux frais et taxes associés mais aussi à l’irradiance solaire du coin.

    Le malaise d’une industrie mondiale en excédent de capacités de production commence à être ouvertement perçu aux États-Unis. Les Gazettes commencent à parler de faillites de certains industriels du photovoltaïque, en particulier de ceux qui ont joué le Silicium amorphe en couches minces avec des taux de conversion sont trop faibles et aujourd’hui délaissé.

    LIRE le communiqué Reuters sur ce sujet.

    Le 15 Mai 2011

     

  • La demande croissante en Asie pousse les Etats-Unis à devenir de gros exportateurs de charbon

    La demande croissante en Asie pousse les Etats-Unis à devenir de gros exportateurs de charbon

     La production mondiale annuelle de combustibles solides (charbon, lignite) pour applications thermiques ou métallurgiques sont de l'ordre de 7 milliards de tonnes ou 3,4 milliards de TEP. Dans la décennie à venir l'EIA dans sa prévision de 2011 imagine après une pose due à la dernière crise économique, une reprise de la croissance de la consommation de charbon dans le monde, autour des 1,6% par an ou plus de 110 MT de plus par an. Cette croissance sera essentiellement tirée par les pays asiatiques (Japon, Corée, Inde, Chine,…) qui doivent faire face soit à la croissance de leur économie, soit à des revirements dans leur mix énergétique comme il faut l'anticiper pour le Japon. En Europe c'est essentiellement l'Allemagne qui va dès cette année pousser les feux de ses centrales au lignite et au charbon, pour compenser l'arrêt probable de certaines centrales nucléaires. Aux États-Unis la politique de maîtrise des émissions de CO2 par les contraintes règlementaires de certains États auprès des distributeurs d'électricité, tend à favoriser l'utilisation du gaz naturel couplé avec les énergies renouvelables.

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     Pour le patron de Arch Coal, un gros exploitant de mines de charbon américain, ce sont 35 GW de génération d'électricité au charbon qui risquent de disparaître dans la décennie à venir aux U.S.A. mais ce sont 249 GW de centrales au charbon dans le monde qui sont en cours d'instruction et de construction. Cet effet de balance qui va déplacer des consommations de charbon des États-Unis vers l'Asie est bien sûr anticipé par les producteurs de charbon américains qui avec un milliard de tonnes de charbon produit, vont de plus en plus exporter leurs productions vers l'Asie et l'Europe. Ces exportations qui devraient atteindre puis dépasser les 100 MT en 2012 porteraient ainsi les États-Unis vers le TOP 5 des pays exportateurs derrière l'Australie et l'Indonésie, à égalité avec la Russie et devant l'Afrique du Sud et la Colombie. Bien sûr ce changement de destination posera bien des problèmes logistiques pour acheminer le produit vers les ports du Golfe du Mexique via le Mississippi, vers les ports de l'Atlantique pour le charbon des Appalaches où des ports du Pacifique pour les ressources des Rocheuses (FIG.).

     Le commerce mondial du charbon qui ne représente aujourd'hui que dans les 14% à 15% de la ressource annuelle consommée (un milliard de tonnes) devrait croître plus rapidement que la demande moyenne afin de combler les déséquilibres entre production et consommation et ceci malgré les contraintes logistiques inhérentes à la ressource solide. L'Inde par exemple devrait consommer dans les 696 millions de tonnes en 2011-2012 avec une capacité de production et d'acheminement de charbon de 554 millions de tonnes. En implantant ses nouvelles centrales électriques dans les ports, elle va devoir importer plus de 20% de ses consommations de charbon.

    LIRE un papier de Reuters sur le sujet.

    Le 14 Mai 2011

     

  • Florilège des prises de parole de nos représentants à l’Assemblée Nationale le 10 Mai 2011

    Florilège des prises de parole de nos représentants à l’Assemblée Nationale le 10 Mai 2011

     La séance tenue hier à l'Assemblée Nationale portant sur l'exploration-production des gaz de schistes en France a fait l'objet de débats d'une très haute tenue, largement argumentée et d'une rigueur scientifique évidente (normal, certains des intervenants ont même étudié à l’École Polytechnique). Je vous en rapporte certains extraits qui vont illustrer mes propos:

    "La fracturation hydraulique horizontale nécessite trois ingrédients nocifs bien connus maintenant : des quantités d’eau phénoménales, des produits chimiques toxiques pour attaquer la roche et des microbilles de sable à injecter pour maintenir ouvertes les failles."

    "Nous sommes face à une catastrophe potentielle que nous pouvons prévenir au lieu de tenter de pallier ses effets."

    "…pour les entreprises américaines du secteur, notamment la plus grande d’entre elles, Chesapeake, c’est un échec commercial: leurs actionnaires commencent à se mordre les doigts en pensant qu’ils sont plutôt perdants." (FIG. illustrant la catastrophe boursière et étayant ce propos).

    Chesapeake

    "Madame la ministre, commencez par annuler les autorisations de travaux en Seine-et-Marne et, plus globalement, toutes les autorisations d’exploration: si l’exploitation est néfaste pour l’environnement, cela ne sert à rien de commencer les explorations."

    "Fournir du gaz de schiste ou de l’huile de schiste à bas coût portera, nous le savons bien, un coup d’arrêt à la recherche et au développement des énergies alternatives durables et tout autant à la recherche et au développement en matière d’économies d’énergies et d’efficacité énergétique."

    "Une note d’analyses stratégiques publiée ce mois-ci le confirme: «Compte tenu de ces nouveaux gisements, la demande en gaz devrait augmenter de 45 % à l’horizon 2035.» La dictature des marchés s’exercera pleinement en faveur du financement des nouvelles ressources de gaz non conventionnelles, au détriment des autres modes de production d’énergies."

    "Ce serait tout simplement un recul politique après le large consensus du Grenelle 1, cette fois-ci bel et bien relégué au rang de la lampe à huile et de la marine à voile."

    "Faut-il attendre une pollution généralisée de notre territoire pour reconnaître que la course aux hydrocarbures de schiste est une erreur? Destruction des espaces naturels, gaspillage des ressources en eau, pollution des nappes phréatiques, déchets contenant des substances radioactives, production de gaz à effets de serre, etc. Beaucoup d’argent, beaucoup de dégâts, et tout cela pour des puits qui seront exploités entre cinq et dix ans."

    "Attachons-nous, au-delà de cet objectif déraisonnable, au coût socioéconomique et écologique de cette obstination fossile qui m’a fait dire que les gaz de schiste, c’est l’énergie du désespoir; on pourrait dire aussi que l’énergie fossile, c’est l’énergie des dinosaures, alors qu’il faut, au contraire, démontrer notre capacité à évoluer vers un modèle alternatif durable. En fait, les gaz de schiste, dits par euphémisation (sic) calculée «non conventionnels», sont connus depuis longtemps, mais, jusqu’au renchérissement des hydrocarbures, on estimait leur extraction bien trop coûteuse. Ce seul aveu semble coiffer le débat d’une auréole éblouissante de déraison."

     La lecture de tels propos éclairés ne peut que nous rasséréner sur la qualité de notre représentation démocratique et sur la perspicacité de la dernière phrase citée.

     Pour identifier les auteurs de ces citations qui entreront à coup sûr dans l'Histoire, vous pouvez vous reporter au C.R. de débats de l'Assemblée Nationale.

     Plus sérieusement vous pouvez lire aussi une déclaration de grands chimistes français qui s'insurgent contre ce simulacre de débat "démocratique" où les plus gueulards l'emportent.

    Le 11 Mai 2011

     

  • La Chine veut accroître sa production d’alcool de manioc en utilisant la totalité de la ressource

    La Chine veut accroître sa production d’alcool de manioc en utilisant la totalité de la ressource

    Cassava  Le manioc avec des récoltes mondiales de 241 millions de tonnes en 2009 (FAO) est le deuxième tubercule le plus cultivé après la pomme de terre. Le Nigeria, la Thaïlande, le Brésil, l'Indonésie, la RDC en sont les grands producteurs mondiaux. La Chine avec 4,5 millions de tonnes produites en 2009 ne se classait qu'au treizième rang des pays producteurs selon la FAO, mais il semblerait selon d'autres sources que ces volumes se soient fortement accrus en 2010 (près de 12 millions de tonnes?) et qu'ils soient également complétés pour les utilisations chinoises, par des importations en provenance de Thaïlande (4,5 millions de tonnes). Il est à noter une particularité sur la destination du manioc chinois: l'utilisation des céréales telles que le maïs, pour alimenter de nouvelles unités de production de bioéthanol ayant été interdite depuis 2007, les industriels chinois se sont tournés vers le manioc, riche en amidon, comme matière première de base de production de bioéthanol.

      L'objectif actuel de la Chine qui en 2010 a produit 2 millions de tonnes d'alcool (44 mille barils/jour) serait de porter sa production à 10 millions de tonnes d'alcool en 2020 (220 kbl/jour) ce qui lui permettrait de généraliser une essence à 5 ou 6% d'éthanol à cette date. Nul doute que cet objectif sera revu à la hausse pour au moins atteindre les 10% du mélange E10 ou plus pour le E15.

     C'est la raison fondamentale qui justifie l'annonce par la société britannique TMO Renewables, de la signature de deux accords de développement avec des Groupes chinois de process de production d'alcool de deuxième génération à partir des tiges et des déchets de production du manioc.

     Tout comme les feuilles et tiges de maïs ou la bagasse issue de la transformation de la cane à sucre, les lignocelluloses associées à la culture du manioc doivent participer à la production d'alcool au travers d'usines agricoles manipulant les deux procédés: celui de première génération utilisant l'amidon et celui de deuxième génération utilisant les déchets lignocellulosiques.

     Le premier contrat de TMO consiste à installer dans une usine du chinois COFCO qui produit déjà 4400 barils/jour d'éthanol à partir de manioc dans la province du Guangxi, une branche de deuxième génération qui utilisant les déchets agricoles de cette culture permettra d'accroitre la production d'alcool de 15%.

     Le second contrat signé avec le grand pétrolier CNOOC porte sur la construction d'une usine située sur un site de 60 mille hectares également dans le Guangxi, qui devrait récolter 1,6 millions de tonnes de manioc et autant de sous-produits. Cette usine agricole avec deux types de procédés de première et deuxième génération devrait produire 3900 barils/jour d'alcool (180 mille tonnes/an).

     Le plant de manioc (tubercule, tiges et feuilles), après celui de maïs et la cane à sucre devrait devenir à terme une importante ressource mondiale de biomasse destinée à la production de bioéthanol dans le monde au travers de procédés valorisant la totalité de la plante.

     Il faut imaginer un marché mondial de l'éthanol vers les 4 millions de barils/jour en 2020 en ne négligeant pas les développements des productions en Asie et en Afrique.

    LIRE le communiqué de TMO Renewables sur le sujet.

    Le 10 Mai 2011

     

  • La Prius de Toyota deviendrait en version standard rechargeable au réseau en 2014

    La Prius de Toyota deviendrait en version standard rechargeable au réseau en 2014

    Prius-plug-in  C'est une info du Nikkei généralement très bien renseigné sur les choix marketing des constructeurs de véhicules japonais: Toyota proposerait en 2014 en version standard une Prius plug-in hybride qui serait donc rechargeable sur le réseau électrique. Équipée d'une batterie au Lithium de hautes performances elle ne ferait plus appel aux batteries Ni-MH et à leurs terres rares constitutives devenues trop stratégiquement sensibles. La consommation annoncée du véhicule passerait de 2,6 litres aux cent kilomètres (38 km/litre) à 1,7 litre aux cent km (60 km/litre) soit quelque chose autour des 39 g de CO2 au kilomètre. L'autonomie visée en mode purement électrique qui déterminera la taille et le prix de la batterie n'est pas précisée.

     Rappelons que le concept plug-in hybrid grâce à une batterie, typiquement de 5 à 7 kWh, permet au véhicule de se déplacer en milieu urbain en mode purement électrique durant 30 km environ (20 miles). Pour des trajets plus longs la voiture passe alors en mode hybride classique. Il faut imaginer pour des applications de types trajet-travail en milieu urbain la nécessité de faire un plein d'essence tous les trois à six mois. En option Flex-Fuel utilisant du E85, la part de dérivés du pétrole utilisée devient alors insignifiante.

     En comparaison, un véhicule purement électrique nécessitera d'être équipé d'une batterie 3 à 4 fois plus importante pour assurer l'autonomie des 100 miles psychologiquement indispensable. Par contre le véhicule débarrassé du moteur thermique et de son carburant pourra faire appel à des technologies innovantes comme la solution "in-wheel motor" qui permettra d'accéder à d'excellents rendements énergétiques et porter l'autonomie vers les 300 km.

     Tout cela repousse vers des horizons lointains la démocratisation de solutions plus révolutionnaires de types Pile à Combustible et autres options hydrogénées.

    Le 9 Mai 2011

  • Les Provinces canadiennes commencent à publier les estimations de réserves de gaz non conventionnels

    Les Provinces canadiennes commencent à publier les estimations de réserves de gaz non conventionnels

      Canada-2011

     Le Ministère de l’Énergie et des Mines de Colombie Britannique vient de publier avec panache les réserves de gaz de schistes évaluées pour le gisement du bassin de la Horn River situé au Nord-Est de la Province. Une nouvelle estimation des réserves ultimes s'élève à 2198 milliards de mètres cubes de gaz qui viennent s'ajouter pour l'ensemble du Canada, aux estimations de 9,7 milliers de milliards de m3 de réserves ultimes de gaz conventionnels encore à exploiter. Bien sûr cette publication sera suivie de nombreuses autres. Rappelons que l'EIA estime les réserves de gaz de schistes canadiens à 11 000 milliards de m3 ce qui ferait du Canada le sixième plus gros propriétaire de gaz de schistes au monde.

     Ceci contraste avec le cas de la France classée fort honorablement à la onzième place mondiale, fait qui bien-sûr attriste ceux qui nous dirigent. C'est économiquement très bon mais ce serait politiquement destructeur, or on sait qu'en France ce sont les arguments politiques qui priment toujours sur l'économie. Les exemples anciens ou récents étayant cette affirmation seraient trop nombreux pour être énumérés ici. Attendons sans illusion les débats parlementaires sur ces éthers diaboliques.

    LIRE le papier publié sur ce sujet.

    Le 8 Mai 2011