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  • Une sacrée bonne question : que peut-on retenir de l’an 2009 dans le domaine de l’énergie?

    Une sacrée bonne question : que peut-on retenir de l’an 2009 dans le domaine de l’énergie?

    Il est de tradition d'établir un bilan à la fin de l'année sur les évènements marquants retenus où les tendances de fond perceptibles. Il me semble important de réaliser cet exercice pour mesurer tout le chemin parcouru, au cours de l'année 2009, dans le domaine des énergies et de leur utilisation. Je retiendrai moins d'une dizaine de points importants.

    1 – Le fait marquant majeur de 2009 est la conviction partagée par tous les constructeurs automobiles que l'offre Marketing dans le monde doit s'appuyer maintenant sur les économies d'énergie, la traction électrique et le respect de l'environnement. Le revirement de Peugeot vers le petit EV de Mitsubishi, la présentation d'un véhicule diesel hybride consommant 2,4 litres aux cent kilomètres par VW au salon de Los Angeles, en disent long sur le renversement d'approche des marchés par les constructeurs. Up-Lite-VW-concept-2009  Il faut créditer aux comptes des grands constructeurs japonais (Toyota, Honda, Mitsubishi, Nissan) et à ceux de leurs partenaires constructeurs de batteries (Panasonic, Sanyo, GS-Yuasa, NEC), après de longues années de développement et d'optimisation,  de cette mise à disposition de nouvelles technologies hybrides ou électriques en faveur du transport routier. Le mouvement repris par l'ensemble des constructeurs asiatiques, européens et américains semble être irréversible. La Chine, forte de son industrie des batteries, déclare vouloir en particulier adopter la technologie électrique pour assurer une large part de son développement dans les transports individuels. Les premiers exemplaires d'EV qui vont apparaître en 2010 vont marquer le début d'une formidable aventure de plusieurs décennies qui va, peu à peu, substituer à l'essence ou au gasoil, l'électricité comme source d'énergie dans le transport routier. Un exemple de progrès dans l'efficacité énergétique et de substituabilité des sources d'énergie qui ramènera les angoisses des peak-oilers à leur juste mesure métaphysique.

    Dans le domaine des transports il faut noter les trop lents développements industriels et commerciaux des avions de nouvelle génération de type Airbus A380 ou Dreamliner B787 qui par leur large utilisation de matériaux composites vont faire faire un saut qualitatif au transport aérien commercial durant la prochaine décennie. L'annonce d'une nouvelle génération de réacteurs moins bruyants et moins gourmands en kérosène (Pratt & Whitney, CFM) destinée aux futures générations d'avions va également dans le bon sens.

    2 – le deuxième fait majeur est la conviction qu'ont acquise les Marchés de la disponibilité d'énormes réserves de gaz naturel encore inexploitées. Gaz conventionnels comme celui du Qatar ou de l'Iran, gaz un peu plus complexes à exploiter comme celui de la Mer de Barents de type Shtokman, gaz de Schistes bitumineux, de houille ou de sables compacts aux Etats-Unis rendus exploitables grâce aux forages horizontaux et à la fragmentation des roches par injection de solutions aqueuses. Cours-gaz-Henry-2009-12 Durant l'année les cours du gaz aux Etats-Unis se sont totalement effondrés jusqu'à 2.5 $/MMBTU au début du mois de Septembre. Ils sont remontés vers les 6$ depuis ce qui est équivalent, à quantité d'énergie comparable, à 35 $ le baril de pétrole. L'abondance de gaz naturel dans le monde, ses cours raisonnables, sa diffusion par gazoduc ou sous forme de GNL et son efficacité dans la génération d'électricité à l'aide des centrales à cycle combiné en font le champion potentiel des diverses énergies primaires accessibles et raisonnablement polluantes (deux fois moins que le charbon). Les Etats-Unis ont ravi la place de premier producteur de Gaz Naturel à la Russie. La politique de prix rigides indexés sur ceux du pétrole et les contraintes des accords de "take or pay" rendent le commerce de Gazprom avec ses clients européens assez difficile.

    3 – le troisième paramètre important est le redressement, en cours d'année, des cours du pétrole à des niveaux inattendus voisins des 80 $/baril dans un climat de faible demande, de stocks spéculatifs élevés, recensés ou flottants. Cours-WTI-2ans-2009-12 Certains traders estiment en cette fin d'année, les stocks flottants de pétrole brut et de dérivés vendus à terme, à des volumes proches de 150 millions de barils. Dans le courant de 2010 les deux tiers de ces réserves devraient disparaître. Ces niveaux de prix élevés des produits pétroliers ne sont pas favorables à la reprise économique mondiale et incitent les utilisateurs à moins consommer ou à mieux consommer. Ce paramètre est donc favorable à une baisse des consommations de pétrole attendue dans les pays de l'OCDE. Il se pourrait donc que la reprise des consommations de pétrole, en 2010, annoncée par l'Agence Internationale de l'Energie soit beaucoup plus modeste que prévue.

    4 – Il est possible de noter pour 2009 le piétinement du développement du nucléaire empêtré dans d'interminables mesures administratives au sein des démocraties occidentales. Par exemple, le sentiment peu favorable de l'Administration Obama envers la voie nucléaire peut permettre de pronostiquer que rien de bien décisif n'est à attendre aux USA dans ce domaine durant les trois ans à venir. Les piètres performances de nos champions français et de leur réacteur franco-allemand EPR trop lourd, trop cher, trop sophistiqué qui ont eu la bonne idée d'aller développer le premier prototype en Finlande, ne sont pas là pour nous rendre optimistes sur la filière de troisième génération. Seule une alliance plus formelle avec la branche nucléaire de Mitsubishi Heavy pourrait redonner des couleurs à une offre franco-nippone rénovée. Il est curieux de ne plus entendre parler du réacteur Atmea, réacteur de troisième génération de taille moyenne de 1100 MW normalement en cours de développement au sein de la JV AREVA-MHI.

    5 – La chute des prix des modules photovoltaïques est également un point marquant pour 2009. Les prix auraient été divisés par deux par certains fournisseurs par exemple, sous le coup de la concurrence mondiale dont la capacité de production est largement excédentaire. Cette situation a même conduit certains industriels allemands à se plaindre auprès des autorités administratives des prix de dumping pratiqués par leurs concurrents chinois. L'année 2009 aura été sauvée par une forte demande en Allemagne qui pourrait atteindre 4000 MW, soit 1300 MW de plus que pronostiqué, poussée par des annonces de réduction des prix des tarifs préférentiels dès 2010. En France, l'annonce de l'installation de First Solar à Blanquefort dans la banlieue de Bordeaux, sponsorisée par EDF EN est une bonne nouvelle. Rappelons que First Solar est le premier constructeur mondial avec une technologie en couche mince au CdTe. Toyota-chargeur Seules les technologies en couches minces, largement automatisables, arriveront à survivre dans les pays de l'OCDE. La Chine constitue dès à présent un puissant cluster du Silicium cristallin que seules des mesures protectionnistes des Etats arriveront à provisoirement endiguer. Pour comprendre l'avenir du photovoltaïque il faut se persuader que les modules photovoltaïques vont devenir des composants banalisés, certains parlent même de "commodities". Ce n'est pas sur leurs productions que les pays occidentaux doivent se battre, mais sur la définition de systèmes complexes "smart" qui associeront modules, batteries et traitement de l'information.

    6 – La concrétisation de vastes projets éoliens offshore en Europe du Nord (Grande-Bretagne, Allemagne,..) dominée par Siemens et le dynamique électricien Dong constitue également une donnée intéressante. Là également, c'est l'approche système qui prévaut, Siemens proposant à la fois les éoliennes mais aussi toutes les infrastructures permettant d'acheminer l'énergie électrique vers les réseaux existants. Le taux de charge de 40% (3500 heures/an) des éoliennes intervient de façon évidente dans le bilan financier des opérations. Siemens estime un marché éolien offshore en Europe du Nord autour de 70 GW, mais cet industriel pense que le marché mondial et en particulier asiatique va soutenir une croissance annuelle moyenne de 12% d'ici à 2030.

    7 – Le piétinement des développements de biocarburants de deuxième génération est un fait avéré. La crise venue, les divers sponsors ont regardé de plus près les rentabilités des projets et se sont retirés. Pour l'instant, les seuls projets rentables de biocarburants de deuxième génération semblent être ceux de Poet le leader mondial de l'éthanol de maïs. Pour ce dernier l'introduction d'une boucle utilisant les rafles de maïs est un investissement marginal rentable qui lui permettra d'accroître de 10 à 20% les volumes produits par chacune de ses usines. Sinon les procédés enzymatiques semblent stoppés par le coût trop élevé des enzymes et la faible teneur en alcool des jus fermentés. Les procédés Fischer-Tropsch sont arrêtés par leur complexité évidente. Seuls de futurs procédés de pyrolyse catalytique rapide qui transforment en une seule étape de la sciure de bois en une solution contenant des solvants organiques semblent posséder la simplicité indispensable pour pouvoir imaginer une usine de faible taille, rentable, alimentée par les déchets cellulosiques d'un canton. Il reste à développer et à valider industriellement ces nouveaux procédés.

    8 – L'inexorable croissance quadratique des émissions de CO2 dans le monde, liées à la combustion du charbon dans les centrales chinoises ou indiennes ne caractérisera pas que l'année 2009. En effet, elle risque de s'étendre sur une large partie du 21ème siècle. CO2-anthropique-1980-2009 La naïveté et le manque de clairvoyance du nouveau Président des Etats-Unis, l'incompétence de la Commisiion et la division stupide de l'Europe sur ces sujets, ne peuvent qu'encourager ces immenses pays à poursuivre, pénards, leur développement débridé. L'absence de politiques énergétiques claires aussi bien en Amérique du Nord qu'en Europe place nos pays occidentaux en position de faiblesse pour essayer de négocier quoi que ce soit avec la Chine et l'Inde. Il faut donc espérer un sursaut de nos Dirigeants pour lancer un vaste plan énergétique qui devrait reposer sur le démantèlement programmé sur deux décennies des centrales au charbon que ce soit en Europe ou en Amérique du Nord. Seulement une fois ces actions programmées et engagées, les pays de l'OCDE pourront se retourner vers les pays en voie de développement et leur demander de participer à l'effort collectif. Il faudra, au bas mot, une dizaine d'années pour en arriver là.

    9 – Les querelles des climatologues et les magouilles des plus extrémistes auront marqué 2009. Il faut donc attendre l'équipe de climatologues, plus perspicace que les autres, qui va réaliser la synthèse évidente entre l'effet des variations d'irradiance solaire (Scafetta) et celui de l'effet de serre des GHG. Scafetta-quadratique Ne parler que de l'un ou de l'autre effet est simplement un non-sens. Cela revient à faire porter les phénomènes observés que sur l'un des deux paramètres et donc de surestimer ou sous-estimer son impact sur le climat. Quand à ceux qui prévoient le climat qu'il fera dans trente ans à Ouagadougou ou à Calcutta, exercice proche de la rédaction des Contes de Perrault qui terrifient les enfants, ils feraient mieux de se taire. Copenhague aura au moins douché les mystiques du climat les plus radicaux.

    En conclusion, il est évident que 2009 aura été une année très riche en évènements dans le domaine des énergies et de leurs applications. La nécessité d'agir à la fois sur l'efficacité énergétique des applications et sur la recherche d'un mix énergétique plus respectueux du climat, entre peu à peu dans les moeurs, poussée par la demande des jeunes générations urbanisées et soucieuses des effets de leurs choix sur le monde. Espérons pour 2010, une prise de conscience des Dirigeants les Pays les plus riches de l'impérative nécessité de bâtir des politiques énergétiques cohérentes qui imposeront des choix dans le développement ou l'abandon progressif de certaines ressources énergétiques, en fonction de leur impact environnemental.

    Le 30 Décembre 2009,

  • L’Inde connaît un quart de son territoire en cours de désertification

    L’Inde connaît un quart de son territoire en cours de désertification

    Le territoire indien qui représente 2,4% des surfaces émergées du globe abritait l'an dernier 16,7% de la population mondiale et, ne l'oublions pas, 18% des bovidés, laissés à leurs occupations. Or 69% du territoire (228 Mha) sont composés de régions sèches ou arides. Un article publié dans la revue indienne Current Science du mois de Novembre nous apprend que des observations par satellite permettent d'avancer que 25% de la surface du territoire (81,5 Mha) sont en cours de désertification et qu'un tiers de ce territoire (105,5 Mha) est en état de forte dégradation. Les pressions climatique et humaine semblent se faire durement sentir sur certaines régions, celles en particulier situées à l'ouest du pays, à la frontière avec le Pakistan (Rajasthan, Gujarat, Jammu et Kashmir au nord). L'Etat de Maharastra, dirigé de Bombay, connaît également de profondes atteintes climatiques et liées à la surpopulation. 

    Rappelons que les Nations Unies prévoient que la population indienne passera de 1,2 milliards d'habitants en 2010 à 1,6 milliards en 2050. Elle dépassera celle de la Chine dès 2030. Il n'est pas sûr que ce surcroît de population ait les moyens, un jour, de rejoindre la Société de Consommation et de s'acheter une Tatamobile comme annoncé de-ci, de-là. En l'absence de réaction rapide de cette grande démocratie, il faut être pessimiste sur l'avenir des populations qui la composent.

    Inde

    LIRE cet intéressant article et accéder aux données détaillées des observations.

    Le 28 Décembre 2009

     

  • Le barnum de Copenhague illustre le besoin impératif de politiques énergétiques au sein de l’Europe et de l’OCDE

    Le barnum de Copenhague illustre le besoin impératif de politiques énergétiques au sein de l’Europe et de l’OCDE

    Oco-satellite-NASA On aurait pu croire, il y a une semaine de cela, que les dirigeants chinois et américains avaient tout arrangé lors de leur rencontre en tête à tête sur la menace climatique et que la réunion de Copenhague allait être une formalité amusante, où tout aurait été joué et préparé à l'avance. Le résultat montre qu'il n'en a rien été. La Carpe démocratique américaine a été roulée dans la farine par le Lapin totalitaire chinois. Le miracle incestueux n'a pas eu lieu. Il ne reste plus au jeune Président débutant Obama, humilié, qu'à tirer les leçons de l'aventure et peut-être de regretter de n'être pas venu aux cérémonies d'anniversaire de la chute du mur de Berlin. Il est évident que l'Europe peut profiter de ce nouveau couac entre Chine et Etats-Unis pour relancer une nouveau dialogue avec la démocratie américaine qui porterait sur les problèmes énergétiques et climatiques. Les pays développés de l'OCDE n'acquerront une force de persuasion nécessaire vis à vis de la Chine et de l'Inde qu'à condition de se présenter avec un plan d'action énergétique et climatique crédible et en cours de mise en oeuvre. Or qu'avons-nous pour l'instant? D'un côté, une réflexion américaine sur le sujet largement insuffisante, se concrétisant par des aides financières ponctuelles du DOE destinées à une multitude de projets, dans un contexte sans plan, sans axe majeur clairement défini. De l'autre côté, une Europe désunie, ne possédant pas au niveau de la Commission les compétences pour élaborer la moindre amorce de politique énergétique, incapable de bâtir un cadre cohérent de fermeture progressive des centrales électriques au charbon accompagné d'une politique d'approvisionnement en gaz naturel indispensable à l'alimentation de nouvelles centrales en secours des énergies intermittentes renouvelables non subventionnées. Ce plan définirait également la place de l'énergie électronucléaire et les grandes actions de progrès à conduire dans ce domaine. Bien sûr, dans ce cadre, les Etats-Unis et le Japon devraient être associés à la réflexion pour déboucher sur de possibles alliances entre entreprises. Que les pays membres de l'OCDE aient quelques années d'avance sur les pays en développement est dans l'ordre des choses. Il ne sert à rien de vouloir imposer à ces derniers des contraintes qu'ils ne sont pas prêts à accepter. 

     Enfin apparaît l'absence cruelle du satellite OCO ou équivalent qui mesurerait en temps réel les teneurs en CO2 sur tous les points de la planète. La connaissance et la cartographie des sources de CO2 permettraient l'établissement d'un dialogue plus musclé avec certains pays qui préfèrent rester pudiques sur leurs émissions de CO2.

     Il semble indispensable aujourd'hui que le milliard d'hommes de l'OCDE voient leurs gouvernants travailler sérieusement à l'élaboration de politiques énergétique et climatique cohérentes et porteuses de progrès, même s'il faut durant quelques années laisser tomber l'espoir d'une grande politique énergétique et climatique mondiale inaccessible en l'état. Alors, le barnum de Copenhague aura au moins servi à quelque chose: le retour des démocraties au réalisme indispensable.

    Le 19 Décembre 2009

  • De moindres déboisements en 2008 expliqueraient partiellement la monotonie de la croissance de la teneur moyenne annuelle en CO2 dans l’atmosphère

    De moindres déboisements en 2008 expliqueraient partiellement la monotonie de la croissance de la teneur moyenne annuelle en CO2 dans l’atmosphère

    Il est une observation assez évidente à faire depuis quelques années: malgré la forte croissance des émissions de CO2, dues au développement économique de la Chine, qui a marqué une nette accélération à partir de 2002-2003, résultat de la combustion de charbon dans les centrales électriques et les aciéries chinoises, la moyenne annuelle de la teneur en CO2 dans l'atmosphère à poursuivi une croissance monotone. Cette observation n'empêche paradoxalement pas certains auteurs d'expliquer que les océans ont de plus en plus de mal à absorber du CO2 et qu'ils auraient même tendance à en rejeter plus dans les régions équatoriales, là où remontent les courants chargés de gaz carbonique.

    Pour quantifier les émissions annuelles anthropiques de CO2 il faut considérer deux familles de paramètres. La première famille est constituée des émissions aisément quantifiables telles que la combustion des énergies fossiles et la production mondiale de ciment. La deuxième famille beaucoup plus difficile à cerner et à quantifier provient des modifications par l'homme de l'utilisation des terres (LUC ou Land Usage Change). L'exemple le plus parlant est la déforestation des régions tropicales et équatoriales. Or ces émissions LUC qui étaient admises avec une grande incertitude comme étant de l'ordre de 5,5 milliards de tonnes de CO2 par an ont été revues à la baisse en 2008 en raison d'une moindre déforestation en Asie et dans l'Amazonie. La meilleure estimation pour 2008 serait de 4,4 milliards de tonnes de CO2 toujours avec le même niveau d'incertitude à + ou – 2,5 milliards de tonnes près. Les émissions LUC ne représenteraient plus que 12% des émissions anthropiques (FIG.I).

    FIG.I Les rejets de CO2 anthropiques annuels subissent à la fois une accélération des rejets liés à la combustion des énergies fossiles et un ralentissement récent des déforestations

    Rejets-anthropiques-1980-2008 

    Les scientifiques en charge de prévoir l'impact des émissions de GHG sur le climat sont donc fortement handicapés par cette difficile appréciation des variations annuelles d'émissions anthropiques de CO2. Si l'on en croit les données d'entrée de 2008, la baisse des émissions dues au LUC de 1,1 milliard de tonnes de CO2 aurait largement compensé la croissance des émissions fossiles mondiales, estimées à 0,6 milliards de tonnes par l'Agence de l'Environnement Néerlandaise. Mais peut-être que la valeur du LUC en 2007 avait elle aussi déjà décru? Compte tenu de toutes ces incertitudes il est possible de reconstituer un profil de rejets, illustré dans la FIG.I (courbe verte). Les émissions chinoises de CO2 sont encore nettement marquées à partir de 2002.

    Pour la suite il sera utile de disposer du rapport entre émissions de CO2 et teneur totale de CO2 dans l'atmosphère terrestre. Cette quantité annuelle est obtenue en multipliant la teneur moyenne annuelle en CO2 en ppm par 1.77 10+14 moles de CO2 soit 7,8 milliards de tonnes. La teneur totale en CO2 dans l'atmosphère a varié de 2640 milliards de tonnes en 1980 à 3000 milliards de tonnes en 2008.

    Mais quel a été l'effet de ce changement de pente de l'ampleur des rejets annuels de CO2 sur la teneur en dioxyde de carbone dans l'atmosphère. Et bien, il n'y a eu aucun effet perceptible (FIG.II). L'équation de la corrélation quadratique depuis 1993, présentant un coefficient de corrélation de 0.999 avec la courbe permet de calculer pour chaque année la pente de cette courbe et donc la variation lissée de la teneur en CO2 dans l'atmosphère. La division de cette valeur en chaque point par la teneur mesurée permet d'obtenir la variation annuelle lissée de la teneur en CO2 en pourcents. Cette méthode permet de s'affranchir des fortes variations annuelles de progression de la teneur en CO2, attribuables à des effets non récurrents. La courbe de corrélation conduit à 400 ppm moyens en 2015 et aux 450 ppm tant redoutés vers 2034.

    FIG.II : la teneur en CO2 moyenne annuelle de l'atmosphère progresse de façon quadratique. La courbe de corrélation depuis 1983 donne une bonne approximation d'une variation dépouillée des aléas annuels peu significatifs

    Teneur-atmosphere-CO2-1980-2008

    Disposant de la variation annuelle des émissions de CO2 et de la variation annuelle de la teneur en CO2 dans l'atmosphère, il est aisé par un rapport des deux valeurs de calculer la fraction atmosphérique (FIG.III). Cette fraction du CO2 restant chaque année dans l'atmosphère a crû jusqu'en 2002 pour atteindre un maximum de 0,49, mais depuis cette date une plus grande partie du CO2 émis est absorbé par les terres et les mers. Cette absorption s'est élevée à 55% du CO2 émis en 2008 (aE=0,45). 

    FIG.III La fraction atmosphérique est obtenue par le rapport de la croissance annuelle lissée de la teneur en CO2 dans l'atmosphère et de celle des rejets annuels exprimés en pourcent du CO2 atmosphérique total

    Fraction atmospherique-1993-2008

    La question que l'on doit se poser est de savoir si cet effet est passager ou bien s'il existe des rétroactions attribuables à la montée de la teneur en GHG ou à d'autre paramètres extérieurs tel que l'irradiance solaire qui pourraient expliquer une possible inversion de tendance. Il a été avancé plusieurs hypothèses ici pour expliquer ce phénomène telles que la croissance de la pression partielle, l'accroissement de la dissolution dans l'arctique en raison de la fonte de la banquise durant les 4 mois d'été, l'existence de surfaces océaniques locales plus froides, l'accroissement des précipitations, etc. 

    Mais ces fractions ne parlent pas de façon très claire, il est bien préférable de revenir aux milliards de tonnes de CO2 (FIG.IV). Alors qu'avant 2002 les terres et les mers absorbaient annuellement dans les 16 milliards de tonnes de CO2, il apparaît que depuis 2006 la nature se débrouille pour en absorber 20 milliards de tonnes soit 25% en plus. 

    FIG. IV : Le CO2 absorbé annuellement par les terres et les mers est passé en quelques années de 16 milliards de tonnes à 20 milliards de tonnes. Pourquoi et comment?

    Fraction atmospherique-1993-2008b

    Ce résultat n'est pas en désaccord franc avec le travail en référence qui conclut à la moindre disparition de CO2 dans les océans, mais alors il faudra expliquer où passent ces milliards de tonnes de gaz carbonique. Cela risque d'être assez "coton".

    LIRE le travail de Le Quéré, Raupach, Canadell et autres qui vient de paraître. On convertira cette unité absurde qu'est le pétagramme de carbone en milliards de tonnes de CO2 en multipliant par (3 +2/3) ou 44/12.

    Le 19 Novembre 2009


     

  • La prévision climatique: une science en guerre et en plein chamboulement?

    La prévision climatique: une science en guerre et en plein chamboulement?

    Les tribus divisées de climatologues peuvent se distinguer en deux grands blocs: les anciens férus de climatologie cyclique, issus de l'ère glacière, scrutant les taches solaires, convaincus qu'après une phase caniculaire, reviendra une période de frimas et le retour du mammouth laineux sur les rives de la Mer Noire. L'autre bloc, plus jeune, plus actif qui a balayé toutes ces fadaises cycliques et affirme, grâce à l'utilisation de modèles de simulation introduisant les effets des GHG, des aérosols, des nuages et de l'activité volcanique, être en capacité de prévoir l'évolution du climat qui s'avère être …très chaude. Querelle classique des anciens et des modernes comme la Science en a toujours connu. Il n'y a pas si loin, nos grands savants s'accrochaient encore aux ineptes idées de génération spontanée devant les fadaises d'un jeune Pasteur qui à l'aide de ses expérimentations, détruisait toutes leurs théories fumeuses.

    FIG.I : Cycles ou modélisation? Les deux écoles de climatologie s'affrontent.

    Scafetta-2009-l 

    Il y a cependant un hic important dans ce schéma officiel. Les divers outils de simulation utilisés de type Energy Balance Model (EBM) ou de General Circulation Model (GCM) pâtissent d'une faiblesse intrinsèque à l'outil utilisé devant un phénomène d'une très grande complexité, comme le climat: la difficulté d'établir les nombreuses lois physiques qui relient entre eux les divers paramètres. Par exemple, il a été montré sur ce blog de façon très simple (LIRE), combien la proportion atmosphérique de gaz carbonique émis par les activités humaines pouvait largement varier en quelques années. Ceci prouve que le seul cycle du carbone est à lui seul un vaste sous-ensemble de cette problématique, encore largement méconnu où se percutent de nombreux feedbacks et autres interactions. En d'autres termes, il semblerait que l'outil de travail des climatologues de l'IPCC (GIEC) ne soit pas encore à la hauteur des ambitions révolutionnaires de ses Membres. Par analogie, les anciens se souviendront des prévisions économiques catastrophiques du Club de Rome et de son pavé issu en 1972 de travaux de simulation trop ambitieux,"The limit of growth" qui aurait pu s'appeler "Les limites de la simulation".

    Ce constat de faiblesse de l'outil de simulation, Nicola Scafetta de la Duke University de Durham, l'a bien identifié. Il préconise donc d'abandonner l'outil de simulation pour revenir à la démarche empirique, chère aux anciens. Mais ce qui fait la force de Scafetta, c'est sa maîtrise de l'outil mathématique et son aptitude à prendre ce qui est bon dans les résultats des travaux de simulation comme l'impact du volcanisme ou celui de l'ENSO (El Niño-Southern Oscillation). Dans son approche de régression multilinéaire il identifie deux systèmes superposés l'un avec une constante de temps courte de 0,4 an attribuable aux constituants du climat à faible capacité calorifique (atmosphère, nuages, aérosols,…) et l'autre avec une constante de temps longue de 12 + ou – 3 ans attribuable aux océans. En réalisant plusieurs hypothèses sur les variations d'irradiances solaires, jusque là mal mesurées par des satellites différents, Scafetta montre que la composante liée à l'irradiation solaire et ses cycles décennaux joue un rôle encore important dans le réchauffement climatique (FIG.II). C'est la conclusion de ses travaux publiés en Juillet 2009 dans le Journal of Atmospheric and Solar-Terrestral Physics. Selon les hypothèses sur les valeurs d'irradiance totale (TSI), la composante liée aux cycles solaires dans les phénomènes serait encore comprise entre 1/3 et les 2/3 des phénomènes observés. 

    FIG.II : Le modèle de régression multilinéaire, selon les irradiances solaires totales retenues permettent d'expliquer une partie des variations de températures, dépouillées des effets volcaniques et de l'ENSO.

    Scafetta-2009-e

    Certains comme Benestad et Schmidt ont voulu contester la méthodologie de Scafetta, mais ils se sont fait immédiatement et sèchement renvoyer dans leurs buts par ce dernier pour incompétence en mathématiques (LIRE). Les coups volent bas dans la climatologie mondiale.

    Il apparaît donc que le réchauffement climatique observé depuis les trente dernières années est dû à la fois au forçage climatique relié à la croissance de la teneur des GHG mais aussi à des maximum d'irradiance solaire totale (TSI) particulièrement intenses durant les dernières décennies (FIG.III).

    FIG.III : L'Irradiance solaire totale des dernières décennies a connu des maximums très intenses

    Scafetta-2009-k

    A partir de ces observations et de la mise en évidence d'un cycle de 60 ans de l'irradiance solaire qui semble être lié à la variation de la position du soleil par rapport au centre des masses du système solaire. Le climat par effet des radiations solaires selon des cycles de 10, 20, 30 et 60 ans subirait des fluctuations autour d'une courbe quadratique de corrélation qui peut être attribuée au forçage radiatif des GHG (FIG.IV).

    FIG. IV : les variations climatiques dues au cycle solaire de 60 ans se superposent à une évolution quadratique qui rappelle celle de l'évolution de la teneur en CO2 dans l'atmosphère

    Scafetta-2009-i

    On peut l'observer sur la courbe pleine noire en partant du maximum des années 1940 qui va en décroissant jusqu'en 1970, suivie de la forte remontée des températures jusqu'en 2000. Ce cycle de 60 ans est cohérent avec les observations passées mais aussi avec les observations actuelles qui ne montrent depuis 5 ou 6 ans aucun emballement des températures (LIRE). La courbe quadratique de tendance longue sur laquelle cette variation se superpose est cohérente avec l'évolution parabolique des teneurs en bioxyde de carbone dans l'atmosphère (LIRE).

    Cette nouvelle approche de modèle qui consiste à introduire de façon plus objective les variations d'irradiance solaire constitue un perfectionnement évident aux approches actuelles de simulation.

    Il faut donc attendre le modèle qui va faire la synthèse entre ces travaux de Scafetta et le forçage radiatif qui n'a pas disparu et qui, au contraire, va prendre de plus en plus d'importance au cours du temps comme le montre la courbe noire. Si l'approche de Scafetta est correcte cela permet de prédire que le monde va bénéficier d'une fenêtre climatique acceptable jusqu'en 2030, à condition que la parabole sous-jacente ne s'emballe pas trop. Mais à partir de 2030 la phase de croissance va redémarrer de plus belle, il faudra alors que la parabole sous-jacente, reliée aux GHG, ne se soit pas trop exacerbée pour que les prédictions optimistes de Scafetta se réalisent… à peu près.

    En conclusion, ces travaux d'une grande intelligence, où l'on sent Scafetta se moquer de ses collègues de toute évidence moins brillants, allant même jusqu'à la provocation (voir le forecast 2 sur le dernier graphe !), ne sont pas du tout une alternative théorique aux modèles actuels. Ils constituent un perfectionnement important qui met le Soleil à sa place…en plein milieu du problème climatique. Place qu'il n'aurait jamais dû quitter. 

    LIRE le papier de synthèse de Scafetta qui résume l'essentiel de ses travaux.

    Le 13 Novembre 2009
     
     

      

  • Conseil de l’Europe: 2 tonnes de CO2 équivalents par an et par habitant de la planète en 2050

    Conseil de l’Europe: 2 tonnes de CO2 équivalents par an et par habitant de la planète en 2050

    Moulin-Dupré  Bonne réunion du Conseil de l'Europe du 21 Octobre en préparation aux âpres négociations du Sommet de Copenhague des 7 au 18 Décembre prochain. Partant de la donnée qui fixe que pour ne pas dépasser un réchauffement global de 2°C, il est nécessaire de réduire les émissions de GHG par deux, par rapport à la référence 1990, à l'horizon 2050, les bases de négociations ont été clairement définies lors de cette réunion du Conseil. On peut noter dans les conclusions les points forts suivants:

    – Les Nations développées devront avoir réduit, par rapport à la référence 1990, les émissions de GHG de 25% à 40% en 2020 et de 80% à 95% en 2050. De leur côté les pays en voie de développement devront infléchir leur prévision de croissance des émissions de 15 à 30% à l'horizon 2020.

    – En 2050 les émissions de GHG par habitant ne devront pas dépasser les 2 tonnes de CO2 équivalent. Ceci pour une population estimée à 9,5 milliards d'habitants conduit à des émissions totales de 19 milliards de tonnes equiv. CO2. Pour mémoire et pour le seul dioxyde de carbone, les émissions moyennes en 2008 ont été de 32/6.8 = 4,7 tonnes par habitant. Rajoutez dans les 20 à 30% pour les autres gaz et vous avez la référence 2008 qui doit se situer autour de 6 tonnes par habitant.

    -L'Europe peut s'engager sur un objectif de réduction des émissions de GHG de 30% en 2020 et de 80% à 95% en 2050 mais à la condition que les pays en voie de développement réduisent leurs prévisions d'au moins 30% à l'horizon 2020.

    -Les émissions des transports internationaux doivent être prises en compte de façon autonome, mais les réductions à l'horizon 2020 devront être d'au moins 10% pour le transport aéronautique et de 20% pour le transport maritime, par rapport à leur niveau de 2005.

    -Le "Carbon leakage" (fuites d'activités) d'industries énergie intensives devra être surveillé et faire l'objet d'accords internationaux.

    -Les HFC (hydro fluoro carbonse) devront être intégrés dans l'accord de Copenhague.

    -La déforestation des forêts tropicales devra avoir été réduite de 50% en 2020 et cesser en 2030 au plus tard.

    – Les bourses de cotations de droits d'émissions de carbone (Cap & Trade) devront être reliées entre elles dans les pays développés dés 2015 et étendues à certains pays en développement dés 2020.

     L'ensemble constitue une base solide de discussions, mais le succès ou l'insuccès de Copenhague ne se jouera pas sur les grands chiffres, mais sur les modalités des aides techniques et financières à apporter par les pays développés à ceux en développement comme la Chine, l'Inde ou le Brésil. Le Conseil a bien compris que pour être exigeant il fallait être devant et donner l'exemple. Peut-être verrons-nous un jour poindre une politique énergétique de l'Europe qui nous fait tant défaut et qui doit être à la base de la politique environnementale. De façon fort pertinente de Margerie, le patron de Total, vient de rappeler cette évidence aux dirigeants européens: il ne peut pas y avoir de politique environnementale sans réaliser de choix raisonnés dans le domaine énergétique. Les deux politiques, énergétique et environnementale, doivent être élaborées en cohérence. Et cela devrait être le grand boulot de la Commission Européenne à l'aide d'équipes compétentes (à trouver) qui dialogueraient et élaboreraient des Plans avec les Industriels et les Administrations pour les soumettre au Conseil.

    LIRE dans le détail ces conclusions.

    Le 23 Octobre

  • De moins en moins d’Américains croient en la réalité du réchauffement climatique

    De moins en moins d’Américains croient en la réalité du réchauffement climatique

     Un sondage réalisé au début du mois par l'institut de sondages Pew Research auprès de 1500 américains indique que le réchauffement climatique fait de moins en moins recette dans ce grand pays. Ils étaient il y a un an 71% à affirmer qu'il existe de solides évidences d'un réchauffement climatique, ils ne sont plus que 57% cette année à répondre positivement. Inversement ils étaient 21% il y a un an pour affirmer qu'il n'existe aucune évidence sérieuse, ils sont 33% cette année.

    Une analyse plus détaillée montre que la réponse est politiquement très clivée entre Démocrates et Républicains (FIG.) mais que les deux sensibilités politiques sont touchées par la décroissance des réponses positives à la question posée.

    Climat-Pew-2009-10

    La classe des 18-29 ans avec 64% des réponses positives, en baisse de 10 points par rapport à la réponse d'il y a un an, est à 7 points au dessus de la moyenne.

    Enfin, géographiquement on peut observer de nets clivages entre le Sud Atlantique des Etats-Unis régulièrement touché par les ouragans (66% de réponses positives) ou l'Ouest Pacifique qui connaît de longues périodes de sécheresses (65% de réponses positives) et le Midwest qui après un été pourri ne répond positivement qu'à 48% à la question.

    Une question plus complexe concernant la politique de "Cap & Trade" des émissions de CO2 aux Etats-Unis montre que 55% des américains n'en ont jamais entendu parler. La moitié des américains se déclarent favorables à la mise en place de règles de limitation des émissions de GHG. Ils sont majoritaires dans le Nord Est et le Sud Ouest des Etats-Unis et minoritaires ailleurs. Les personnes diplômées sont majoritairement (59%) favorables à de telles mesures.

    L'intérêt de ce sondage réside dans la mise en évidence de clivages profonds dans la perception du monde par la population américaine. Clivages en fonction de la sensibilité politique, de la région et de l'âge. Il ressort également que la mission de vulgarisation de ces problèmes par l'Administration en place, après la période obscurantiste précédente, est pour l'instant un échec. Est-elle peut-être trop occupée par les querelles et la recherche de compromis avec les élus du Congrès à Washington et pas assez par une opinion publique de toute évidence sous informée?

    LIRE les résultats détaillés de ce sondage

    Le 23 Octobre 2009

  • Les grandes questions que vont devoir aborder les délégués du GIEC à Bali

    Les grandes questions que vont devoir aborder les délégués du GIEC à Bali

     Du 26 au 29 Octobre à Bali va se tenir la 31ème Session Pléniaire de l'IPCC (Intergovernmental Panel on Climate Change), plus connu en Français sous le doux acronyme de GIEC. Ce Groupe d'experts va devoir tout d'abord revoir les chiffres d'émissions gaz à effets de serres (GHG) et plus particulièrement ceux de dioxyde de carbone qu'il manipule. Il serait même indispensable qu'il se projette vers 2014 ou 2016 pour élaborer ses données compte tenu de l'inertie des décisions et des actions dans le domaine énergétique. Les centrales au charbon indiennes ou chinoises en cours de construction émettront inéluctablement leur gaz carbonique dans deux ou trois ans. Alors ces experts peuvent tabler sur des émissions qui atteindront les 36 milliards de tonnes de gaz vers 2014, malgré un certain infléchissement du rythme de progression en raison de la crise économique en 2009 (FIG.). 

    CO2-1980-2016

     Traditionnellement ces experts ajoutent à ces émissions anthropiques identifiées avec une bonne précision, une émission "forfaitaire" de 5,5 milliards de tonnes de CO2 (1,5 milliards de tonnes de Carbone) due à aux changements dans l'utilisation des sols (LUC ou Land Utilisation Change) qui englobe en particulier les déforestation des grandes forêts équatoriales. Sans vouloir minimiser la gravité de ces destructions et des émissions liées qu'il faut réduire de toute évidence, leur part dans les émissions globales de CO2 admises par tous comme représentant 20% des émissions, n'en représenteront plus que 13% en 2014. En comparaison, les émissions de CO2  dues à la combustion de lignite et de charbon représentaient, avec 12 milliards de tonnes, 40% des émissions totales en 2006 (EIA). Elles devraient tendre vers 50% des émissions dans les années à venir. Le GIEC ne peut pas ne pas pousser un grand coup de gueule contre la combustion croissante de charbon et de lignite dans le monde. Cette croissance doit cesser! Les publications de l'UNEP qui veulent faire croire que le réchauffement planétaire pourrait être maîtrisé par un meilleur aménagement des espaces verts et des rivages mondiaux est à la limite de l'escroquerie. En fait, d'oublier 87% du problème lui évite de s'affronter aux Nations industrielles récalcitrantes qui sont aussi les employeurs de l'UNEP.

     Le deuxième problème de fond repose sur la répartition des émissions de CO2 anthropiques entre ciel, terre et mer. Jusque là, la fraction se retrouvant dans l'atmosphère ou "airborne fraction" est réputée croître lentement au cours du temps. Il existerait une boucle positive entre la fraction de répartition du CO2 dans l'atmosphère et le réchauffement de la planète. Il est possible d'invoquer de nombreuses raisons (réchauffement des océans absorbant moins de gaz, automnes plus chauds provoquant des émissions de CO2 plus importantes par les forêts, etc.). Mais cette tendance longue qui exacerberait l'effet des émissions de gaz carbonique, ne semble pas s'appliquer depuis 2003, comme cela a été chiffré ici de façon très simple en comparant les accélérations des émissions de dioxyde de carbone et celles d'apparition dans l'atmosphère (LIRE). Or cette inversion, mettant en évidence une boucle de régulation négative, correspond à la forte croissance des émissions de dioxyde de carbone chinoises. N'y a-t-il pas là la preuve d'un effet inverse à celui attendu? La compréhension de ce phénomène me semble essentielle. Plusieurs hypothèses prenant en compte la pression partielle de CO2 et la fonte de la banquise dans une zone de puits de gaz carbonique, qui accroîtraient la vitesse et la surface de dissolution de ce gaz dans l'océan, devraient être étudiées. Les travaux de Takahashi et Col. dans le domaine, qui reposent sur trois millions de mesures de teneurs en CO2 dans les eaux de surface maritimes, réalisés depuis 1970, montrent clairement que cette zone de l'Atlantique Nord, autour du Groenland, est de toute première importance pour assurer la dissolution du gaz carbonique de l'hémisphère nord dans les océans (FIG.II, zone bleue et parme en haut à droite).

    FIG.II Vitesses d'apparition et de disparition du CO2 dans les océans d'après Takahashi et Col.

    Les zones parme correspondent aux puits de dioxyde de carbone qui peuvent absorber jusqu'à 400 tonnes de CO2 par km2 et par an. Des variations moyenne de la surface de la banquise de l'ordre du million de km2 peuvent donc expliquer un accroissement de l'absorption de 400 millions de tonnes de gaz annuellement. La surface de la banquise au mois de Septembre, représentait dans les 7 millions de km2 en 1990. Elle est descendue à moins de 5 millions de km2 en 2007. Cette différence peut expliquer une plus forte décroissance de la concentration en CO2 durant la saison d'été dans l'hémisphère nord.

    Takahashi-CO2-sinks-2009 

     La réunion plénière de l'IPCC de la semaine prochaine sera d'une grande importance en raison de sa proximité avec la réunion sur le climat de Copenhague du mois de Décembre. Il y a là une occasion de passer quelques messages sobres mais bien sentis, à la Communauté Internationale, avec cependant une condition nécessaire: bien les hiérarchiser.
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    Le 19 Octobre 2009