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  • Et si les consommations de pétrole au sein des pays OCDE reprenaient leur repli amorcé il y a cinq ans

    Et si les consommations de pétrole au sein des pays OCDE reprenaient leur repli amorcé il y a cinq ans

     Si en 2006 un respectable prévisionniste avait annoncé que les consommations de pétrole des pays de l'OCDE, les plus développés alors, étaient en train de connaître leur maximum et que dans les années à venir malgré une progression du PIB, ces consommations allaient décroître, il est probable qu'il aurait provoqué bien des remarques. Rappelons qu'en 2007 dans son Medium Term Oil Market Report, l'Agence Internationale de l'Énergie prévoyait, sur la base d'une progression des PIB, une croissance annuelle des consommations au sein de l'OCDE de 0,5 million de barils/jour. Elles devaient passer selon cette officine de 49,6 à 52,1 millions de barils/jour entre 2007 et 2012 et auxquelles s'ajoutaient les valeurs à croissance encore plus vive des consommations des pays NON-OCDE. Bien entendu ces prévisions avaient participé à la création du climat favorable à l'envol des cours pétroliers dès l'année suivante.

    OCDE-conso-pétrole
     Un examen a posteriori de ces consommations (FIG.) montre qu'entre 2006 et 2010 ces consommations sont passées de 50 à 46 millions de barils/jour et qu'elles sont bien loin des prévisions de 2007. Décroissance de 8% observée malgré un PIB chaîné qui s'est accru entre-temps de deux points (base 100 en 2000). Entre les deux il y a eu l'envolée des cours, la crise financière et la crise économique.

     Ce résultat montre que les modèles de prévision des consommations en produits pétroliers basés sur la croissance des PIB sont sûrement toujours valides pour les pays NON-OCDE qui sont en phase de développement et d'équipement, mais ils ne s'appliquent plus aux pays vieillissants et largement urbanisés de l'OCDE. L'accroissement d'activité agit toujours sur la consommation de pétrole, nous l'avons vu en 2010, mais bien d'autres paramètres tendent à améliorer l'efficacité énergétique des processus où à substituer d'autres ressources énergétiques au pétrole. Ils agissent négativement sur ces consommations.

     Dans cette compétition entre croissance économique et réduction-substitution des consommations il existe un régulateur très puissant: le prix du baril de pétrole. On l'a vu monter en puissance en 2006 et 2007 mais surtout durant la première moitié de 2008. Par la suite les diverses crises sont venues se superposer à ce phénomène en laissant derrière elles une baisse irréversible des consommations OCDE de 4 millions de barils/jour. Cette baisse peut s'expliquer par un certain transfert des activités consommatrices vers les pays NON-OCDE, mais surtout par la disparition d'activités non rentables.

    Les diverses officines prévoient pour 2011 et 2012 une croissance des consommations de pétrole dans le monde accompagnées d'une stagnation des consommations des pays OCDE à 46 millions de barils/jour pour l'EIA américaine et pour l'IEA à Paris (FIG., points pour 2010,2011 et 2012). Or les évènements dans le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord (MENA) nous indiquent que les cours du brut relancés par les liquidités financières mondiales et par le climat politique chez certains pays producteurs, vont rester durablement élevés. Une croissance au-delà des 140 dollars le baril peut être raisonnablement anticipée à ce jour.

    Il devient alors fort probable que sous la stimulation des prix du brut, les pays OCDE vont accélérer les actions de réductions des consommations et  les mesures de substitutions de pétrole. Ces multiples actions porteront sur l'arrêt progressif des consommation de pétrole dans la génération électrique et le chauffage, sur l'achat de véhicules automobiles plus sobres (légers, hybrides, diesel, gaz naturel comprimé, etc.), la baisse du trajet moyen des véhicules, l'optimisation de la logistique dans les transports, etc.

    Compte tenu des tendances observées entre 2006 et 2008 il est possible d'espérer une baisse annuelle des consommations de pétrole dans l'OCDE de l'ordre de 0,5 million de barils/jour. On peut alors pronostiquer une consommation OCDE de pétrole et biocarburants aux environs de 45 millions de barils/jour à fin 2012 avec une contribution des biocarburants autour de 1,4 million de barils/jour.

  • Les cours de l’essence aux Etats-Unis rappellent des temps d’avant débâcle

    Les cours de l’essence aux Etats-Unis rappellent des temps d’avant débâcle

     Faute, sur le NYMEX, de pouvoir jouer sur les cours d'un WTI englué dans ses stocks  et présentant une décote de 15$/baril par rapport au Brent coté à Londres, la spéculation s'est subitement reportée cette semaine sur les cours de l'essence à New York. Depuis le début du mois de Février les cours de l'essence américaine étaient logiquement adossés à ceux du Brent, les voila qui prennent les devants, anticipant une future hausse du pétrole et affichant une marge de raffinage de 26$/baril (FIG.I, courbe rouge). Le gallon de gasoline à plus de 3$ sur le NYMEX cela veut dire un cours moyen de l'essence à la pompe à 3.6 ou 3.7 dollars le gallon (pas loin d'un dollar le litre) pour la semaine prochaine.

    Spread-BRENT-WTI

    C'est un grand pas vers les 4 dollars le gallon qui avaient au printemps 2008, il y a seulement trois ans, fortement perturbé l'économie américaine. Parmi les indicateurs les plus pertinents il faudra suivre l'évolution du trafic routier américain qui avait baissé de 2,5% en 2008 ainsi que la proportion des ventes de 4X4 aux Etats-Unis qui sont liées aux prix de l'essence à la pompe (FIG.II). Au printemps 2008 la proportion de 4X4 dans les ventes mensuelles étaient tombée à 42% (courbe rouge). Au mois de Février les small trucks ont représenté 51% des ventes unitaires de véhicules.

      Ventes-4X4-USA

     Une minute ou deux de réflexion basée sur le fait qu'un mouvement spéculatif d'ampleur s'appuie toujours sur des liquidités et une certitude partagée par tous, permet d'avancer que la "certitude" d'une déstabilisation les unes après les autres, des Principautés du Moyen-Orient va remplacer avantageusement la "certitude" du peak-oil de 2008. Cela signifie que la montée des cours du brut et des produits dérivés n'en est qu'à ses débuts. Les économies mondiales s'étant durant la crise précédente "désensibilisées" partiellement aux cours du pétrole, il est possible de raisonnablement prévoir, au gré des révolutions de palais dans la zone MENA, des cours à venir sur le pétrole européen qui dépasseront allègrement les 140$/baril de l'été 2008.

    Le 2 Mars 2011

  • Panasonic annonce la deuxième génération de sa pile à combustible domestique Ene-Farm

    Panasonic annonce la deuxième génération de sa pile à combustible domestique Ene-Farm

    Panasonic-Ene-Farm-FuelCell  Panasonic et Tokyo Gas ont ensemble développé depuis 1999 puis commercialisé à partir de 2009 un système de co-génération reposant sur une pile à combustible. Cet équipement intégré, appelé Ene-Farm ("ferme énergétique"), alimenté au gaz naturel, repose sur la production par reforming et la purification d'hydrogène alimentant une pile à combustible qui fournit à la fois de l'électricité et de l'eau chaude. L'ensemble fournit l'eau chaude au foyer et, après conversion, fournit en parallèle avec le réseau local de l'électricité domestique. Après avoir vendu 5000 exemplaires de cet ensemble, Panasonic annonce une nouvelle génération de cet équipement plus compacte, moins onéreuse, à durée de vie améliorée (10 ans) et à rendement électrique amélioré. L'ensemble est proposé à 2,76 millions de yens (24 500 euros) pose non comprise. On est encore dans l'écologie haut de gamme mettant en œuvre des équipements d'une très grande complexité. Malgré tout, Panasonic se prépare à pouvoir en produire plus de 6000 exemplaires par an.

    Pour porter un jugement à peu près pertinent sur ce type d'équipement il faut savoir qu'une pile à combustible initialement conçue pour fournir de l'électricité est majoritairement une source de chaleur en raison de son médiocre rendement. Le lecteur se reportera à un excellent article paru sur ce Blog pour en comprendre les raisons thermodynamiques et électrochimiques. Il en résulte que ce genre de PAC est d'abord une machine à fournir de l'eau chaude très appréciée pour les bains japonais collectifs. Si cette eau chaude n'est pas utilisée le système s'interrompt et l'électricité du foyer est fournie par le réseau.

    LIRE le communiqué de Panasonic et les détails des caractéristiques de l'ensemble.

    Le 28 Février 2011

     

  • First Solar un exemple décomplexé de l’industrie des modules photovoltaïques

    First Solar un exemple décomplexé de l’industrie des modules photovoltaïques

     First Solar est le plus grand producteur américain de modules photovoltaïques et le premier producteur mondial de ces modules en technologie couche mince (Cd-Te). Il fait partie du TOP 5 mondial dans la profession avec trois chinois (JA Solar, Suntech et Yingli) et un japonais (Sharp). Cette industrie de composant repose sur un certain nombre de caractéristiques bien particulières:

    – Elle dépend de subventions d'États ou de tarifs spéciaux d'achat de l'électricité produite,

    -Elle met en œuvre des technologies très diverses, loin d'être figées, c'est une industrie jeune et innovante,

    -En raison des deux premières caractéristiques elle comprend encore de multiples acteurs, une centaine ou plus,…dont au mieux un sur cinq survivra encore dans une grosse décennie.

    Mais comme toute industrie de composant, pour survivre il faut être parmi les plus gros (Tier One) ce qui implique d'investir massivement dans la technologie, la capacité de production des usines et les gains de productivité. Les trois axes de progrès sont liés au travers de courbes d'expérience.

    L'exemple de First Solar illustre cette stratégie. Il dispose d'une technologie en couche mince qu'il maîtrise bien et dont il essaie d'améliorer les performances de façon continue. Il a atteint par exemple un taux de conversion de 11,6% au quatrième trimestre 2010. C'est le point faible de la technologie qu'il compense par les coûts.

    Les investissements en capacité de production reposent sur deux axes: l'amélioration des cadences des lignes qui sont passées de 25MW/an à 62,6 MW/an en cinq ans et la création de nouveaux sites de production (FIG.I)

    FirstSolar-capacité-2005-2012

     En 2010 First Solar disposait de 24 lignes de production dans le monde, à fin 2011 il en fera produire 36 et à fin 2012 il devrait pouvoir disposer de 10 lignes de production supplémentaires dont 4 aux USA, 4 au Vietnam et peut-être deux en France si EDF EN maintient ses projets d'investissements en Gironde malgré la toute récente limitation globale gouvernementale des installations photovoltaïques à 500 MW par an. Par la répartition des investissements entre pays à faible taux de main d'œuvre (Malaisie, Vietnam) et pays développés (Allemagne, États-Unis) First Solar essaie de ménager un mix politico-industriel optimal.

     Les volumes de production en croissance permettent d'atteindre un coût industriel des modules ramené au Watt de 75 cents à fin 2010, venant de 84 cents à fin 2009, pour une production cumulée de plus de 3 GW. Cette progression (FIG.II) se traduit par une courbe d'expérience entre le log du coût et la production cumulée typique des industries de composants.

    FirstSolar trimestriels

     Le succès économique de First Solar est donc lié à cette politique agressive d'investissements soutenus et de développement. Il est aussi lié au fait que ce Groupe s'est intégré vers l'aval en devenant promoteur de fermes photovoltaïques dans le monde et plus particulièrement en Amérique du Nord. Cette double casquette de donneur d'ordre et de fournisseur lui permet de saturer ses usines et de maintenir ainsi ses prix de ventes, malgrè une concurrence chinoise très agressive.

     Le seul point faible repose sur une technologie limitée en taux de conversion qui va plafonner vers les 12%. Les technologies en couches minces de types CIGS qui pourront atteindre des rendements proches de ceux du Silicium cristallin, seront probablement un jour ses concurrentes les plus dangereuses.

    CONSULTER la présentation du T4 2010 de First Solar.

    Le 27 Février 2011

  • Quelques évidences pour essayer d’infléchir la politique énergétique de la France

    Quelques évidences pour essayer d’infléchir la politique énergétique de la France

    Parler de politique énergétique de l’Europe c’est hurler au milieu du désert, c’est se heurter à l’incompétence profonde de ceux qui gèrent les institutions européennes, faute de structures dédiées à la collection des données, à la compréhension des grandes tendances et à la réflexion pour imaginer le futur. Devant ces profondes carences institutionnelles européennes il est nécessaire de réduire le champ de réflexion au seul domaine de la France qui pourrait servir de modèle. Alors quelles sont les évidences qui doivent servir de base à l’élaboration d’une telle politique énergétique?

    1- Il faut accélérer la réduction de la consommation en produits pétroliers de notre pays:

    La facture de la France en 2010 s’est élevée à 9,5 milliards pour les produits raffinés et à 26,6 milliards pour le pétrole brut (LIRE). Elle sera à coup sûr bien supérieure en 2011 (prévoir entre 30 à 50% d’augmentation semble à ce jour réaliste). Les opérateurs du Marché du pétrole et produits dérivés ont compris qu’un dirigeant allumé libyen, responsable d’une production marginale au niveau mondial, pouvait subitement faire flamber les cours. Tous ces évènements récents vont conduire durablement à des cours pétroliers d’une très grande variabilité avec une tendance longue à la hausse, processus démarré depuis 2004 où le baril valait 40 dollars.

    France-conso-fioul-gasoil

    Il va donc falloir très rapidement arrêter de brûler du fioul dans les chaudières domestiques ou industrielles de notre pays. Avec 13,6 millions de tonnes, la consommation de fioul domestique en 2009 a représenté près de 17% des 80,9 millions de tonnes de produits pétroliers consommés en France (FIG.). Alors arrêtons les primes à la cuve et autres mesures débiles. Il est et il va devenir de plus en plus abscon d’un point de vue économique de brûler du pétrole pour se chauffer. Comment accélérer la transition vers un chauffage sans pétrole dans notre pays vers la biomasse, le gaz naturel ou l’électricité intelligente sous forme de pompe à chaleur? Tel devrait être un des problèmes de nos dirigeants.

    Une autre voie est de développer l’utilisation des biocarburants soit en les produisant sur place (la jachère européenne obligatoire n’a plus cours depuis 2009) soit en les important. Mieux vaut alimenter nos véhicules en éthanol brésilien ou américain qu’en essence issue de pétrole moyen-oriental. Le passage au E15 (essence à 15% d’éthanol) ferait économiser 10% de la consommation d’essence du Super 95 qui a représenté 6,5 millions de tonnes de consommations en 2009. Le biodiesel et le biokérosène provenant de corps gras aujourd’hui, de sucre (Amyris) et autres biomasses demain doivent être également encouragés. Le débat surréaliste sur les « Land Use Change » induites par le déplacement des cultures et la réduction des émissions de CO2 par les biocarburants est sans aucun intérêt. Les biocarburants sont des ersatz de produits pétroliers et sont de ce fait très utiles. Demain ils deviendront indispensables.

    Bien sûr dans les transports routiers il faut encourager la transition vers les véhicules hybrides (VL et PL) en réduisant règlementairement les délais nécessaires aux constructeurs pour atteindre de plus faibles émissions moyennes de CO2. Les émissions de CO2 de la France dans les transports n’ont que bien peu d’effet sur le climat de notre planète mais elles auront un effet de plus en plus destructeur sur la facture pétrolière. Réduire les émissions de CO2 c’est maîtriser notre facture pétrolière, impôt payé pour les Princes arabes. Il ne faut plus parler tonnes de CO2 (d’ailleurs qui sait peser le CO2) mais milliers d’euros dépensés. Allez, je vais vous donner la clé: lorsque vous achèterez du gasoil à 1,5 euro le litre à la pompe, du pot d’échappement de votre voiture s’échappera du CO2 qui vous reviendra à 563 euros la tonne (LIRE) ce qui rend bien insignifiante la défunte taxe carbone qui devait s’élever à 30 euros la tonne.

    Le Groupe Peugeot-Citroën améliore sa solution micro-hybride avec la deuxième génération qui consiste à coupler à une traction diesel un alterno-démarreur (Valeo) alimenté par deux supercapacités 2,7V; 1200F (Maxwell) et d’un booster électronique (Continental) montés en parallèle sur une batterie au plomb de 70Ah. Après tout pourquoi pas s’il réduit les consommations de gasoil de ses voitures de 10 à 15% en cycle urbain. Mais il faudra que ce Groupe accède également aux solutions full-hybrides, rechargeables ou non, avec batterie au Lithium pour voir réellement baisser les consommations de ses véhicules les plus prestigieux dans un premier temps. Les constructeurs allemands ne sont guère mieux lotis avec un considérable retard par rapport à Toyota et Honda sur l’hybridation. Mais la volonté de réussir et de rattraper le retard de plus d’une décennie est évidente.

    Rouler dans une voiture hybride diesel ou alimentée par de l’essence E15 est la solution pour faire encore baisser les consommations moyennes en produits pétroliers des véhicules vendus en France.

    La réduction de masse de ces véhicules doit faire l’objet de grands développements impliquant les producteurs de matériaux composites. Les marques allemandes de prestige (BMW, Mercedes), larguées sur ce point, ont affiché leur volonté de progresser en s’alliant avec les grands industriels des matériaux composites américains et japonais (LIRE).

    La voiture électrique promue par Nissan-Renault participera au rythme des capacités de production des batteries dans le monde, à cet effort de réduction des consommations. Peugeot allié à Mitsubishi Motors devrait également tirer son épingle du jeu dans le domaine. Les constructeurs français plutôt largués au départ avec des véhicules électriques hideux d’un autre âge, ont finalement bien réagi pour aborder la future transition électrique dans de bonnes conditions.

    2- la France doit participer à la promotion d’un marché libre mondial du gaz naturel et favoriser l’utilisation de cette ressource abondante:

    Les marchés de gaz naturel étalés sur plusieurs décennies négociés avec des clauses d’indexation des cours sur ceux du pétrole doivent être interrompus. La soi-disant sécurité d’approvisionnement que ces contrats confèreraient à notre pays doit être remise en cause. La meilleure des sécurités consisterait plutôt à disposer de nombreux fournisseurs dans le monde. La facture pour la France en 2010 s’est élevée à 11,3 milliards d’euros en augmentation de 8% alors que les cours mondiaux du gaz avaient baissé. Il y a du gaz naturel partout dans le monde sous forme de ressources classiques onshore ou offshore, sous formes de gaz de houille (coal bed methane ou grisou), de tight gas (gaz dans des matériaux peu poreux) ou de gaz de schistes. Dans un siècle ou deux ce seront les hydrates de méthane qui seront exploités. La liquéfaction de ces gaz et leur transport par méthaniers en fait une matière première énergétique mondiale de premier plan qui peut être livrée dans n’importe quel port pour peu qu’il soit aménagé pour les accueillir (la regazéification pouvant être réalisée à terre ou à bord de certains bateaux les plus modernes). Le gaz naturel est la forme d’énergie primaire du siècle en raison de son prix abordable, de sa large disponibilité et de sa combustion peu polluante dans des turbines à très hautes températures.

    La France avec sa large façade maritime se doit donc d’équiper un nombre suffisant de ports pour pouvoir acheter des chargements de gaz naturel sur le Marché libre. En parallèle elle doit se désengager rapidement de contrats d’approvisionnement à long terme indexés aujourd’hui dépassés. L’abandon du projet de port méthanier du Verdon en Gironde, dans le but naïf de faire plaisir au josébovéisme à l’approche d’élections, a été une grande bêtise économique de ceux qui nous dirigent.

    Remplacer une partie du fuel domestique consommé aujourd’hui par du gaz naturel tel doit être l’objectif. La construction d’une douzaine de centrales électriques au gaz naturel à cycle combiné permettrait également de moins importer de puissance électrique en pointe en provenance de chez nos voisins européens. Le solde des échanges positif d’un milliard d’euros enregistré en 2010 pourrait être multiplié par deux ou trois et participer ainsi à la croissance du PIB de notre pays.

    Les poids lourds équipés d’une double source embarquée de gasoil et de gaz naturel (voir Volvo Trucks) peuvent constituer une première alternative de réduction des consommations de produits pétroliers. En ville des bus hybrides alimentés au gaz naturel comprimé constituent une solution élégante (voir Hyundai).

    Plus tard, lorsque l’Allemagne, les Pays-Bas, la Pologne auront démontré qu’on peut extraire des gaz de schistes du sous-sol sans danger majeur pour l’environnement, alors notre pays gaulois pourra s’assoir sur ses préjugés et tenter d’en découvrir dans son sous-sol. Le ciel ne lui tombera pas sur la tête. Au préalable il faudra modifier la loi pour que les paysans français puissent toucher des royalties sur les gaz extraits, seule solution pour contrer le précautionnisme ambiant.

    3-La France doit moderniser et actualiser ses solutions électronucléaires:

    Après le développement et l’industrialisation pénible et mal emmanchée de son nouveau générateur franco-allemand EPR, la France se doit de développer des modèles moins « lourds » de générateurs électronucléaires. Le développement commun du générateur 1000 MW ATMEA entre Mitsubishi Heavy (MHI) et AREVA est une formidable opportunité pour enrichir la gamme et surtout pour obtenir une estampille asiatique, zone du monde où seront implantés 90% des réacteurs du futur. Il ne faut pas être grand clerc pour découvrir que le futur du nucléaire mondial sera japonais (Toshiba, Hitachi, MHI), coréen (Hyundai, Samsung) et chinois. Dans un tel contexte le concept « d’équipe de France du nucléaire » ressort de la plaisanterie de peuplades rustiques et attardées de tout à fait en haut et à gauche de la Carte du Monde du XXIème siècle (FIG.).

    Pacific-rim

    Il aura fallu à ceux qui nous dirigent plusieurs années pour comprendre l’importance de cette diversification (voir MHI). Espérons que MHI ne sera pas découragé par tant d’hésitations.

    4-et présenter une grande sélectivité dans les Energies renouvelables:

    Jeter l’argent du contribuable ou taxer le client d’EDF, ce qui est la même chose, par les fenêtres fussent-elles écologiques n’est pas pertinent. Les énergies renouvelables avec la montées des prix des énergies primaires trouveront toutes un jour leur break-even. En attendant les subventions massives attribuées à ces ressources faussent le marché et créent des rentes de situation qui n’ouvrent que bien peu de perspectives à long terme.

    Pour les biocarburants de première génération issus du sucre ou du maïs ils ont presque atteint ce break-even, à condition que les cours des denrées de base reviennent à des niveaux raisonnables. L’utilisation de procédés mixtes utilisant une partie des tiges et des feuilles de maïs (Poet) devrait faire assez rapidement atteindre à ces procédés leur seuil de rentabilité sans aucune subvention. Les productions américaines sont à la pointe sur ces procédés et il faut s’en inspirer. Une opportunité pour ces produits: le biokérosène qui sera la seule voie efficace pour le transport aérien de respecter ses objectifs de réduction d’émissions de CO2. Les Compagnies aériennes seront prêtes à payer plus cher leur carburant pourvu qu’il ait l’estampille « bio ».

    Pour l’éolien, la faible puissance surfacique du procédé impose en Europe de déplacer la ressource en mer. L’accroissement des puissances des turbines vers les 6 MW puis vers les 10MW devrait permettre d’aller friser des prix de revient du MWh raisonnables à condition de ne pas trop s’éloigner des côtes, en raison des prix dissuasifs des lignes HVDC acheminant le courant. Ces lignes peuvent être amorties par l’achemineur ou le distributeur de courant et non par l’exploitant des éoliennes. Séparer la production d’électricité de l’acheminement et de la distribution de courant électrique apportera de la souplesse aux financements de ces ressources. Il n’est donc pas urgent de développer d’immenses projets offshore en France. Il faut donner les moyens de R & D aux acteurs locaux (AREVA-MULTIBRID et Alstom) de mener à bien les développements de leurs futures éoliennes de plus de 6MW, mais il n’est pas évident que Siemens leur laissera le temps nécessaire pour faire tranquillement leurs développements industriels. Ils risquent de n’être que de piètres « nice followers » toujours en retard d’une génération.

    Pour le photovoltaïque il est nécessaire de définir un cahier des charges d’un module de faible coût et de très forte puissance qui permettrait de réduire les coûts d’implantation des modules (LIRE). Un objectif « tout compris raccordé au réseau » d’un euro par watt semble raisonnable. Les techniques CIGS sont susceptibles de permettre d’atteindre cet objectif avec des productions automatisées. En France c’est Saint-Gobain qui tient la corde avec sa filiale allemande Avancis et son alliance coréenne. Là aussi, il faut aider ce Groupe en R & D pour qu’il puisse développer des modules de très forte puissance (>240W) mais il n’est pas urgent de recouvrir notre pays de modules photovoltaïques hors de prix. La France a importé en 2010 pour plus d’un milliard de ces modules.

    Remarque: devant les progrès du photovoltaïque, le solaire thermique ne semble présenter qu’un intérêt marginal. Il pourrait éventuellement être couplé à des centrales au gaz naturel par exemple.

    Consulter les consommations annuelles françaises de produits pétroliers INSEE

    Le 25 Février 2011

  • La réduction photo-biochimique directe du CO2 en alcanes serait une voie prometteuse de synthèse des futurs biocarburants

    La réduction photo-biochimique directe du CO2 en alcanes serait une voie prometteuse de synthèse des futurs biocarburants

    L'utilisation de la photosynthèse biologique pour produire des biocarburants gazeux ou liquides à partir de CO2 fait l'objet de nombreuses recherches théoriques et pratiques. Il est possible aujourd'hui de distinguer deux voies importantes:

    Direct conversion

    – l'une consiste à faire croître dans un bouillon de culture des espèces de types diatomées ou algues bleues qui vont être partiellement composées de triglycérides (FIG., schéma du bas). Après récolte de ces micro-organismes, extraction et transformation du corps gras il est possible de disposer de biocarburant. Parmi les plus actifs les universitaires australiens Borowitzka et Lewis viennent d'établir une Société financée par Rio Tinto: Muradel dont l'objectif est de concrétiser industriellement un procédé qui est en cours de mise au point sur leur pilote de photosynthèse de Karratha (LIRE). Borowitzka annonce qu'il sait faire par cette voie du carburant à 3$ le litre et que son objectif industriel est de descendre à un dollar (LIRE).

    -l'autre voie repose sur la conversion directe du CO2 en alcanes à l'aide de cyanobactéries génétiquement modifiées (FIG., schéma supérieur). Cette voie dont le leader semble être la Société américaine Joule présente l'intérêt de conduire directement au carburant désiré qui serait séparé par simple décantation du bouillon de culture. Le Pr Hess de l'Iniversité Alberts Ludwig de Freibourg a initié en 2010 un programme d'étude européen portant sur la synthèse de propane par cette voie. En Californie des équipes travaillent également sur la synthèse d'isobutanol.

    Rendements conversion directe

     D'après des études papier récentes de Joule il apparaît que cette voie de conversion directe qui se dispense de développer et de récolter les algues présenterait un bilan énergétique largement supérieur à celui de la première. Les auteurs annoncent un rendement énergétique de conversion théorique de 12% (FIG.II, diagramme de droite) et pratique de 7,2% (diagramme central). Ces valeurs sont à comparer aux rendement énergétique de 1,5% estimé pour la voie photochimique classique indirecte de récolte de biomasse (diagramme de gauche).

     Ce travail théorique semble convaincant et bien étayé mais il serait encore plus probant de disposer des résultats pratiques d'un pilote industriel qui analyseraient les productions de biodiesel sur une période significative de fonctionnement. Il ne semble pas que de telles données qui nécessitent un formidable travail de définition de la bactérie qui conduira à un alcane bien défini, et des conditions opératoires, soient encore disponibles.

    CONSULTER ce travail théorique et le site de JOULE.

    Le 20 Février 2011

     

  • Les cours de l’essence à New York indexés à ceux du Brent à Londres

    Les cours de l’essence à New York indexés à ceux du Brent à Londres

     Le Marché des transactions sur le pétrole traverse une révolution copernicienne: la spéculation s'est déplacée du NYMEX à New York vers l'ICE à Londres. Le mouvement semble avoir atteint une ampleur telle qu'elle lui confère un caractère probablement durable. Le WTI américain n'est plus le benchmark mondial, il a perdu sa place au profit du Brent européen qui profite de sa fluidité et de la reprise des consommations européennes. A la base, la faute aux stocks pléthoriques vendus à terme sur le site de Cushing, Oklahoma, sur un marché américain en contango mais largement alimenté par les oléoducs canadiens.

    Marge raffinage et spread

     Devant cette conjonction des Marchés, jamais rencontrée jusque-là, il était possible d'imaginer un cas extrême pour lequel l'essence sur la Côte Est des Etats-Unis ou dans le Golfe du Mexique, deviendrait subitement moins chère que le pétrole brut en Europe. Imaginez les pompes américaines à sec pour cause d'exportation sauvage.

     Mais non les acteurs de marché ont vu la faille et depuis deux semaines les cours de l'essence américaine (FIG., courbe rouge en référence au WTI) se sont indexés sur ceux du pétrole à Londres (courbe bleue par rapport au même WTI). Formidable opportunité pour les raffineurs américains qui achètent localement leur brut bradé et revendent sur place l'essence aux cours européens avec une marge dépassant les 20 "bugs" par baril. Unbelievable!

    Le 19 Février 2011

  • La demande mondiale en céréales devrait s’accroître de 20% d’ici à 2020

    La demande mondiale en céréales devrait s’accroître de 20% d’ici à 2020

     C'est le Ministre japonais de l'Agriculture japonais, repris par le Nikkei, qui l'affirme: la demande mondiale en céréales dans le monde pour assurer l'alimentation humaine et animale mais aussi pour produire certains biocarburants, devrait croitre de 20% d'ici à 2020. Compte tenu de l'accroissement du niveau de vie moyen en Asie cette prévision apparaît comme tout à fait crédible. En appliquant cette prévision de croissance aux données de la FAO il est possible d'en déduire que la production mondiale de céréales qui est de 2,5 milliards de tonnes devrait atteindre 3 milliards de tonnes en 2020 (FIG.I, courbe noire).

      Céréales FAO
      La question est la suivante: le monde agricole mondial stimulé par la montée des cours observée en 2010 et 2011, sera-t-il capable de répondre à cette demande prévisible? Pour le Ministre japonais il apparaît que la demande va croître plus vite que l'offre, entraînant ainsi une poursuite durable des hausses des cours de ces produits.

     Pourtant, en se référant aux chiffres publiés par la FAO, il apparaît que la production mondiale de céréales s'est accrue de 0,4 milliard de tonnes au cours des dix dernières années (courbe noire) poussée par la croissance continue des rendements (courbe bleue) et de la reprise des surfaces cultivées qui étaient tombées au plus bas à 6,6 millions de km2 en 2002 (courbe rouge).

    Céréales FAO monde-france

     Le premier paramètre est l'évolution des rendements annuels moyens mondiaux. Ils évoluent depuis 50 ans de façon parfaitement linéaire. Ils ont été multipliés par plus de deux en 40 ans (1969-2009) pour dépasser 3,5 tonnes/hectare en 2008 et 2009 (FIG.II, courbe rouge), valeurs observées en France 40 ans en arrière (courbe noire).

     La comparaison de ces deux courbes montre qu'il n'y a pas de raison pour que les rendements céréaliers annuels moyens mondiaux ne poursuivent pas leur progression pour atteindre les 4 tonnes à l'hectare en 2020 soit une progression de 12 à 14% par rapport à aujourd'hui. L'amélioration des connaissances cumulées des paysans, la sélection de nouveaux hybrides plus résistants aux diverses maladies et moins sensibles à la sècheresse constituent les processus principaux par lesquels les rendements poursuivent leur progression régulière (Voir l'exemple du maïs américain). Il faut noter la faible variabilité de ces rendements mondiaux de part et d'autre de la droite de corrélation de la courbe rouge, ceci montre l'amortissement des aléas régionaux, comme celui de l'année 2003 pour la France, par les grands nombres mondiaux.

     Pour ce qui est des surfaces qui devraient être portées vers les 7,5 millions de km2 en dix ans, ce ne sont pas les terres arables dans le monde qui font défaut (évaluées pour les plus adaptées à 3,2 millions de km2 par certaines études récentes ) mais ce sont les investissements financiers et humains dans les nouvelles cultures qui sont rares. Les États-Unis disposent encore de larges surfaces exploitables, l'Amérique du Sud est en plein développement, on attend toujours le démarrage de l'Afrique qui fait l'objet de nombreuses convoitises extérieures, les pays de l'Europe de l'Est ne sont encore pas mis en valeur de façon optimale. Quand à l'Europe de la PAC, l'arrêt du gel obligatoire de terres arables sous forme de jachères ne date que de… 2009.

     La montée des cours des céréales est une formidable opportunité pour lancer un nouveau cycle d'investissements agricoles dans le monde et pour revenir à un niveau de production suffisant pour satisfaire dans les années à venir, à la fois les besoins d'alimentation humaine, la production de biocarburants, vecteur indispensable d'indépendance énergétique, et l'alimentation animale par des céréales et les sous-produits de la production de biocarburants.

    ACCÉDER aux statistiques de la FAO dans ce domaine.

    Le 18 Février 2011

     

     

  • Les biocarburants de deuxième génération passeront par des plants génétiquement modifiés

    Les biocarburants de deuxième génération passeront par des plants génétiquement modifiés

    Switchgrass-Graphic_800[1]  La production de biocarburants de deuxième génération par voie enzymatique à partir de matériaux ligno-cellulosiques se heurte au mur de la rentabilité globale des opérations et arrive difficilement à convaincre les investisseurs (industriels et cultivateurs) de se lancer dans la phase industrielle. C'est un procédé qui classiquement se déroule en trois étapes avec dégradation à chaud du matériau ligneux en milieu acide (150° à 180°C en milieu sulfurique à 0,5% durant quelques minutes), transformation enzymatique des polysaccharides en sucres et fermentation alcoolique. La première étape est déterminée par ce que les spécialistes du domaine appellent la "récalcitrance intrinsèque" du matériau qui caractérise la difficulté à dégrader l'armature ligneuse puis à le transformer en sucres. Plus cette "récalcitrance" est élevée et plus le prétraitement doit être long et sévère ce qui altère le rendement global final en éthanol en raison de la dégradation combinée du matériau ligno-cellulosique en furfural (C5) et hydroxymethyl furfural (C6). La deuxième étape enzymatique sera réalisée d'autant plus facilement et utilisera d'autant moins d'enzymes hors de prix que la première étape de dégradation aura été efficace. Enfin les bières obtenues après fermentation seront d'autant plus concentrées que le rendement en sucre de la phase précédente aura été élevé.

     La compréhension de cette succession d'équations complexes montre clairement que la rentabilité des opérations déterminée par la vitesse des réactions (réacteurs de faibles tailles), par l'utilisation de faibles quantités d'enzymes, par la concentration en alcool des bières et donc le rendement en biocarburant, va largement dépendre des caractéristiques génétiques du matériau de base. C'est la raison pour laquelle de nombreuses équipes dans le monde dont celle du ORNL américain (Oak Ridge National Laboratory) travaillent activement à la modification génétique des biomasses pour les rendre moins "récalcitrantes" aux traitements. Ce laboratoire annonce avoir mis au point un switchgrass génétiquement modifié à structure ligneuse à "forage amélioré" qui conduit avec 3 ou 4 fois moins d'enzymes à des rendements en éthanol accrus de 30% à 38%. Les auteurs estiment qu'ils apportent ainsi une réduction de coût de process de 21 à 25%. Ceci nécessite la culture de matériaux à teneur en lignine réduite mais surtout à caractéristiques ligneuses plus aisément hydrolysables.

     Le succès des biocarburants de deuxième génération passera donc par:

    -la culture intensive de biomasse génétiquement sélectionnée* localisée sur une centaine de km2,

    -la collecte de proximité et le stockage local de grands volumes de cette biomasse,

    -la mise au point de procédés agricoles peu encombrants utilisant le moins possible d'enzymes onéreux,

    -la réduction des prix continue de ces enzymes de la part des fournisseurs,

    -l'obtention de bières les plus concentrées possibles,

    -l'utilisation des procédés de concentration en alcool pur les moins énergivores possibles,

    -et l'utilisation des déchets ligneux comme ressource énergétique locale.

    Les futurs prix de l'éthanol qui devraient évoluer au delà des 3$/gallon (ils sont à 2.5$ aujourd'hui) tirés à la fois par ceux des ressources (maïs, cane à sucre) et ceux de l'essence pourraient aider à l'atteinte du breakeven dans ces procédés.

    *Remarque: l'utilisation des rafles et d'une partie des feuilles et des tiges de maïs dans une boucle de biocarburant de deuxième génération, accolée à la production classique d'alcool de maïs, comme le fait Poet aux États-Unis, permet outre d'utiliser une large partie des infrastructures initiales, de mélanger les bières diluées à celles plus concentrées issues de la transformation de l'amidon de maïs et à rendre ainsi la production complémentaire rentable et insensible au cours du maïs.

    CONSULTER la publication des équipes de l'ORNL sur ce sujet.

    Le 15 Février 2011

  • Le forage horizontal avec multi fracturation hydraulique transforme totalement les données énergétiques mondiales

    Le forage horizontal avec multi fracturation hydraulique transforme totalement les données énergétiques mondiales

     L'Homme a toujours su utiliser son imagination et son savoir-faire technologique pour accroître sa puissance et son bien-être. Abattre de grands arbres, exploiter en sous-sol les veines de charbon, produire et distribuer du gaz de houille toxique puis du gaz naturel, utiliser la fission nucléaire et en capter l'énergie, construire d'immenses plateformes offshores de forage pour atteindre des gisements de gaz ou de pétrole sont toutes des activités hautement périlleuses. Mais elles contribuent à apporter puissance, mobilité et confort à l'humanité. L'enjeu en vaut la chandelle, le rapport avantages/risques est jugé largement positif. Il ne me semble pas, malgré la réaction écolo-précautionneuse affichée, que ce mouvement de progression technologique de l'humanité soit tombé subitement en panne.

     Durant la dernière décennie, ce sont d'aventureuses Sociétés opératrices dans les gaz non conventionnels comme Mitchell Energy & Development rachetée en 2002 par Devon qui ont mis au point en 2005 la technologie de forage horizontal associée à la fracturation hydraulique des schistes de Barnett. Cette technologie reprise et perfectionnée par d'autres petits acteurs américains sur d'autres sites a permis de mettre au point en 2007 le "multi-stage fraccing" qui consiste à effectuer plusieurs fracturations hydrauliques tout au long d'un forage horizontal. Elles peuvent atteindre à ce jour entre 10 et 20 opérations de fracturations pour un seul forage (FIG.).

    Fraccing

     Cette technologie a déjà bouleversé l'équation de l'approvisionnement en gaz naturel des États-Unis qui il y a quelques années imposait d'importer de plus en plus de gaz liquéfié et qui maintenant affirme être très proche de l'auto-suffisance grâce aux productions locales non conventionnelles de gaz. Elles ont compté pour 50% des productions américaines en 2009 (EIA) et sûrement plus en 2010.

     Ces techniques vont se développer encore sur de plus longs forages horizontaux et être adaptées à divers types de roches contenant du gaz et divers pétroles. Cela veut dire que de nombreux gisements jugés jusque là économiquement non rentables ou épuisés vont pouvoir peu à peu être mis ou remis en exploitation; d'autres gisements aux productions actuelles médiocres vont pouvoir débiter plus. Des milliards de dollars sont investis dans ce domaine aux États-Unis par les Majors mondiaux du pétrole et du gaz. L'EIA avance que ces nouvelles technologies, plus économiques que les forages offshore, vont apporter une croissance des productions américaines de pétrole de 0,5 million de barils/jour, d'autres prévoient des croissance bien plus élevées, entre un et deux millions de barils/jour. A terme, avec la démocratisation de ces technologies, c'est l'aptitude à extraire plus à fond le pétrole des réserves exploitées dans le monde qui est en jeu. Gagner dix points sur le taux d'extraction (recovery factor) c'est à terme 700 à 800 milliards de barils de pétrole en jeu, c'est 100 ans d'extraction supplémentaire à 20 millions de barils/jour en moyenne. On peut imaginer une fin de l'extraction rentable du pétrole qui s'étalerait sur plus d'un siècle sous réserve que d'ici là, de futures ressources énergétiques plus jeunes et moins polluantes ne l'aient pas définitivement supplanté.

    Fraccing-solution

     Le forage horizontal à fracturation multiple semble donc être une technologie très efficace, elle présente cependant plusieurs inconvénients majeurs:

    – elle utilise de l'eau, de l'ordre de 8 à 12 mille m3 par puits,

    – la solution aqueuse de fracturation est composée de produits chimiques divers (TAB.) qui ne sont pas de violents poisons après dilution mais qu'il vaut mieux contenir et si possible récupérer. Citons par exemple des sables qui maintiennent les fissures ouvertes, de l'acide chlorhydrique qui va dissoudre certaines roches basiques, des huiles, des surfactants, des gélifiants, des inhibiteurs de corrosion, des agents de détartrage, des bactéricides, etc. Les boues qui sont remontées après fracturation peuvent également être polluées par entraînement de matériaux toxiques provenant du sos-sol fracturé.

    – l'utilisation d'un tel procédé pour les forages peu profonds peut polluer les nappes phréatiques voisines destinées à la consommation. C'est donc un procédé à utiliser avec d'autant plus de prudence que le forage est peu profond.

    -la fracturation peut entraîner des mini séismes, déjà signalés en particulier au Texas

     Il est certain que parmi les opérateurs américains certains ne se sont pas trop posé de questions sur les risques qu'ils faisaient prendre à l'environnement et sur les conséquences irréversibles de leurs violentes interventions. Ceci a entraîné tout naturellement des réactions légitimes des populations du voisinage, relayées par les lobbies écologiques américains. C'est la raison pour laquelle la puissante Agence pour la Protection de l'Environnement américaine (EPA) vient de publier un document énumérant toutes les questions qui se posent et pour engager les enquêtes et les études qui permettront de répondre à ces questions concernant l'impact sur les eaux de consommation. Nul doute que ce travail débouchera sur une règlementation spécifiant les conditions de mise en œuvre de ces nouvelles technologies.

     Les États-Unis ayant 10 ans d'avance sur l'Europe et le reste du monde sur ces problèmes il apparaît comme évident qu'il va falloir suivre minutieusement les conclusions de ces travaux.

     Mais il ne faudrait pas que notre pays se caractérise par une position par trop intransigeante et réactionnaire sur l'avenir du forage horizontal à multi fracturations. Il faut toujours se souvenir des doutes exprimés par le polytechnicien et néammoins savant François Arago en 1836 quand à l'aptitude de l'organisme humain à résister lors du passage des trains sous les tunnels. Nul doute qu'il aurait été ce jour là très écouté des adeptes actuels du Principe de Précaution dont certain(e)s ont fait la même école. Respect des traditions.

    CONSULTER le draft de l'EPA: de l'impact sur l'eau de la fracturation hydraulique.

    Le 10 Février 2011