Ce que vous devez savoir avant de parler, avec humilité, à la radio ou à la télé des énergies renouvelables.

                       Les émissions « vertes » qui parlent en abondance des énergies renouvelables sur nos ondes de radio ou de télé sont de plus en plus nombreuses et présentent, malheureusement, un niveau technique de plus en plus indigent. On y flingue avec allégresse et démagogie le charbon, le pétrole, le nucléaire au profit de je ne sais quoi. La plus grosse erreur généralement commise, est celle des ordres de grandeurs qui consiste à comparer des sources d’énergies distantes d’un facteur 100 en importances relatives. Alors il semble indispensable de rappeler quelques évidences, pour faire comprendre que même avec Monsieur Obama, les USA vont continuer à émettre dans l’azur leurs 5 à 6 milliards de tonnes de CO2, pendant encore bien des années. Energiesprimairesmonde2007_2

                       Il faut rappeler tout d’abord qu’en dehors des forces de gravitation responsable des marées, toutes les énergies que nous utilisons ont une origine thermonucléaire, soit de fission au coeur de notre planète, la Terre, soit de fusion au sein de notre étoile, le Soleil. La vie, grâce à la lumière, a permis durant des centaines de millions d’années d’accumuler le charbon et lignite, le pétrole et le gaz qui participent encore pour 83% des quantités d’énergie consommées par l’humanité (FIG.). Chaque année de ce siècle, nous consommons des ressources qui proviennent de biomasse accumulée pendant des dizaines ou des centaines de milliers d’année, puis transformée et compactée.

                     La première source primaire d’énergie consommée est le Pétrole avec 4 milliards de tonnes équivalent pétrole, sur un total de 12 milliards. Le pétrole est encore la première ressource d’énergie primaire consommée sur Terre et non pas le Charbon, comme on l’entend dire trop souvent. Cette situation privilégiée du pétrole, due à la simplicité d’utilisation des produits dérivés liquides, est une chance pour l’humanité. En effet il est essentiellement utilisé et gaspillé dans les transports: 70% du pétrole aux USA va dans les transports. Or ce secteur est en train d’amorcer une véritable révolution industrielle, subitement accélérée par la folie des cours du brut de cet été. Les consommations de pétrole vont se réduire dans le monde non pas parce qu’il est rare, mais parce qu’il est cher. Les applications autres que le transport telles que le chauffage ou la pétrochimie vont devoir s’orienter peu à peu vers de nouvelles ressources.

                        La deuxième énergie primaire la plus consommée est le Charbon avec 27% de part de marché, 3,2 milliards de tonnes équivalent pétrole sur 12 milliards. Il est au premier rang en Chine mais au troisième rang derrière le pétrole et le gaz aux Etats-Unis (22%) et en Europe (18%). En Asie Pacifique, il représente 50% de l’énergie consommée. Son utilisation va croître avec le développement de la Chine. Seul un vaste programme mondial de rénovation des centrales électriques et de substitution partielle par le nucléaire et le gaz devrait pouvoir faire décroître son utilisation dans le monde. Sans cela les émissions de CO2 continueront à battre des records olympiques.

                        Enfin dans le trio des énergies carbo-polluantes vient le Gaz Naturel, avec 22% de part de marché ou 2,6 milliards de TEP. Son utilisation est appelée à croître, il est second aux USA (25%) et en Europe (24%). Il est abondant sur terre et largement réparti dans le monde. Les techniques modernes de forage permettent de l’extraire des veines de charbon profondes (coal bed methane) ou des schistes bitumineux (oil shale). Ces nouvelles ressources vont rendre les Etats-Unis autosuffisants. Il va d’ici une décennie devenir le N°1 aux Etats-Unis, ce sera l’énergie de base de la deuxième partie de ce siècle. On devrait donc voir décroître les utilisations du pétrole et du charbon dans les pays de l’OCDE au profit de la montée du gaz. C’est de plus le supplément d’énergie indispensable pour pallier les défaillances des énergies renouvelables.

                         Vient par la suite l’ensemble des énergies peu ou non carbo-polluantes avec seulement 17% du marché. C’est l’hydroélectricité (6%), en plein développement en Amérique du Sud avec 28% de part de marché, qui tient la tête de ce deuxième peloton, puis vient le nucléaire (5,3%) et la biomasse très difficile à évaluer mais estimée autour de 5% du marché. Le développement de la biomasse se heurte tout bêtement à des problèmes de logistique  pour collecter un produit de très faible énergie massique et volumique (FIG.II). Elle n’est concevable que pour de petites unités agricoles ou municipales, proches des lieux de culture ou de collecte du bois. Les grands projets complexes et rentables sont difficiles à imaginer, leur approvisionnement en matière première limitant la taille du projet et donc disqualifiant les procédés trop complexes.Energiesvolumiquesmassiques 

                     Enfin de ce lot il reste moins d’un pourcent des 12 milliards de TEP, soit autour de 100 millions de TEP, pour l’ensemble éolien, géothermie et solaire. Ces productions demeurent donc pour l’instant marginales et non rentables. Elles subsistent grâce à l’existence de subventions qui pourraient alimenter des projets plus pertinents. Le seul espoir réside dans le fait qu’elles arrivent un jour à atteindre un seuil de rentabilité raisonnable. Le solaire photovoltaïque qui dispose d’immenses marges de progressions technologiques et industrielles semble être pour l’instant le seul éligible des trois.

                      Espérons donc un jour une émission de télé « verte » nous parlant des progrès réalisés dans les transports terrestres, maritimes et aériens. Nous ventant les mérites des nouvelles centrales électriques à eau hypercritique, nos expliquant les progrès à accomplir dans l’électronucléaire, nous présentant l’intérêt du transport du gaz sous forme d’hydrates de méthane qui permettrait de démocratiser cette matière première et de rendre son prix compétitif.

                     Cela nous changerait des chasseurs de primes qui hantent les antennes en nous expliquant que l’éolien va remplacer les autres sources d’énergie et que la capture et la séquestration du CO2 c’est pour demain.

Le 9 Novembre 2008.

Commentaires

8 réponses à “Ce que vous devez savoir avant de parler, avec humilité, à la radio ou à la télé des énergies renouvelables.”

  1. Avatar de Bruno
    Bruno

    Analyse très intéressante.Les chiffres sont explicites. C’est vrai que malgré leur « aura » les éoliennes ne pourront pas détrôner certaines sources dites « traditionnelles » comme le nucléaire,etc.
    Par contre les énergies « marémotrice » vont quant à elles de plus en plus se dvlp, ex: les pélamis et autres systèmes du genre.
    Et comme vous l’avez bien écrit les panneaux photovoltaïque vont devenir de plus en plus abordable et surtout rentable car leurs rendements augmentent de plus les possibilités d’implantation dans les bâtiments s’élargissent (ex les prototype de cellule transparente).

  2. Avatar de Loran
    Loran

    Bonne (re)mise en perspective.
    Je continue à penser que vous sous estimez le solaire thermique pour la production d’électricité.

  3. Avatar de Raymond
    Raymond

    Le solaire thermique aura un bel avenir s’il résout, de façon économique, le problème de stockage de chaleur ou plus globalement d’énergie, pour étendre sa plage de production vers le soir et le lendemain matin. Il y a là un sujet de développement technologique passsionnant. L’utilisation de masses de « bétons » pouvant monter jusqu’à 500°C pourrait satisfaire en partie à la spécification.

  4. Avatar de Berthier
    Berthier

    Il semble que le stockage de la chaleur à l’aide de sels fondus est déjà au point et permet une autonomie de 16h.
    C’est plutôt la proximité d’une source froide qui semble être un problème pour extension significative, par exemple toutes les centrales du projet desertrec sont situé près de la mer.

  5. Avatar de Raymond
    Raymond

    Berthier les stockages à changement de phase avec les sels fondus sont des prototypes onéreux qui n’ont que bien peu d’avenir. Il faut un stockage beaucoup moins cher.
    Mais je suis d’accord avec vous sur la nécessité de trouver une source froide.

  6. Avatar de Berthier
    Berthier

    Ah bon, je pensais que le solaire à concentration avait rejoint le prix de l’éolien sous les tropiques. Il y a un internaute furieux qui fait plein de sites sur ce sujet en affirmant que le coût serait entre 7 et 10 c€.
    Solar 3, c’est presque industriel, non ?

  7. Avatar de Emile
    Emile

    Selon Bruno « les éoliennes ne pourront pas détrôner certaines sources dites « traditionnelles » comme le nucléaire ».
    Et pourtant,  » Entre 2008 et 2012, la production supplémentaire d’électricité sera de 381 TWh pour l’éolien et 155 TWh pour le nucléaire, en cinq ans.
    Depuis cinq ans, l’énergie éolienne progresse plus vite que l’énergie nucléaire au niveau mondial, non seulement en nouvelle puissance installée (62.770 MWe pour l’éolien contre 13.620 MWe pour le nucléaire) mais aussi en énergie supplémentaire qu’il est possible de produire à partir de ces nouvelles capacités (125.600 GWh/an pour l’éolien contre 98.000 GWh/an pour le nucléaire).  »
    Lire : La production d’électricité éolienne et nucléaire

  8. Avatar de Bruno
    Bruno

    Bonjour Emile,
    Tant mieux si les chiffres que vous avancez sont exactes.
    Je trouve que les éoliennes sont pour moi une très bonne alternative à certaines systèmes, comme le nucléaire, mais quand je lis que certains pays vont accroitre l’implantation de centrale nucléaire (chine, japon, ect.) au détriment d’autres systèmes, je constate que par démagogie beaucoup de pays vont tourner le dos aux éoliennes par facilité. Les éoliennes sont une source mais pas la vrai source qui nous affranchira des énergies fossiles.
    Et dire que la chine, ouvre une centrale a charbon chaque semaine en moyenne:ouille!
    Par contre je crois beaucoup à la décentralisation de la production de l’électricité via des unités plus petites: l’échelle des habitations et autres groupements de logement qui grâce au nombre permettrait un important apport en électricité. Ici en Belgique le photovoltaïque ce dvlp de manière significative, il était temps surtout avec un précurseur comme l’Allemagne.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *