Le marché du solaire photovoltaïque s’est bien développé en volumes, mais les prix n’ont pas suivi jusque là

                      Sous l’influence d’une offre multiple et d’aides gouvernementales parfois excessives, comme en Allemagne ou en Espagne, l’industrie des modules solaires photovoltaïques a connu un trés fort développement durant ces dix dernières années. En 1999 le monde avait vu l’installation de 125 MW de modules solaires, en 2008 ce sont 4100 MW qui ont été mis en place. Ceci représente une croissance moyenne annuelle de 47% (FIG.). Une telle croissance couplée aux perfectionnements des technologies, à l’arrivée de nouvelles solutions, à la montée en puissance d’opérateurs chinois aurait du se concrétiser par une baisse régulière des prix accompagnant l’expérience cumulée de la filière. Or, il n’en a rien été, on a même vu en 2004,2005 et 2006 les prix moyens croître sous la poussée de la pénurie en Silicium et de la montée des cours de ce produit de base (FIG.). Mais ce phénomène n’a en rien dégonflé la demande sponsorisée par ailleurs par de copieuses aides gouvernementales qui ont fait flamber la demande. Voila pour le passé et ses distorsions de marché, mais l’avenir semble aujourd’hui moins rose pour toute la filière.Marchprix19992008

                  Tout d’abord les responsables politiques européens se sont aperçus que leurs aides s’avéraient être hors de prix, ils ont donc décidé soit des baisses des aides tarifaires (Allemagne) soit des limitations drastiques en volumes (Espagne).

                  Le second paramètre est la crise du crédit qui décourage les investisseurs d’apporter leur concours soit dans des unités de production de modules soit dans de grandes fermes solaires dont le retour sur investissement est généralement lointain et tributaire de décisions politiques.

                   Le troisième élément est la situation de surcapacité de productions dans le monde. En ce début 2009 on estime la capacité de production moyenne pour l’année aux environs de 14 ou 15 GW pour des volumes de productions attendus qui pourraient atteindre selon les plus optimistes les 10 GW. Ce chiffre parait bien excessif dans ces moments de crise, si le marché 2009 s’élevait à 7 ou 8 GW la profession s’en contenterait sûrement.

                  Le quatrième paramètre lié au précédent est la baisse des prix qui va faire très mal. Animée par les nouveaux opérateurs qui ont investi récemment et qui vont vouloir faire tourner leurs équipements tout neufs, avec parmi eux des opérateurs chinois qui pourront attaquer le marché avec des prix très bas. Les grands acteurs européens, essentiellement allemands, vont particulièrement souffrir de cette baisse des prix annoncée.

                  Enfin le dernier paramètre important est l’arrivée des technologies en couches minces qui, pour l’instant, ne permettent pas de dépasser des taux de conversion de 10 à 11% (contre 20% pour les modules en Silicium les plus sophistiqués) mais qui vont s’imposer par des prix de revient très bas, en particulier pour les grandes unités solaires installées en plein désert californien par exemple. Les technologies en pointe sont:

  • le Silicium amorphe (Sharp, Sanyo-Nippon Oil),
  • la technique CIGS (séléniure de cuivre indium gallium) en plein développement (Shell au travers d’Avancis et de Showa, Honda avec Soltec, Nanosolar, etc.),
  • le tellurure de Cadmium (First Solar)

                   Ces technologies en couches minces, si les investissements annoncés sont tenus, pourraient capter un tiers du marché mondial vers 2012 d’après GTM Research(FIG.II). Marchpotovolt2012

         L’ensemble de ces paramètres devraient permettre de  réduire rapidement les prix des modules photovoltaïques vers 1 à 2 dollars par Watt. Plutôt vers un dollar pour les modules en couches minces, plutôt vers deux dollars pour les modules sophistiqués au silicium (ex. Sanyo HIT). La clé étant de conduire les prix de l’énergie photovoltaïque à parité avec les prix du réseau. La disparition des aides des Etats serait un élément clé symbolique du succès de ces technologies.

                   Il semble cependant peu probable que le marché n’accuse pas le coup de la crise, pour le moins en 2009. Cette hypothèse serait susceptible de retarder d’un an les plans de développements annoncés

Le 1er Février 2009.

Commentaires

2 réponses à “Le marché du solaire photovoltaïque s’est bien développé en volumes, mais les prix n’ont pas suivi jusque là”

  1. Avatar de karva
    karva

    Bonjour,
    je trouve très bien votre analyse. Je suis très sceptique sur les capacités du PV à abaisser suffisamment ses prix dans les années qui viennent. En partie parce qu’on néglige en général les autres coûts impliqués dans l’installation de panneaux, cad l’enrobage mécanique « in situ ». Je voudrais vous conseiller cette études de Berkeley, qui inclut ces prix:
    eetd.lbl.gov/ea/EMP/reports/59282.pdf
    ce qui est important, c’est que lors de cette étude, déjà, le prix d’installation était de l’ordre (4$/watt) du prix des modules. Or ce prix n’a guère de chances de baisser, car il ne dépend pas beaucoup des progrès technologiques, et les cellules couche mince, de par leur faible rendement, ont besoin de plus de quincaillerie pour la même puissance crête (il en faut plus!).
    Enfin, remarquons que les prix de rachat en Europe de l’électricité PV sont entre 300 Euros et (550 si intégré au bâti..) Euros/MWh, et une analyse de ces prix montre qu’ils correspondent grosso modo aux prix de production. Si on note que EDF produit avec ses centrales amorties pour 32 Euros/MWh, il y en a pour des dizaines d’années avant que le PV ait une contribution significative à la production électrique mondiale!
    Il me semble que je donnerais les prix suivants pour les divers renouvelables:
    1.5 Euros/Watt crête pour l’éolien,
    4 Euros/Watt pour le solaire à concentration
    5 Euros/Watt pour le PV
    ce qui donne au MWh, avec des facteurs de charge autour de 20%, un taux d’actualisation de 8.5% et 2% de l’invetissement en entretien, fonctionnement:
    75-80 Euros/MWh pour l’éolien (meilleur si beaucoup de vent!)
    200-250 Euros/MWh pour le solaire à concentration (Espagne)
    250-300 Euros/MWh pour du PV dans une grande centrale (Narbonne).
    On peut comparer avec le prix d’un EPR non amorti: 55 Euros/MWh, dixit Gardonneix. On comprend que les défenseurs du renouvelable se bousculent aux guichet des aides d’état, et que les fabricants d’éoliennes (Vestas) aient une telle présence dans les pubs du « Monde » par exemple: sans soutien de la part (des gogos) du public, leur industrie s’effondre!
    Vos informations sont souvent excellentes, bien que je trouve que vous sacrifiez trop à la vulgate anti-chinoise à la mode…Mais comment faire abstraction de ses idées personnelles?
    Karva

  2. Avatar de Raymond Bonnaterre

    Mon cher Karva
    1- vous ne pouvez pas imaginer combien les prix d’un composant peuvent dégringoler lorsqu’il y a surproduction.
    Toutes les hypothèses, même les plus audacieuses, sont alors impitoyablement balayées.
    2- les solutions photovoltaiques modernes par impression par rouleau ou sputtering prédéfinissent le module entier, l’analyse méthode d’assemblage est totalement révolutionnée. Certains annoncent des prix du Watt inférieur au dollar à l’horizon 2015.
    3- je n’aime pas les Chinois qui mettent de l’Urée-formol dans le lait pour l’enrichir en protéines, mais j’adore ceux qui écrivent des poèmes ou qui réalisent des oeuvres d’art.
    4- par contre je déteste tous leurs vieux équipements hérités des soviétiques qui détruisent la planète. Je ne sais pas si c’est un effet de mode?

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