AREVA fait parler de son discret projet de réacteur à eau bouillante baptisé KERENA

                               A côté des deux réacteurs à eau pressurisée, le franco-allemand EPR et le franco-nippon ATMEA qui sera un condensé de ce qui se fait de mieux aujourd’hui dans la technologie de troisième génération, grâce à l’apport de la maîtrise technologique de Mitsubishi Heavy Industries, AREVA travaille sur un troisième projet à eau bouillante, appelé jusque là SWR 1000 mais qu’AREVA vient de baptiser  KERENA.  Cette technologie qui permet de travailler avec des pressions deux fois plus faibles que dans la technologie pressurisée est beaucoup moins complexe, avec un seul circuit primaire (FIG.) et peut être mise en oeuvre dans des délais plus brefs (construction en moins de 48 mois). Elle permet également de faire appel à des sécurités passives de type convection naturelle, ce qui simplifie et fiabilise l’ensemble. Dans le cadre de ses accords avec E-On pour de futurs développements britanniques, il avait été retenu qu’E-On participerait à la mise au point de ce nouveau réacteur de 1250 MWe. Dans l’accord, la participation de Siemens était mentionnée, mais il n’est pas sûr que cette participation éventuelle soit toujours d’actualité. Il faudra donc attendre de plus amples précisions sur un éventuel programme de développement.

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Le 21 Mars 2009

Commentaires

7 réponses à “AREVA fait parler de son discret projet de réacteur à eau bouillante baptisé KERENA”

  1. Avatar de el gringo

    Ce type de réacteur n’apporte que peu de gain en terme de rendement énergétique. Environ 35% au lieu de 32 à 33% pour un réacteur PWR classique et 36% pour l’EPR. Les réacteurs de 4° génération sont attendus vers 2035 avec un rendement de plus de 45% pouvant être porté à plus de 60% avec la génération d’hydrogène ce que ne peuvent réaliser les PWR, BWR ou autres EPR.
    Le principal avantage de ce type de réacteur, en plus de la sécurité estimée à 10 fois celle de l’EPR, est son coût de construction et donc l’investissement initial sensiblement plus faible (60% à 70% selon certaines sources) que celui d’un réacteur à puissance électrique équivalente ainsi que des coûts de maintenance plus faibles.
    Ce changement de priorité dans les choix technologique d’AREVA se justifie par la préférence marquée du DOE pour cette technologie et par la concurrence de General Electric proposant ce type de réacteur aux USA et à l’exportation pour un coût bien moindre que l’EPR ainsi et sans doute par le rapprochement de Siemens avec la Russie créant un nouveau concurrent de poids avec des réacteurs aussi bien moins chers à l’exportation.
    Cela arrive au plus mauvais moment pour AREVA qui a de sérieux problèmes de financement à résoudre avec environ 10 milliards d’euros à trouver dans les prochaines années. Les dérapages de l’EPR posent aussi le problème du coût total du renouvellement du parc nucléaire français sans parler des conditions de financement actuel en raison de la crise financière et par la sortie de Siemens qui va coûter 2 milliards d’euros de cash à AREVA.
    De plus, le gouvernement français a décidé désormais de mettre aux enchères le renouvellement des concessions des centrales hydroélectiques (qui étaient automtiquement attribuées à EDF jusqu’à présent) ce qui risque de priver EDF d’une importante rente de situation.

  2. Avatar de ray
    ray

    Merci el gringo pour votre science. Je me permettrai modestement d’ajouter quelques remarques à votre post:
    1) la production d’hydrogène en 2035 par un réacteur nucléaire me semble très improbable, tout comme l’utilisation d’hydrogène comme vecteur d’énergie en général.
    2) il faudra bien un jour parler de consommation d’Uranium par TWh, même si aujourd’hui le coût de l’Uranium est encore marginal. Lorsqu’il ne le sera plus il faudra bien développer les réacteurs à neutrons rapides, les réacteurs à eau bouillante apparaîtront alors comme des dinosaures à très faible efficacité énergétique.
    3) Je pense que l’ATMEA qui va optimiser investissement-coûts de mainternance- efficacité énergétique aura un avenir bien plus brillant qu’un réacteur à eau bouillante, même modernisé.

  3. Avatar de el gringo

    Le principal avantage recherché est celui du coût de construction et d’exploitation avec la possibilité d’un pilotage en force des centrales pour s’adapter rapidement aux variations de consommation électrique. Le coût de maintenance est plus importantes sur les PWR en raison des conditions de température et de pression plus importantes ainsi que d’un nombre d’équipements plus élevé comme vous le soulignez. L’usure de ces équipements est plus rapides sur les PWR particulièrement lors du pilotage en force des centrales. On parle désormais des variation de puissance de 5%/minute pour les BWR et pour l’ATMEA contre 10%/heure pour les réacteurs actuels.
    Cet avantage est évidemment moins important lors d’un fonctionnement en mode base qui reste dans tous les cas le plus économique.
    L’ATMEA est annoncé avec un temps de construction de 48 mois et l’ESBWR de GE de 43 mois. Le coût de construction lié à la technologie à eau bouillante est estimé sur l’ESBWR à 1200$/KWhe soit 1.8 milliards de $ pour la construction d’un réacteur de 1500 MW à comparer aux plus de 3 milliards pour l’EPR principalement liés au nombre et à la redondance de équipements destinés à assurer la maintenance sans avoir à arrêter l’exploitation du réacteur.
    Le mois dernier, les Etats-Unis ont durci leur réglementation sur la sécurité des centrales nucléaires imposant que les futurs réacteurs soient résistants à la chute d’un avion de ligne ce qui exclu désormais l’EPR du marché américain sauf en cas d’évolution importante de son architecture.
    http://www.romandie.com/infos/news2/090218205200.74u0woef.asp

  4. Avatar de ray
    ray

    L’EPR est peut-être exclu d’après vos critères, el gringo, mais pour l’instant dans sa short list de 5 candidats d’où il doit retenir deux ou trois projets, le DOE a fait figurer le projet EPR de Calvert Cliff. Je ne comprends donc pas d’où vous tirez votre position aussi péremptoire sur la non conformité aux spécifications américaines de l’EPR. L’article que vous citez ne dit rien sur les chances des uns et des autres. Dans tous les cas je ne vois pas un constructeur passer des milliers d’heures à essayer de se faire qualifier s’il sait n’avoir aucune chance. Au contraire je pense que les Etats-Unis ont besoin des compétences d’AREVA dans le recyclage des combustibles usagés et la gestion des déchets ultimes, domaine d’où ils sont absents. Ne pas retenir le projet EPR serait jouer politiquement contre leurs intérêts. Mais le concours se poursuit, dans l’attente du résultat.

  5. Avatar de el gringo

    La procédure de validation de l’EPR par le NRC est loin d’être terminée et doit s’achever le 04 avril 2011 si tout va bien et il risque de se passer beaucoup de choses (pas forcément favorable au nucléaire) d’ici là avec la nouvelle administration Obama.
    http://www.nrc.gov/reactors/new-reactors/new-licensing-files/epr-detail-schedule.pdf
    En particulier, les critères de sécurité des futures centrales évoluent rapidement vers des niveaux bien plus élevés qu’actuellement avec par exemple le consensus quasi global sur le positionnement du coeur du réacteur sous le niveau du sol de la centrale pour limiter les conséquences d’une attaque comme celle du 11 septembre ainsi que par le choix de système de protection et de sécurité passif dès la conception du réacteur ce qui n’est pas le cas de l’EPR. Pour rappel, le programme EPR a débuté en 1992 et l’EPR n’est qu’une version améliorée des réacteurs N4 entrés en service entre 1996 et 2000 en France et qui ont déjà connu de sérieux problèmes d’exploitation et n’est en aucun cas un réacteur dit de troisième génération (sauf dans la communication d’AREVA).
    Le fait qu’AREVA sorte du chapeau un nouveau réacteur de même puissance que l’EPR suite au renforcement des critères de sécurité mais aussi bien moins cher à construire laisse à penser qu’ils ne sont pas très optimistes sur leurs chances de succès. Un réacteur de 1600 MW est en effet trop puissant pour nombres de pays en développement.
    La présentation du budget prévisionnel des USA par Obama ne contient aucune mention au nucléaire civil (sauf pour l’arrêt du stockage à Yucca Mountain). Dans la rubrique DoE (Department of energy), on cause efficacité énergétique, amélioration du réseau, modernisation de la distribution d’électricité, technologies décarbonées, innovations, énergie propre, etc …
    Au total, le DoE a obtenu 39 milliards de dollars, ce qui double presque le budget précédent. Les grandes lignes prévoient une enveloppe supplémentaire de 34 milliards de dollars, dont 11 rien que pour la modernisation du réseau électrique et l’efficacité énergétique dans son ensemble mais rien sur le nucléaire.
    « Supports and encourages the early commercial deployment of innovative, clean energy technologies through loan guarantees. »
    http://www.whitehouse.gov/omb/assets/fy2010_new_era/A_New_Era_of_Responsibility2.pdf
    Enfin, l’engouement pour le nucléaire (quand le pétrole battait des records) retombe très rapidement aux USA en raison de la crise rendant le financement très compliqué. Le DOE n’envisage plus que la mise ne service de 8 nouvelles centrales d’ici 2020. On comprend mieux l’intérêt de se tourner vers des modèles plus faciles à financer et parfois plus sûrs car conçus après les attentats du 11 septembre (sans parler de l’incident de la centrale de David Besse en mars 2002 qui a renforcé les USA dans leurs certitudes qu’un accident est toujours possible avec le nucléaire contrairement en France).
    http://www.reuters.com/article/GCA-BusinessofGreen/idUSTRE52G4UF20090317?pageNumber=1&virtualBrandChannel=0

  6. Avatar de ray
    ray

    Donc, si je vous comprends bien, un réacteur EPR avec deux enceintes de protection (containment) aurait moins de chance d’être retenu qu’une technologie à eau bouillante avec une seule enceinte de protection, sur le critère de risque de contamination à la suite d’un impact d’un avion de ligne.
    N’est-ce pas là approche volontairement paradoxale de votre part? Forme de défaitisme gaulois?

  7. Avatar de el gringo

    Les conséquences de la chute d’un avion de ligne sur l’EPR sont connus et même publiques depuis 1997. La double enceinte de confinement n’a aucune chance de résister à l’impact d’un avion de ligne qui détruirait à coup sûr le réacteur. Elle est dimensionnée (2 * 1.3 mètres d’épaisseur ce qui est déjà beaucoup mieux que la simple enceinte de 90 cm des centrales de 900 MW) pour résister à un petit jet d’affaire ou à un avion de chasse à condition que les dispositifs de secours ne soient pas détruits ce qui parait très probables dans ce cas de figure en raison de la redondance des équipements (4 * 50%).
    http://www.senat.fr/rap/o97-4841/o97-484121.html
    Les études qui ont suivi les attentats du 11 septembre et en particulier la prise en compte des conséquences de l’explosion du carburant (environ 100 tonnes) en plus des effets mécaniques d’un avion de ligne lors de l’impact créerait une boule de feu de 90 mètres entraînant la destruction de tous les dispositifs de securité et le rejet d’une grande partie des éléments radioactifs dans l’atmosphère.
    C’est pour cela que les critères de sécurité évolue aujourd’hui vers le fait d’enterrer le réacteur ainsi que certains dispositifs de sécurité plus les salles de contrôles tout en les éloignant et de déplacer les piscines loin des réacteurs dans des bâtiments protégés pour limiter les dégâts mais tout cela impose de revoir complètement la conception des centrales.
    La double enceinte même imparfaite (lisez le rapport du sénat) à son utilité mais pas contre un avion de ligne. Le principal objectif dans la réalisation de l’EPR a été d’accroître la disponibilité en multipliant les équipements critiques et ensuite seulement d’augmenter le niveau de sécurité face à des risques dits raisonnables. Dans le contexte des années 1990, cette approche était parfaitement logique et cohérente.

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