Les primes à la casse et autres incitations fiscales sont définitivement de formidables instruments de soutien à l’économie

Au gré des papiers ou des discussions sur les mesures économiques pertinentes il se trouve toujours un pseudo économiste pour condamner l’effet pervers des mesures gouvernementales à l’incitation de se séparer d’un véhicule hors d’âge pour le remplacer par une machine plus récente et énergétiquement plus efficace, sous le prétexte que ce n’est que faire avancer une décision d’achat qui aurait de toute façon été prise sans ces offres incitatives. Et pourtant toutes les démarches commerciales, soldes, promotions, rabais, crédits « gratuits », etc. sont basées sur le même principe d’incitation à provoquer une décision d’achat anticipée. Accroître le flux des commandes est à la base de tout acte commercial incitatif. Il peut se présenter sous la forme d’incitations financières, soit sous la forme d’une politique de l’offre, à l’aide de nouveaux produits plus séduisants que les anciens. La fin de 2008 et la première partie de 2009 auront été redoutables pour tous les constructeurs mondiaux. Aux Etats-Unis par exemple, la raison de la crise de l’industrie automobile est à imputer à un double phénomène: le désenchantement d’une partie des consommateurs devant l’offre de véhicules trop avides en carburant devenu hors de prix, phénomène décelable dès le début 2008 et le dérèglement des conditions des prêts bancaires à la consommation. Il fallait emprunter à plus de 8% en Décembre et Janvier derniers pour un prêt automobile nous informe la FED. Formidable coup d’accordéon dans le flux des commandes, générant d’énormes stocks d’invendus et déstabilisant l’ensemble de la profession. Devant une telle situation où la profession se trouvant dans l’incapacité financière d’animer une politique commerciale agressive, ne sachant même plus boucler ses fins de mois et ne disposant pas de produits alternatifs qui répondent à l’attente de la clientèle, il est bien nécessaire que les Etats interviennent pour éviter la débâcle financière et si possible pour relancer la demande. C’est ce qu’ont fait quasiment tous les Gouvernements qui devaient sauver leur industrie automobile. Les diverses primes à la casse et autres incitations fiscales ont fleuri dans le monde. L’Allemagne, la France, l’Italie, l’Espagne, la Grande-Bretagne, la Chine, les Etats-Unis, le Japon y sont tous allés de leur politique d’incitation. La plus brève fut indéniablement la mesure américaine qui avait épuisé son milliard de dollars en une semaine et qui a été obligée de multiplier l’enveloppe par quatre pour tenir le mois d’Août. Mesure trop brève, insuffisante pour soutenir la demande en l’absence d’offre produit adéquate. Alors après un mois d’Août flamboyant, Septembre, Octobre et Novembre ont été très ternes pour l’automobile américaine comme le montrent les ventes cumulées sur trois mois mobiles par constructeurs en forts retraits(FIG.I). L’offre produit de certains constructeurs américains comme GM ou Chrysler n’étant pas prête, il faut se faire beaucoup de soucis sur leurs performances à venir à moyen-terme. Par contre Toyota vend ses modèles hybrides et VW vend « miraculeusement » ses modèles diesel Jetta et Touareg qui ont représenté le quart de ses ventes américaines en Novembre.

Ventes-vehicules-cumul-2009-11

Mais Novembre n’a pas été morose partout la Chine poursuit sa forte croissance où, là, la demande est vivace, sponsorisée par des aides fiscales. La France fait un malheur avec la prime à la casse. Mais on le sait peut être moins, le Japon ressort également avec un bon score (+36%) grâce à une prime à la casse instaurée depuis le mois de Juin, d’un montant de 250 mille yens (2800$) pour un véhicule de plus de 13 ans d’âge. Le Gouvernement japonais espère gonfler les ventes de près de 700 mille exemplaires sur l’exercice fiscal 2009-2010. 

2010 devrait être une année d’arrêt de la plupart de ces mesures incitatives dans le monde. L’arrivée progressive de nouveaux modèles de véhicules plus sobres, plus adaptés à la contrainte climatique tels que les véhicules électriques et de nouveaux modèles hybrides, devrait permettre à l’offre de prendre le relai de la stimulation de ce marché. Il faut dire que la profession revient de loin, certains il y a un an ou un peu plus sortaient en fanfare de nouveaux 4X4. Les prochains seront toujours aussi lourds, obséquieux et stupides, mais leur motorisation sera hybride, ce qui leur permettra d’économiser un verre d’essence à chaque redémarrage.

Le 2 Décembre 2009.

Commentaires

5 réponses à “Les primes à la casse et autres incitations fiscales sont définitivement de formidables instruments de soutien à l’économie”

  1. Avatar de waccsa
    waccsa

    Le soutien public a donc récompensé les « efforts » des actionnaires des constructeurs mondiaux, qui ont exigé pendant des années des versements de dividendes toujours plus conséquents (15% de rendement par an, c’était la norme), ce qui a conduit à la politique court termiste que l’on sait (vendre des véhicules les plus chers possibles, en faisant la vraie marge sur la vente d’un crédit auto). Hormis Toyota et son modèle hybride, aucun n’a plus pris la peine de cherche à développer de solutions innovantes dans ce qui fut jadis le coeur de métier de cette industrie.
    Pour savoir si ces incitations fiscales sont vraiment de formidables instruments de soutien à l’économie, a-t-on une idée du coût pour la collectivité de ces incitations fisclaes, par véhicule vendu ?

  2. Avatar de ray
    ray

    Waccsa, dans votre approche simplificatrice vous oubliez Honda qui commercialise également des véhicules hybrides, mais aussi les centaines de milliers d’ouvriers et d’employés qui vivent de l’industrie automobile. Mais, me direz-vous, par rapport à ces sales actionnaires, ils ne font pas le poids.
    Avant de jeter l’anathème sur une action ou une activité il faut toujours penser aux personnes qui travaillent et qui tirent leurs ressources de cette activité.

  3. Avatar de waccsa
    waccsa

    Exact pour Honda. Mais justement, je pense aux salariés de ce secteur. Si l’on voulait vraiment éviter le renouvellement des attitudes qui ont conduit à la situation actuelle, il aurait fallu que le soutien public soit conditionné au fait que les actionnaires des constructeurs auto assument leurs responsabilités y compris quand leur politique de court terme tourne mal (très exactement le même scénario que pour les banques, ou les promoteurs immobiliers).
    Comme cela n’a pas été fait, le concept de Moral hazard risque bien de trouver un autre terrain d’expression dans les années à venir, une fois que les difficultés présentes auront digérées à coup de grasses subventions.

  4. Avatar de Pierre
    Pierre

    Ok avec waccsa
    Et :
    les ouvriers des autres secteurs non aides ? Alors pourquoi a t’on laisse mourrir le textile (2 eme employeur europeen a l’epoque pas si eloigne des annees 90) ? Si on joue sur les sentiments, allez voir les vallees des vosges et dites leur que les gars de Flint ou sochaux valent mieux qu’eux !
    Et on s’arrete quand de financer leur manque de performance ? A 5 milliards,a 20 ? Les ouvriers de renaud meritent t’ils qu’on vendent des parts d’EDF ?
    Alors on choisit a long terme quoi entre financement de la recherche et maintien d’emploi peu qualifies ? Ah, oui j’ai oublie on emprunte pour faire les 2…
    Enfin, dans 10 ans quand ce coup ci on les laissera tombes, vous irez explique a ceux qui sont restes ou entres aujourdhui dans ces secteurs qu’ils se sont fait baises…
    Un exemple personnel : Un gars licencie en 96 dans le textile. Pas content a l’epoque d’etre dans la premiere charette.
    On m’en donne des nouvelles 10 ans plus tard. Reconverti dans les bio technologies. Ses anciens collegues qui s’etait agrippes a leur activite condamnee, apres 10 ans d’enfer a prier a chque plan social on finit par y passer aussi… trop vieux pour la reconversion, trop nombreux pour etre bien acccompagnes.

  5. Avatar de JP
    JP

    Il me semble qu’il y a un juste milieu possible, et souhaitable, entre la soumission pavlovienne à un slogan tel que « la globalisation est un fait, il n’y a pas d’autre choix réaliste que de se soumettre à la nécessité de (mettre ici la mesure que l’on veut imposer) « , et l’ignorance des réalités simples de l’interaction de l’économie avec la technique.
    En l’occurrence, la différence entre le textile et la ouature, c’est que pour l’essentiel du marché du textile, les pays à bas salaire avaient une offre de produits dont la qualité était comparable à celle de l’Occident, pour une fraction du prix. Alors que pour la ouature, les industriels occidentaux sont encore largement en mesure de concurrencer sur le rapport qualité-prix les industries des pays à bas salaires, y compris sur leurs propres marchés domestiques.
    La cause de cette différence dans l’économie des ces deux secteurs industriels est purement technique: pour être compétitif dans l’industrie automobile, il ne suffit pas de sous-payer le personnel et d’investir dans les machines de production, il faut aussi avoir accumulé et conserver un capital de savoir-faire.

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