France, un exemple d’inefficacité: le solde des échanges d’énergie électrique

 La France pourrait être aujourd’hui un très grand fournisseur d’énergie électrique à ses voisins européens. Sa position centrale en Europe, son avance historique dans le nucléaire, son large parc de centrales hydroélectriques, l’accès facile au GNL par ses façades atlantique et méditerranéenne qui pourrait alimenter un large parc de centrales modernes à cycle combiné, la présence de zones venteuses, une irradiance solaire de bonne qualité dans une large part du sud du pays militent pour que ce pays soit le leader de l’énergie électrique en Europe. Or dans les faits le poids de la France dans le bilan énergétique européen tend à régresser. Pour mesurer cette perte d’influence il suffit de se reporter aux statistiques douanières qui montrent que le solde des échanges d’électricité a fortement plongé ces dernières années (FIG.).

Electricite-solde-échanges 

 Alors que ce solde était positif de 2,75 milliards d’euros en 2008, il est tombé à 0,67 milliard d’euros en 2009 et atteint sur les 12 derniers mois à fin Juin 2010 le montant de 0,4 milliard. Outre la baisse du solde des échanges mesuré en TWh qui a été globalement divisé par deux entre 2008 et 2009, c’est aussi l’inaptitude du parc français à fournir les appels de puissance qui oblige le régulateur à importer des MWh hors de prix en heures de pointes.

 Bien sûr tout un chacun se penchant sur la génération d’électricité en France sait que le parc nucléaire existant vieillit mal, que l’ancienne Direction d’EDF était plus passionnée par les aventures exotiques en Italie, en Grande-Bretagne ou aux Etats-Unis que par la maintenance de son outil de production en France, que pour obtenir une autorisation administrative d’implantation d’une pauvre centrale à gaz naturel il faut pas loin d’une décennie, surtout si cette demande émane d’un concurrent d’EDF. Ne parlons pas de l’éolien dont aucun acteur important en Europe n’est implanté dans l’hexagone. Quand au photovoltaïque, rappelons tout simplement la manie administrative de devoir incorporer les modules au toit des maisons, ce qui accroît le coût de la pose d’un facteur trois ou quatre et rend impossible une standardisation des procédés.

 Alors que peut-on attendre du futur qui pourrait faire remonter ce solde et venir ainsi au secours d’une croissance économique mal en point. Tout d’abord une meilleure efficacité des centrales nucléaires. Les productions électronucléaires ce sont accrues de 9% aux mois de Juin et de Juillet par rapport aux mêmes mois de l’année précédente, annonce RTE. Il n’en fallait pas plus pour voir un solde des échanges progresser sur ces deux derniers mois (FIG.II).

Electricite-solde-mensuel

 La mise en route, cette année, de la centrale au gaz à cycle combiné de 2X436 MW Emile Huchet à Carling par E-On va sûrement permettre de mieux satisfaire aux appels de pointes. Malgré tout, la France a importé au mois de Juillet 2,3 TWh d’énergie électrique, moitié moins qu’en Juillet 2009.

 C’est malheureusement à peu près tout ce que l’on peut attendre de positif, alors que la date de la mise en route de la prochaine centrale EPR par EDF est repoussée au lointain. Les projets de centrales au gaz d’EDF à Blénod en 2011 et Martigues en 2012 semblent programmés. Quand à ceux de Poweo (Jonquières) ou d’E-On (Hornaing, Lacq) ils ne semblent pas être envisagés pour un futur visible.

 Ce n’est donc pas avec ses productions d’électricité que la balance commerciale de la France qui affiche un déficit de 31 milliards sur le premier semestre 2010, se rétablira dans un avenir proche.

LIRE le communiqué de RTE pour le mois de Juillet.

Le 21 Août 2010

Commentaires

6 réponses à “France, un exemple d’inefficacité: le solde des échanges d’énergie électrique”

  1. Avatar de Panneau solaire photovoltaique

    Merci pour cet article. Je ne savais pas que la France, malgré son parc nucléaire, était obligé d’importer de l’électricité en heure de pointe… Pourquoi le parc français est-il inapte à « fournir les appels de puissance » ?

  2. Avatar de Piotr
    Piotr

    Une solution pour retrouver un solde plus largement bénéficiaire : faire des économies d’énergies ! Mais c’est vrai, ca peut paraître ringard à l’époque des centrales nucléaires de 4ème génération.

  3. Avatar de Ray
    Ray

    Ivan, les articles des Echos sont de véritables comtes de fées pour abrutis. L’utilisation de l’unité de puissance qu’est la « centrale EPR » et qui est vendue comme un équivalent énergétique à des éoliennes en pleine mer est absolument scandaleuse. Même les lobbies de l’éolien ne la font plus celle là.
    Pour l’instant l’éolien offshore est tout petit et pas toujours opérationnel, même en Europe. Il existe de vastes projets dans les mers septentrionales, mais encore faudra-t-il trouver les financements qui devront être énormes pour quiller les turbines, les entretenir et rapatrier le courant à terre. Pour l’instant c’est Siemens qui mène la danse dans ce domaine et il ne prévoit au mieux que 70 GW à l’horizon 2030 ou 2035 …quand il y a du vent, 40% du temps en Mer du Nord. De tels projets ne sont acceptables qu’avec l’équivalent de centrales au gaz à cycle combiné à terre pour pallier les défaillances de production intrinsèques à l’éolien. En parallèle à l’éolien il faudra donc que l’Europe investisse dans la flexibilisation de sa génération thermique d’électricité…tout un programme.
    Alors lancer des appels d’offres, en imitant les Anglais, c’est de bonne guerre pour un ministre de l’écologie français en sous-emploi. C’est du vent!

  4. Avatar de I.Lucas
    I.Lucas

    @panneau solaire photovoltaique
    « Je ne savais pas que la France, malgré son parc nucléaire, était obligé d’importer de l’électricité en heure de pointe. »
    Le parc nucléaire est « normalement » utilisé en « base » cad 8000 h par an à pleine puissance.
    Cette situation est quasiment la règle dans tous les pays.
    D’autres moyens de production sont alors utilisés pour ce qu’on appelle la demi base (3 à 4000h de fonctionnement par an) ou la pointe.
    En raison de son sur équipement en centrale nucléaire, EDF
    – fait fonctionner certaines centrales (environ 1/3 du parc nucléaire) en « suivi de charge » cad que la puissance du réacteur varie entre 100% et 50% de sa puissance nominale
    – exporte de l’électricité nucléaire vers nos voisins
    Mais la France a également (2 ème spécificité) développé le chauffage électrique (70% des maisons neuves sont chauffées à l’électricité) ; cela fait que la courbe de charge varie plus que dans d’autres pays : on consomme plus d’électricité en hiver
    Au lieu de construire de nouvelles centrales qui auraient servies uniquement en hiver, EDF a préféré importer de l’électricité en hiver. Ce qui fait dire à certain que le contenu en CO2 de l’électricité utilisée pour le chauffage n’est pas de 180 gCO2/kWh comme l’évalue la note ADEME EDF de 2005 en faisant l’hypothèse de neutralité des importations et des exportations (autrement dit par nos exports on réduit les émissions de nos voisins en été et par nos imports en hiver, on les augmente) et le décret sur le Diagnostic de Performance Énergétique de 2006, mais de 500 à 600 gCO2/kWh (estimation par la méthode dite de la centrale marginale mise en route en France ou ailleurs, pour couvrir la demande) (note ADEME RTE de 2007)
    Le fait nouveau est la baisse de production des centrales nucléaires en 2009-2010, due à des allongements inhabituels des périodes de maintenance ;
    il en est résulté une baisse des exportations et une hausse des importations
    Le RTE donne toutes les informations sur les moyens de production, les émissions de CO2 et les exportations heures par heure
    http://www.rte-france.com/fr/developpement-durable/maitriser-sa-consommation-electrique/consommation-production-et-contenu-co2-de-l-electricite-francaise#mixEnergetique

  5. Avatar de Ray
    Ray

    Remarque: dans ce papier j’ai oublié de citer la future centrale à cycle combiné de 413 MW de Toul annoncée au mois de Juillet dernier par Poweo-Verbund et Siemens. Elle devrait être opérationnelle durant le premier semestre 2013.

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