La production de biocarburants est un sujet plein d’humour. C’est Poet, le premier producteur d’alcool de maïs des États-Unis, procédé tant décrié par les écolos bobos de salons, qui va être le premier à lancer une unité industrielle de production d’alcool à partir de déchets cellulosiques dès 2012, voie plébiscitée par les mêmes écolos. Quelles sont les raisons de cette apparente contradiction? Elles sont très simples.
1- Poet avec ses usines agricoles est au contact des paysans américains et sait organiser une collecte intelligente de matière première, très dispersée sur le territoire, qui sera finalement constituée de ballots de déchets divers de la culture du maïs (rafles, enveloppes, tiges, feuilles, collectés largement au-dessus du sol) que ce maïs soit destiné à l’alimentation ou à la production d’alcool. Initialement Poet envisageait de n’utiliser que les rafles.
2- L’investissement industriel dans une usine produisant déjà de l’alcool de maïs est marginal. En effet Poet ajoute une boucle au procédé déjà existant pour le rendre compatible avec deux produits entrants: les grains de maïs d’une part, riches en amidon, et les résidus cellulosiques d’autre part qui nécessitent des traitements enzymatiques plus profonds. Les deux process se rejoignent après la fermentation alcoolique avec des bières très concentrées provenant des graines et beaucoup plus diluées provenant de la voie cellulosique. Des « blends » intelligents conduiront à un « bourbon » dont la distillation sera acceptable économiquement
3-L’ensemble des deux process conservera son caractère agricole en raison de la contrainte spatiale de récolte des matières premières, comme le montrent les données de la filière cellulosique de l’usine d’Emmetsburg, Iowa (TAB.). Cette unité ne démarrera qu’en 2012, mais Poet va lancer dès cette année le stockage de matière première, si complexe à rassembler. La collecte en 2012 et au-delà des 300 mille tonnes de biomasse pour alimenter cette usine, nécessitera de mobiliser 300 à 400 exploitations représentant 1200 km2 de cultures de maïs. Le tout pour produire, en complément de la voie classique existante, dans les 1600 barils/jour d’alcool.
Mille deux cents kilomètres carrés de cultures pour alimenter une unité agricole qui représente le centième d’une raffinerie de pétrole, voici toute la problématique de la biomasse comme matière première énergétique. C’est la raison majeure qui explique le non décollage de ces technologies cellulosiques, énergétiquement trop diluées, incapables d’alimenter de façon opérationnelle une grande usine de transformation en alcool. Poet ironiquement va démontrer qu’en complément du procédé agricole existant, partant des grains de maïs, un complément cellulosique, provenant des récoltes existantes, est économiquement acceptable. Mais pour réaliser cela, il est nécessaire de fréquenter le monde paysan.
Bien sûr, tous ces procédés cellulosiques n’ont que bien peu de chance d’aboutir de façon significative dans une Europe de l’Ouest surpeuplée et largement exploitée, où ces procédés rentreraient en concurrence avec les marchés existants du bois, de la pâte à papier, de la paille ou d’autres filières. La nécessité de disposer de grands espaces mobilisables pour de nouvelles cultures est évidente.
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Le 27 Août 2010


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