Le rythme de la croissance industrielle en France illustre la perte de dynamisme de notre pays

 Dans un article de G. Kaplan, paru sur Causeur.fr, de façon cocasse intitulé « Désindustrialisation? Un bobard » il est montré de façon irréfutable que la France connaît une industrialisation soutenue. En effet en 2009 la valeur ajoutée chainée publiée par l’INSEE était « 570% plus élevée qu’en 1949 ». Mais, me direz-vous, ce blog n’est pas un haut lieu d’analyse de l’économie et il est normal que ses papiers sur le sujet soient assez schématiques afin que le lecteur lambda s’y retrouve. Alors essayons d’aller un peu plus loin dans l’analyse. Dans les faits entre 1949 et 2009 la croissance industrielle de la France a connu une loi de progression sensiblement linéaire, ce qui signifie que la croissance annuelle est allée globalement en régressant durant ces 60 années. Une analyse un peu plus fine (FIG.) permet de distinguer deux grandes périodes: l’une correspondant sensiblement aux trente glorieuses entre 1949 et 1979 où la croissance industrielle obéit à une loi exponentielle avec une progression moyenne annuelle de 5,7%. L’autre période que je nommerai plutôt « les trente foireuses » qui ont connu le triomphe du socialisme et de ses trente cinq heures, le principe de précaution, symbole si peu gaulliste s’il en est, les excès financiers en tous genres, la mondialisation loupée des échanges et l’endettement stupide des finances publiques de notre pays.

Valeur-ajoutée-industrie-INSEE

  La loi de variation de la croissance industrielle durant cette deuxième phase qui mériterait une analyse détaillée de toutes les stupides décisions prises par nos énarques et autres polytechniciens (Minitel, Plan Calcul, Industrie de l’Aluminium, Eolien, Génie Génétique, etc.), est alors beaucoup plus complexe puisqu’elle se termine par une décroissance de la production industrielle de plus de 12% sur la période 2008-2009.

 Un examen de la « reprise » industrielle comparée entre l’Allemagne et la France à fin Août oblige à être profondément pessimiste pour 2010 et les années à venir (FIG.II). Avec en 2010 un indice 92 base 2005, il faut attendre pour cette année une valeur ajoutée dans l’industrie autour des 226-228 milliards d’euros, bien au-dessous des 250 milliards de 2007. N’en déplaise à G.K.et ses analyses rustiques, la croissance industrielle est mal en point dans notre pays…et c’est bien dommage. Les déconvenues récentes dans le nucléaire et le TGV montent que même les activités prestigieuses sont menacées.

Prod-industrielle-Allem-France

VOIR l’article de G.Kaplan cité dans le texte.

Valeurs EUROSTAT du mois d’Août.

Le 13 Octobre 2010

 

 

Commentaires

10 réponses à “Le rythme de la croissance industrielle en France illustre la perte de dynamisme de notre pays”

  1. Avatar de Christian
    Christian

    Cher Raymond,
    Je suis désolé de vous dire je disconviens sur la conclusion à tirer. Certes, l’analyse semble solide. Toutefois, plusieurs remarques s’imposent :
    – il y a moins d’ouvrier dans l’industrie -secteur secondaire- et plus dans les services -secteur tertiaire- parce que les ouvriers intérimaires sont formellement employés de sociétés de service.
    – le minitel n’était pas une erreur : il a préparé les français à Internet et la bascule a été bien plus rapide que ce que l’on veut communément admettre.
    – je vous renvoie au blog de Michel Volle, spécialiste des technologies de l’information, concernant l’avènement d’une nouvelle chaîne de valeur : celle qui allie produit et service. Le téléphone vaut 1 euro (on vous l’offre, sa valeur industrielle est quasi nulle), mais l’abonnement vous fera cracher 29 euro par mois ; la voiture en leasing etc… Et je ne parle même pas du « B2B » : Areva qui traite le combustible ou le minerai des autres ne fait que « rendre du service », l’ingénierie, c’est du service. L’élément de la chaîne qui fait le plus de marge est le plus souvent le dernier : l’épicier gagne plus que l’agriculteur.
    On peut regretter que cela soit ainsi, qu’il s’agisse moins de matière et plus de « vent ».
    Mais regardez quelles sont les entreprises qui croissent le plus vite au monde aujourd’hui, et qui de fait ont les moyens -ensuite- de faire de l’industrie : Google, qui maintenant se lance dans l’électricité. Dans ce sens là. Pas le contraire.

  2. Avatar de Ray
    Ray

    Effectivement Christian le monde change, mais malheureusement Google n’est pas un Groupe français…et c’est bien dommage.
    Quand aux emplois intérimaires leur faible nombre (650 mille au plus haut en 2007) et leur plus faible variation (+350 mille en 10 ans) n’est pas de nature à expliquer l’ampleur du désastre industriel français.
    A part les blabla habituels et le crédit impôt recherche, je ne vois pas arriver les nouvelles mesures qui permettraient de créer le cadre favorable à une inversion du phénomène.

  3. Avatar de Dams
    Dams

    Aparté sur le minitel: effectivement je pense que cela n’était pas une erreur; par contre le défendre becs et ongles lors de l’arrivée d’internet nous a peut être mis en retard, et ça je pense était une erreur…
    Pour le reste je suis globalement d’accord:
    _ le pays se désindustrialise à fond (que ceux qui n’ont pas subi près d’eux des délocalisations lèvent le doigt)
    _ quand je vois les offres d’emploi j’ai un peu peur: on est en train de devenir un pays qui ne sait plus rien faire et qui va être peuplé de commerciaux vendant des produits importés
    _ il y a une différence entre « service inutile » et « service utile »; quand je vois le nombre d’intermédiaires inutiles dans notre pays (revendeurs…) Et ne surtout pas comparer cela à Google: eux font des choses utiles, voire formidables. Et c’est quelqu’un qui a longtemps travaillé dans le service qui vous le dit; d’ailleurs, après avoir proposé un logiciel pour automatiser une tâche fastidieuse, on m’a répondu: « si on fait cela, il faudra une seule personne sur le poste; là vous êtes 6. Nous profitons des dysfonctionnements du système ».
    Voilà comment raisonnent nos dirigeants: du pognon à tout prix, peu importe comment, peu importe le long terme. Ainsi va la France…

  4. Avatar de I.Lucas
    I.Lucas

    Tout à fait d’accord avec les conclusions en général, mais il faudrait nuancer certains points
    Le graphique porte sur une longue période :
    -la rupture du 2 ème choc pétrolier (1980) est manifeste ; elle est mondiale ; il suffit pour s’en convaincre de regarder l’évolution de la consommation mondiale de pétrole qui a une rupture de tendance
    -la dernière période de croissance importante qu’on ait eu, dans la période récente, sont les années 1996-2001, cad les années Jospin; le lien entre la croissance industrielle et la parité euro / $ est manifeste
    autrement dit : nous n’avons pas la structure industrielle d’un pays à monnaie forte….
    – depuis 2004, l’érosion est très rapide, elle est due aux délocalisations dans l’automobile et s’accompagne de déficits du commerce extérieur, qui avant la création de l’EURO auraient entrainés une dévaluation salutaire (voire les dévaluations compétitives récentes).
    le taux de R&D des industries F est plus faible que celui des industries de l’Allemagne -> les écarts devraient s’accroitre à l’avenir.
    les solutions possibles :
    au niveau européen l’Allemagne a le même rôle que la Chine au niveau mondial : ils ont créé un modèle de pays exportateur (en All. via la TVA sociale) qui a pour miroir les déficits des autres pays : l’Europe du Sud encore plus que la France.
    La zone euro est placée sur une trajectoire où elle peut exploser …
    A titre individuel, on peut copier les recettes de l’All. ; cela ne nous ferait pas de mal : TVA sociale + augmenter la recherche (publique car les firmes privées F ont un comportement de distribution de dividendes et donc d’érosion lente de leur potentiel

  5. Avatar de Boris
    Boris

    Autre solution plus efficace : faire comme les américains, du protectionnisme. Et envoyer paitre l’Europe des libéraux

  6. Avatar de Dams
    Dams

    Pourquoi pas… Mais alors pour éviter un protectionnisme pur et dur, un des moyens serait de mettre l’énergie « à son vrai prix »; le produit qui vient de l’autre bout du monde serait alors forcément plus cher, même si il est fabriqué (version cynique) par des petits enfants… Cf « Le plein s’il vous plaît », JM Jancovici…

  7. Avatar de I.Lucas
    I.Lucas

    @ Dams
    La consommation d’énergie d’un navire porte conteneur, ramené à la boîte de 40 pieds transportée (soit l’équivalent d’un semi remorque)est le ** dixième ** de celle d’un PL
    Autrement dit il faut la même énergie pour aller d’Espagne en Allemagne que de Chine en Allemagne.
    Il est illusoire de penser que la hausse du prix de l’énergie modifiera la donne mondiale.

  8. Avatar de Dams
    Dams

    1 point pour vous 🙂 Ceci dit si on est utopiste encore un peu plus (et il m’arrive de l’être) si on imagine que le ferroutage est développé en Europe…
    Ok, j’ai dit une bêtise… 🙂

  9. Avatar de Boris
    Boris

    Oui, d’accord, la taxe sur l’énergie consommée en transport et / ou le cout social des produits importés : le moyen pour l’UE d’avoir enfin de l’argent.

  10. Avatar de Christian
    Christian

    Taxe carbone et transport.
    Le même prix pour transporter de Chine en Allemagne (par bateau) que d’Espagne en Allemagne (par camion)… Peut-être.
    Mais où en Allemagne ? Il faut bien ensuite transporter de Hambourg à Munich… Ce qui représenterait autant à nouveau ?
    Et pourquoi ne pas faire Espagne-Allemagne par bateau ?
    Quid du train ?
    Tout ceci n’est qu’un aspect de la taxation énergétique. Le fond c’est aussi taxer ce qui est produit grâce à une base d’énergie charbon.
    (Ce qui devrait aussi impacter l’Allemagne, certes…)

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