Jouer une baisse conjoncturelle des cours du pétrole aux États-Unis à l’approche des élections présidentielles apparaît pour certains comme une opportunité. En effet la baisse des prix des carburants serait favorable à l’éventuelle réélection du Président américain sortant. Les princes dirigeants de l’Arabie Saoudite ne peuvent pas refuser un petit coup de pouce bienvenu à leur ami naturel de longue date, successeur au douzième rang du Président Roosevelt qui scella après Yalta l’amitié entre son pays et le pétrole arabe représenté par Ibn Saoud. Il est des alliances qui dépassent les décennies qui s’écoulent.
Mais ce devoir d’extraire du pétrole pour satisfaire les besoins du marché, malgré la baisse des productions iraniennes entravées entre autres par la rareté de navires pétroliers, assurés en Europe, les Saoudiens l’accomplissent depuis des mois avec application (FIG., échelles décalées de 5 millions de barils/jour)

De 8 millions de barils par jour produits en 2009/2010 par l’Arabie Saoudite les volumes extraits ont atteint les 9,7 millions de barils par jour selon l’IEA. Ces productions et leur modulation font de la sunnite Arabie l’arbitre incontesté du marché du pétrole mondial. Sorte de banquier central du pétrole affirment fort justement certains.
Remarque pour les lecteurs peu familiers avec ces volumes: ces près de 10 millions de barils saoudiens par jour doivent être rapportés aux 75 millions de barils de pétrole qui sont extraits quotidiennement dans le monde. Il ne faut pas confondre ces volumes de pétrole brut extraits avec les volumes de « liquides » consommés (90 millions de barils/jour) issus des raffineries qui englobent:
- le pétrole brut de départ,
- les gains en volumes des raffineries (autour des 2 à 3 millions de barils/jour). Le raffinage conduit de plus en plus à des carburants légers (gazole, essence) et donc plus volumineux, et de moins en moins à des fonds de barils lourds, grâce aux équipements modernes de conversion profonde.
- des biocarburants ajoutés aux carburants issus du pétrole (2 millions de barils/jour) et
- des condensats de gaz qui représentent entre 9 et 10 millions de barils/jour et qui sont une ressource importante en produits légers pour la pétrochimie (Gaz comprimés, naphta et essence). Ce sont donc près de 15 millions de barils/jour supplémentaires (20% du pétrole extrait) que génère le raffinage, les biocarburants et les condensats de gaz conventionnels ou non. Cette proportion ira en croissant avec la modernisation des raffineries, l’exploitation peu onéreuse des gaz de schistes et le développement des biocarburants.
Ne pas comprendre cette alchimie simple conduit à s’opposer à l’exploitation des gaz de schistes et à la synthèse de biocarburants ersatz de carburants de plus en plus onéreux.
Le Marché du pétrole semble découvrir qu’il n’y a pas aujourd’hui pénurie. Dans les faits le marché attribue une prime élevée à la menace potentielle de rupture d’approvisionnement toujours possible dans le climat branquignolesque politique et religieux du Moyen-Orient. L’extraction de pétrole qui obéit de façon exemplaire à la Loi des Rendements Décroissants, connaît des rentiers dans cette région politiquement incertaine et oblige les Groupes Pétroliers indépendants à investir lourdement et à prendre des risques dans des zones plus ingrates. C’est la raison majeure qui pousse le pétrole à se valoriser, sous la pression du jeu d’arbitrage contre dollar du pétrole papier sur le NYMEX ou l’ICE où s’échangent des milliards de barils fictifs.
Il semble de ce fait bien improbable qu’une « menace » de l’Arabie Saoudite de produire plus (au-dessus des 10 millions de barils/jour), dictée par l’Administration Obama, soit de nature à déprimer durablement les cours mondiaux du pétrole. Allez, parlons d’une possible légère détente des cours jusqu’à l’élection du futur Président américain…à condition qu’il n’y ait ni conflit inattendu, ni baisse subite du dollar ou hausse de l’euro. Une certitude: le pétrole pas cher pour tous n’est pas pour demain.
Le 22 Septembre 2012

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