Dans un exposé brillant, le Bordelais Jean Marc Daniel, s’inspirant des réflexions des économistes anglo-saxons de la fin du XIXème siècle devant le choc charbonnier constaté dans les années 1860, prédit la montée inexorable des prix des ressources énergétiques primaires et de la création de rentes au profit des monarchies pétrolières et de la Russie. Ce que n’auront pas su faire Poutine et ses prédécesseurs par le communisme, Poutine va le réaliser aux travers de fonds souverains russes qui vont accaparer le progrès technique mondial par le biais de la rente énergétique affirme non sans humour Jean Marc Daniel.
Les économistes du XIXéme siècle, s’ils s’étaient un peu mieux penchés sur les progrès techniques du moment auraient sûrement identifié, loin de l’Europe, là-bas en Californie, vers 1865, l’arrivée d’une nouvelle et formidable ressource énergétique: le pétrole qui allait largement se substituer au charbon. Cette constatation aurait sûrement permis à certain (Jevons) d’éviter de prévoir la fin du charbon dans le monde pour 1985. On notera également une sous-estimation par Jevons de la ressource charbonnière exploitable ailleurs dans le monde connu et identifié d’alors. Phénomène identique qui apparait de plus en plus de nos jours dans le cas du pétrole, au gré de chacune des nouvelles découvertes inattendues (Brésil subsal, huiles de schistes).
Les propos actuels tenus par nombreux prévisionnistes spécialistes du très rémunérateur catastrophisme mondain prônant une transition énergétique vers on ne sait quoi et annonçant la fin imminente des haricots et du pétrole, mais passant pudiquement sous silence la révolution américaine des gaz de schistes, n’est pas sans étrangement rappeler les propos échangés lors de ce choc charbonnier du XIXème. On assiste même à une opposition organisée à la prospection de ces gaz « nouveaux » qui menacent de reléguer les éoliennes les plus modernes au rang des ustensiles de cuisines dépassés avec les casseroles en alu et les moulins à café muraux de nos Grands-mères.
Il existe donc une première limitation à la montée sans borne des cours du pétrole: c’est la substituabilité compétitive des sources d’énergie. La faisabilité de poids lourds fonctionnant au GNL est démontrée (Volvo Truck), demain si les prix du gasoil à la pompe s’enflamment, c’est le gaz naturel qui se substituera au gasoil et autres fuel lourds sur les poids lourds et sur les navires. L’électrification des petits véhicules urbains en Asie et en Europe est en marche et s »accélèrerait. Ce phénomène participerait à la limitation de la demande en pétrole. Tout le monde sait que les technologies alternatives au pétrole dans les transports et dans la pétrochimie existent. Seuls les prix relatifs vont déterminer la vitesse dune probable substitution par le gaz naturel dont les ressources prouvées et potentielles sont abondantes.
Le pétrole ne sera un jour qu’une ressource énergétique hors de prix réservée aux applications les plus pointues comme base de kérosène majoritairement bio par exemple
Alors que de nombreux économistes distingués prédisent non sans raison un futur accroissement des prix mondiaux de l’énergie, l’expérience montre que c’est l’inverse qui se produit aujourd’hui aux États-Unis, tirés par la baisse des prix du gaz naturel qui se tiennent gaillardement au-dessous des 2.5 $/MMBTU et donc de l’électricité qui se commercialise au détail à moins de 100$ le MWh. La volonté d’indépendance énergétique de ce grand pays allège sa pression sur les ressources externes d’énergie. C’est un paramètre du premier ordre sur l’établissement des prix de l’énergie qui pour l’instant restent sages.
Inversement, le cas de l’Allemagne et ses velléités de quitter le nucléaire met l’Europe entière économiquement affaiblie en grandes difficultés énergétiques et la soumet à la rente russe. Entre machiavélisme et connerie en politique nous retiendrons comme le ferait spontanément Alain Madelin la deuxième option pour expliquer la décision incongrue de la chancelière, après Fukushima. Quitter le nucléaire en ce moment est la preuve d’une grande ignorance du monde de l’énergie pour un pays assis tout de même, excusez du peu, sur un formidable gisement de lignite dont nos écolos les plus purs et durs ne parlent jamais… pudeur sur les tares familiales oblige.
VOIR et ECOUTER l’exposé de Jean Marc Daniel grâce au lien de Tonton.
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