Le non épuisement des ressources pétrolières aux USA mettent à mal les prédictions erronées

 L’épuisement d’une ressource recherchée sur un territoire délimité nous apprend que ce phénomène présente une vitesse d’abord croissante (apprentissage, moyens croissants d’exploitation) puis passe par un maximum pour décroître ensuite avec l’épuisement de la ressource et tend vers zéro. Le virus d’une grippe sur une métropole où se déroulent de nombreux échanges et déplacement des populations, diffuse d’abord la maladie avec une fréquence croissante, puis le nombre d’individus non immunisés décroissant, il voit son agressivité se réduire et enfin quasiment disparaître. Ces phénomènes qui ont inspiré la célèbre théorie du peak-oil, hâtivement généralisée aux ressources mondiales de pétrole, de charbon ou de gaz, ont conduit à l’énoncé d’une évidence: les ressources énergétiques fossiles sont limitées et à celui d’un grand nombre de bêtises quantitatives dont les futurs historiens pourront se délecter.

  USA-extractions-cumulées

 Pour que cette approche mathématique soit pertinente il existe deux conditions nécessaires fondamentales:

1- que l’espace concerné soit fixe et exploitable: une île séparée en deux parties par une haute chaîne montagneuse interdisant tout échange de populations entre elles n’est pas pour une épidémie de grippe, un espace exploitable ce façon continue. Si vous projetez à toute la population de l’île les phénomènes grippaux qui se déroulent dans une des parties, vous allez raconter des bêtises et commander des vaccins en trop grand nombre.

2- que le processus d’exploitation de la ressource soit constant: une mutation radicale du virus en cours d’épidémie met en péril toute théorie initiale, le nombre de personnes immunisées retombant à zéro.

 Dans l’exemple choisi ici, de l’exploitation pétrolière aux États-Unis, les deux conditions fondamentales ne sont pas respectées. D’une part le territoire américain est scindé entre zones où l’exploitation pétrolière est autorisée et celles où elle ne l’est pas…encore (Exemple illustré par la carte: offshore sur la grande majorité des cotes américaines, réserves d’animaux sauvages en Alaska, partie Est du Golfe du Mexique, etc.). D’autre part, les techniques d’exploitation progressent à grands pas au cours du temps : offshore profond, forages horizontaux, fracturation hydraulique, recouvrement plus à fond de la ressource (EOR) par injection d’eau et maintenant par injection de CO2. Ces progrès rendent le recouvrement du pétrole plus efficace et élargissent la zone de prospection aux zones offshore de plus en plus profondes et autrefois inaccessibles, « les U.S.A. du pétrole s’agrandissent ».  De plus, l’accroissement des prix du pétrole rendent ces techniques éminemment rentables et donc appliquées largement.

USA-zones-interdites-prospection-2008

 Il résulte de ce constat simple et de bon sens qu’il est totalement illusoire de vouloir prédire à partir de l’historique des extractions de pétrole aux USA entre le milieu du XIXème siècle et 1970, année où les productions sont passées par un maximum vers les 9,6 millions de barils/jour, ce qui va se produire au XXIème et XXIIème siècle dans le domaine. Au maximum de 1970 correspondait une production cumulée de 95 milliards de barils de pétrole. Si l’industrie n’avait pas modifié depuis ce temps ses méthodes d’extraction, le pétrole américain connaîtrait une production équivalente à celle de 1930 (symétrique de 2010 par rapport à 1970, FIG.II flêche verte), soit autour de 2,5 millions de barils/jour et la production cumulée se rapprocherait dangereusement des 190 milliards de barils ultimes prévus par les équations (FIG.I).

USA-extractions-annuelles

  Mais aujourd’hui la production américaine de pétrole après 202 milliards de barils extraits est en pleine forme à 5,6 millions de barils par jour ce qui fait dire à Stuart Staniford sur son Blog que la courbe du peak-oil n’est pas symétrique: il constate que la production américaine ne suit plus la théorie qu’il a si longtemps défendue et affinée et qui lui avait permis de prédire en Janvier 2006 des réserves ultimes (URR) américaines à 219 + ou – 8 milliards de barils alors que les productions cumulées à fin 2005 atteignaient 192 milliards de barils. Le monde était alors en plein délire peak-oileur. Les hypothèses sous-tendues par cette approche théorique n’étaient pas alors respectées dans la pratique et Stuart qui est un homme objectif et estimable, parle maintenant d’un très long plateau.

 Jusqu’à quel volume cumulé iront les extractions de pétrole américaines? Nul ne le sait, il faudra sûrement attendre le XXIIème siècle après que les gisements offshore de toutes les cotes américaines jusqu’à l’Arctique auront été découvertes et exploitées.

 Dix pour-cent des 4000 milliards de barils de réserves ultimes mondiales imaginées par Richard Nehring cela ferait une contribution autour des 400 milliards de barils de pétrole extraite du territoire américain. Il resterait dans cette hypothèse encore un siècle d’extraction de pétrole aux U.S.A. au rythme moyen annuel actuel de 2 milliards de barils par an. Cela ferait une très longue queue après le mémorable pic de 1970.

Le 12 Juin 2011

Commentaires

18 réponses à “Le non épuisement des ressources pétrolières aux USA mettent à mal les prédictions erronées”

  1. Avatar de an391

    Vous nous fatiguez avec cette manie de qualifier le oil production peak de « théorie », Raymond, il n’y a là qu’une bête réalité mathémathique niveau terminale maths sup tout au plus.
    Bien sur en ce qui concerne la date ou le niveau de prod après, pas des mathématiques dans ce cas.
    Mais cessez un peu de faire votre chochotte

  2. Avatar de Ray
    Ray

    an391, si mes écrits vous fatiguent allez donc somnoler mon vieux.
    J’espère que vos avez bien compris que ce ne sont pas des équations dont je parle ici, mais des hypothèses de base erronées de cette utopie qui a mobilisé en vain tant de bons esprits.
    Un excellent Staniford qui rend les armes…mérite une chronique.

  3. Avatar de an391

    Le peak oil est une « utopie » maintenant, vous avez vraiment un problème, enfin bref bien à vous …
    Quant à Staniford c’est l’un de ces niaiseux qui croit à la « singularity », les machines qui deviennent intelligentes sans que l’on s’en rende compte, lol … et sinon qui fait ses petites statistiques ressérées, pas grand intérêt …

  4. Avatar de Ray
    Ray

    an40, toujours aussi grande âme avec les réflexions des autres et merci pour votre aimable jugement sur Staniford qui ne peut pas vous répondre dans notre langue archaïque.
    L’utopie n’est pas dans la fin de la ressource, elle est dans la prétention pseudo-mathématique d’en prédire la date proche, changeante et menaçante à partir des données passées…alors que nul ne sait quelles seront les réserves ultimes.
    Alors pour vous an40 c’est pour quand la fin du pétrole et des haricots? 2022? 2033? Entre les deux?

  5. Avatar de an391

    Le pic, maximum de production, est très clairement actuellement, quant à Staniford, déjà eu l’occasion d’en discuter avec lui. Vous trouvez le français archaique ? Encore un petit franchouille avec un complexe d’infériorité, dommage …

  6. Avatar de Ray
    Ray

    Alors c’est pour quand la fin?

  7. Avatar de an391

    Pas la peine de faire le gros bêta

  8. Avatar de René GRAU
    René GRAU

    Bjr, pour l’instant toutes les prévisions pessimistes (genre ASPO et consorts) ont été déjouées, les Pétroliers ayant l’art de trouver de nouvelles ressources ou de tirer « plus de jus » des champs connus. Finalement, nous connaitrons le Pic de production ( ou le Plateau ondulant) quand il …sera passé! A noter que Pic ou Plateau de production ne signifie pas qu’il n’y aura plus de pétrole mais que tout appel supplémentaire ne pourra être satisfait. A noter aussi que le niveau du prix du baril est lié à la « spare capacity » ( excédent de capacité de production), par le prix à t donné on peut estimer celle-ci. Selon mes calculs elle est de 4 millions de barils/j + la Libye qui reviendra un jour sur les marchés.(Cependant que tous les bruts ne sont pas équivalents).

  9. Avatar de René GRAU
    René GRAU

    Encore un mot pour féliciter et encourager Raymond pour son blog que je suis avec grand intérêt. Merci Ray pour tes papiers quotidiens.

  10. Avatar de I.Lucas
    I.Lucas

    Pour départager les intervenants qui semblent très passionnés, il faudrait indiquer la précision d’une telle modélisation : il est illusoire d’espérer une précision meilleure que +-20%.
    Par ailleurs, les régressions sont meilleures si on introduit un progrès technologique, ce que ne fait pas Lahérere ; mais faut il le faire dépendre du prix? ou simplement du temps?
    Ce type de modélisation est trop grossier pour pouvoir trancher entre ces deux hypothèses.
    Appliqué aux USA, cela donne des écarts importants, comme l’indique Staniford
    Appliqué au monde, cela conduit à une très faible croissance de la production de pétrole, avant un pic très large vers 2020-2025.
    C’est, pour nous, un changement majeur.
    Le FMI s’est penché sur les conséquences sur la croissance mondiale du futur pic pétrolier : http://www.imf.org/external/french/pubs/ft/weo/2011/01/pdf/textf.pdf

  11. Avatar de an391

    @René Grau, c’est faux, les prévisions d’un Campbell ou Jean Laherrère sont tout à fait dans les crans (comme l’étaient d’ailleurs celles de Hubbert pour sa prévision du peak US)

  12. Avatar de Ray
    Ray

    Lucas, vos + ou – 20% me semblent un peu étriqués. Entre les hypothèses des peakoileurs historiques et ce qu’avance Richard Nehring il y a plutôt une différence du simple au double ou du simple au triple.
    Les hypothèses du peakoil ne tenaient pas la route parce qu’elles n’intégraient pas l’accroissement du domaine exploitable avec l’offshore profond ni la progression spectaculaire du taux de récupération de la ressource, sans oublier les huiles lourdes du Venezuela, du Canada et de la Russie et les condensats des gaz conventionnels ou non conventionnels.
    Il est vrai que par itérations successives, intégrant peu à peu les nouvelles données techniques et géographiques, la prévision en s’étoffant deviendra de moins en moins farfelue.
    Mais le très large « pic », qui en français s’appelle un plateau, pourra durer 5 ans d’après vous ou plus de 70 ans d’après moi.
    Vu des âges géologiques la différence de nos points de vue est insignifiante.
    Dans tous les cas la substituabilité des sources d’énergie jouera à fond et le monde des transports consommera de l’électricité, du gaz naturel et un mélange de produits pétroliers plus ou moins synthétiques et d’ersatz divers qui rendront le débat actuel totalement abscon. Les prix des carburants auront fait faire de formidables progrès dans la réduction des gaspillages et la progression de l’efficacité énergétique des processus.
    Le premier exemple à venir significatif va être celui du carburant pour les avions qui pour réduire les émissions de CO2, va être un mélange 50/50 de kérosène et de produits synthétiques plus ou moins terpéniques issus des huiles de palme ou du sucre brésilien. Les pétroliers s’en occupent.

  13. Avatar de René GRAU
    René GRAU

    an 391, je ne vais pas polémiquer avec vous, voici donc la conclusion de l’article cosigné Campbell/ Laherrère : »Using several different techniques to estimate the current reserves of conventional oil and the amount still left to be discovered, we conclude that the decline will begin before 2010. »

  14. Avatar de Benkebab
    Benkebab

    Tout ça pour ça?
    La courbe du peak oil telle que décrite par Hubbert était symétrique car ces hypothèses étaient simplistes, c’est tout. Comme vous l’avez identifié il n’a pas pris en compte 1) l’évolution technologique des moyens de production, qui permettent d’aller gratter toujours un peu plus loin et 2) l’augmentation de la zone exploitable (nouveau champs, offshore profond, sources non conventionnelles, etc.). Bravo, vous nous avez éclairé sur la théorie du peak oil des années 70, avec tout le recul dont vous disposez aujourd’hui. Chapeau! Et pour dire quoi au final?
    « La courbe n’est pas symétrique. »
    La belle affaire! Alors maintenant nous voilà reparti pour combien d’années de branlette statistique, pour savoir si aura un plateau stagnant, une pente douce, etc, etc?
    La théorie du peak oil est issue d’un simple constat physique, ce n’est pas une « utopie ». La production annuelle mondiale passera par un maximum. Prédire à quel rythme la production baissera ensuite est un exercice périlleux, et je ne m’y risquerai pas. Libre à vous de vous gausser de ceux qui l’ont fait, mais à ce jeu là on pourrait bien rigoler des prédictions climatiques, financières, économiques, etc. qui sont sorties ces dernières années…

  15. Avatar de Ray
    Ray

    Ah Benke toujours précises vos démonstrations. Irréfutables!

  16. Avatar de an391

    @René, et je vous signale qu’ils parlaient de crude (conventional oil), et que l’AIE, qu’il serait difficile de qualifier de pessimiste, (voir par exemple les schémas montrant leurs prévisions se réduirent d’année en année, cad tjrs trop optimistes), a annoncé dans son dernier rapport que le peak du crude avait été passé en 2006.

  17. Avatar de René GRAU
    René GRAU

    Bjr an391, 1)quand l’article a été publié, cad en 1998 crude oil et oil all liquids étaient synonymes, comme j’avais lu cet article et l’avais pris pour argent comptant – càd plus d’offre supplémentaire possible vers 2005 selon le schéma accompagnant le texte – eh bien! je me suis senti floué. 2) prévoir la date du peak oil conventionnel ne présente pas grand intérêt dans la mesure où il y a toutes les autres formes de liquides comme énoncées supra par Ray. Le site du canadien Freddy Hutter recense plusieurs dizaines de prévisions, il n’y en a pas 2 identiques! Je prends ces prévisions avec le même sérieux que les prédictions astrologiques. (Mais rassurez-vous, un jour le plateau arrivera forcément).

  18. Avatar de an391

    @René,
    Bonjour, pas vraiment envie de me chamailler à ces sujets, mais justement le terme utilisé dans la citation de l’article que vous donnez est « conventional oil », ce qui à mon avis cadre bien le propos.
    Cordialement.

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