OCDE: vers une évolution différenciée des consommations d’énergie

 Parier sur l’évolution des consommations d’énergie dans le monde pour les décennies à venir est un exercice périlleux. Il est même quasi certain que tout ce qui est annoncé aujourd’hui par les Agences de tous poils se révèlera farfelu le moment venu. Qui peut pronostiquer d’une évolution future sans à-coups de l’économie de la Chine et de ses voisins asiatiques qui voient les inégalités s’accroître, les libertés individuelles peu évoluer et la machine économique engloutissant d’énormes quantités de matières premières en recrachant à bas prix ses déchets? Qui peut parier sur une stabilité politique sans faille des grands pays pétroliers du Moyen-Orient ou de l’Afrique? Il est par contre un exercice plus aisé et qui n’est pas toujours bien traité qui concerne l’évolution prévisibles des consommations d’énergie des pays de l’OCDE, essentiellement riches, aux activités industrielles traditionnelles souvent délaissées au profit de l’Asie et aux populations plutôt vieillissantes et de plus en plus urbanisées.

 Afin d’éviter de tomber dans le pot-pourri des statistiques énergétiques globales il me semble plus pertinent d’examiner deux paramètres: la consommation de pétrole (transport, pétrochimie) et la consommation d’électricité (activités urbaines, électrométallurgie, industrie). Les données utilisées sont issues du dernier rapport BP 2011 et des données de PIB à prix constants, CVS, de l’OCDE.

I- Les consommations de produits pétroliers et autres biocarburants décroissent fortement depuis 2005:

OCDE-liquides-PIB

 Un examen des consommations de produits pétroliers et de biocarburants issus des raffineries (« liquides ») entre 1990 et 2010 montre que cette consommation durant le début des années 90 était étroitement corrélée aux variations du PIB (0,3 Mbl/jour par point de PIB). Cette consommation a atteint un maximum en 2005 à 50 millions de barils/jour pour une consommation mondiale de 84 millions de barils/jour à cette époque. En raison de la montée des prix du pétrole avec l’arrivée de la croissance chinoise depuis 2004, les consommations en 2006 et 2007 ont commencé à décroître pour en 2008 chuter à 48 millions de barils/jour sous l’impact de l’envolée des cours cette année là et de la stagnation du PIB. En 2009 en raison de la crise économique, la consommation des pays OCDE a reculé de 2 millions de barils/jour supplémentaires. 2010 marque une légère reprise et 2011 avec la lente reprise économique aux États-Unis et en Europe devrait confirmer cette tendance et aller friser les 47 millions de barils/jour. En dehors de ce processus de rattrapage d’après crise il faut anticiper dans les pays de l’OCDE une baisse tendancielle des consommations de pétrole durant les décennies à venir.

 Le principal paramètre qui va agir sur cette consommation sont les prix des carburants qui dépendent à la fois des cours du brut, des marges de raffinage et de distribution et des taxes appliquées par chaque pays. La certitude partagée d’une faible marge disponible de production supplémentaire de pétrole, la fragilité politique des régimes de certains pays producteurs, la nécessité pour de nombreux États des pays de l’OCDE d’accroître leurs rentées fiscales et de limiter les déficits, laissent à penser que la pression des prix à la pompe sur les consommations va se poursuivre. Cette pression s’exerce surtout sur les baisses de consommations à moyen-terme avec l’arrivée sur le marché de véhicules toujours plus économes en carburants.

 Remarque: la montée en puissance des biocarburants non abordée ici, participe également à la baisse des consommations de produits pétroliers.

II – Les productions d’électricité accompagnent la croissance du PIB:

OCDE-électricité

 Il avait été montré ici que les consommations d’électricité aux États-Unis tout comme en France étaient directement reliées au PIB. Il en est bien sûr de même pour l’ensemble des pays de l’OCDE. Il est possible d’estimer cette relation en 2011 aux environs de 47 TWh par point de pour-cent de PIB (FIG.II). Pour une croissance moyenne en volume du PIB de l’ordre de 2,5% par an, il faut donc prévoir une croissance de la consommation d’électricité des pays de l’OCDE de l’ordre de 120 TWh par an. Ceci représente l’énergie générée par 5000 éoliennes de 6 ou 7 MW en mer du Nord (3500 heures par an) ou de façon plus réaliste, de 34 générateurs thermiques de 500 MW fonctionnant 7000 heures par an.

  Cet exemple de l’OCDE montre que les évolutions de consommations d’énergie dépendent beaucoup du type d’énergie examinée. Les consommations de pétrole plombées par la montée des prix à la pompe décroissent avec des véhicules à l’efficacité énergétique accrue, un parc automobile stable et des trajets moyens plus limités. A l’inverse, les consommations d’électricité dans un contexte de plus en plus urbain et communiquant suivent la croissance du PIB.

Le 12 Juin 2011

 

Commentaires

2 réponses à “OCDE: vers une évolution différenciée des consommations d’énergie”

  1. Avatar de Tonton
    Tonton

    L’OCDE recouvre une vaste réunion de pays avec des caractéristiques assez différentes, du point de vue de la consommation d’énergie bien sûr, mais aussi de la démographie.
    Dans les constats que vous faites (le pétrole en baisse tendancielle, l’électricité en hausse continue), si le premier est vrai de manière générale (et souhaitable) on peut

  2. Avatar de Tonton
    Tonton

    (suite…)
    On peut se demander si le second est complètement étayé. L’exemple de l’Allemagne est assez flagrant : même en tenant compte de la baisse tendancielle de sa population (immigration, faible, y compris) de près de 0,2% entre 98 et 2010, son efficacité énergétique sur l’électricité a rendu moins corrélée son augmentation de PIB à sa consommation d’électricité. Des tarifs 25% plus élevés que ceux des française ont certainement aidés, pendant que les Allemands consomment 25% de moins sur l’électricité spécifique des équipements ménagers.
    Est-il possible de décorréler le PIB de la consommation d’électricité ? Grand défi.

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