Le rallye sur les cours du pétrole a-t-il réellement démarré?

 Une longue phase de remontée des cours du pétrole basée fondamentalement sur les rendements décroissants de son exploration-production et d’une demande mondiale soutenue, est trop importante pour les acteurs financiers et pour être retardée trop longtemps, après une longue période d’oscillation entre les bornes 70-80 dollars/baril. Les centaines de milliards de dollars en jeu, provenant de la poche des consommateurs, sont trop alléchantes pour les banques d’affaires et autres « hedgeurs ». Contrairement aux marchés plus étroits des métaux non-ferreux1 ou des céréales où quelques poignées de riches acteurs peuvent manipuler les cours, celui du pétrole de par sa taille demande pour amorcer un rallye un consensus plus large d’un très grand nombre d’acteurs. Cette contrainte dimensionnelle explique la longueur des tractations préalables au démarrage de toute phase spéculative de longue haleine, souvent agrémentées de faux-départs dévastateurs. La spéculation sur le pétrole est en retard mais les troupes impatientes se préparent au déferlement rémunérateur.

 Au cours de ce second semestre nous assistons à une remontée des cours du pétrole largement alimentée par la baisse globale du dollar. Au cours du mois de Novembre, la remontée du dollar liée à la très sombre vision des comptes de l’Europe par les acteurs américains, les cours du pétrole ont profité d’un effet cliquet avec de faibles baisses (FIG.) anticipant un retournement de la tendance sur les cours du dollar. Le retour de l’USDX aux 80$ ne s’est pas concrétisé par un retour du baril à 80$. Ces deux derniers jours la remontée rapide des cours du Brent au-dessus des 90 dollars/baril accompagnant le retournement de tendance sur le dollar contre les autres monnaies (courbe verte), confirme la volonté de plus en plus évidente des acteurs à engager un rallye de longue durée sur le pétrole.

Cours-BRENT-USDX

Remarque: le suivi du Brent plutôt que celui du WTI, se justifie par la prime autour des 2 dollars dont il profite en raison d’une plus grande fluidité du marché physique européen.

 Les conséquences d’une probable valorisation des cours du pétrole, outre l’enrichissement des intermédiaires pétroliers et financiers, sera un appauvrissement des pays consommateurs qui tendront à moins consommer et un enrichissement des pays producteurs qui généralement recycleront la manne pétrolière en armes de guerre ou en possession de capitaux dans les pays de l’OCDE.

 Rappelons que pour un prix moyen du pétrole importé autour des 77 dollars ou 57 euros (INSEE), en cumulé sur 12 mois mobiles, la France connaît un déficit du commerce extérieur en produits pétroliers de 35 milliards d’euros à fin Septembre. Une évolution progressive des cours du baril vers les 130 dollars ou les 100 euros portera, toutes choses égales par ailleurs, ce déficit annuel vers les 60 milliards d’euros. Il apparaît comme vraiment urgent pour la France d’accélérer sa politique de restriction du gaspillage énergétique en particulier dans le domaine des transports. Cela passe par un renchérissement drastique des prix des carburants et une dissuasion des consommateurs à posséder des monstres énergivores. L’intensification de l’utilisation des biocarburants de toutes origines doit également être activement promue. Le passage des poids lourds au gaz naturel comprimé ou liquéfié en mélange au gasoil devrait faire l’objet de programmes prioritaires de développement.

Ce qui est vrai pour notre pays dans ce domaine, l’est également pour la quasi-totalité des pays européens.

1- On lira avec intérêt le papier du WSJ du 7/12 qui explique le rôle présumé de la banque J.P. Morgan Chase sur le marché du cuivre. Cette dernière, une des 12 acteurs de premier rang au LME, possèderait selon le Daily Telegraph, en compte propre et surtout pour ses clients, plus de la moitié des 350 mille tonnes de cuivre stockées à Londres! Un peu plus d’un milliard de dollars.(LIRE)

Le 4 Décembre 2010

Commentaires

3 réponses à “Le rallye sur les cours du pétrole a-t-il réellement démarré?”

  1. Avatar de I.Lucas
    I.Lucas

    Il ne faut pas oublier que 25% de notre consommation de pétrole est liée au chauffage! La France est totalement dans la moyenne mondiale.
    Il est plus facile de changer d’énergie dans des utilisations fixes que dans les transports.
    Vers la fin prochaine du chauffage au fuel?

  2. Avatar de Ray
    Ray

    La part du fuel domestique en France représentait 15% des consos de produits pétroliers en 2007 et 17% en 2008 nous indique l’INSEE. Mais effectivement Lucas c’est encore très important et l’adoption d’une autre forme d’énergie serait des plus pertinentes. Mais souvenez-vous de la prime à la cuve inventée récemment, œuvre charitable de l’État Providence!!! Que de conneries…!
    http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?ref_id=NATnon11329&reg_id=0

  3. Avatar de I.Lucas
    I.Lucas

    mea culpa
    les 25% que j’ai cité, sont relatifs aux usages énergétiques, hors transports
    donc couvrent des usages énergétiques dans
    – l’industrie
    – l’agriculture (ce qui couvre d’autres usages que le carburant des tracteurs)
    – et le chauffage dans le secteur résidentiel tertiaire
    ce dernier secteur ne représente en effet que 15% des usages

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