Les discussions écologiques de salons ne remplacent pas la dure réalité économique des marchés. Prenons l’exemple de l’éthanol américain pour illustrer ce propos.
L’administration Bush, incapable d’élaborer un plan cohérent d’économie et de diversification des sources d’énergie, a trouvé un « truc » politiquement correct : subventionner la production locale d’éthanol à partir de maïs.
C’était à la fois un bon plan pour l’électorat, plutôt Républicain, du Middle-west, et d’autre part, une belle aubaine pour les industriels et les financiers.
Avec la connaissance du projet d’arrêt de l’utilisation du MTBE (Methyl tertiobutyl éther), trop polluant car difficilement biodégradable et abandonné en Avril 2006, les usines de fermentation et de distillation d’éthanol se sont mises à pousser comme des champignons.
De 56 en 2001, leur nombre est passé à 132 en 2007 et 79 de plus seraient en construction d’après « l’American Coalition for Ethanol ». Un vrai Eldorado.
D’après le Department of Energy, les productions de « fuel ethanol » ont été multipliées par plus quatre en sept ans (FIG. I) en passant de 100kbl/d en Août 2000 à 421 mbl/d en Juillet 2007. Les capacités installées de production aux U.S.A. sont de 447000 barils par jour, celles en construction seraient de 373000 barils par jour
.
Mais voilà, même les rêves américains peuvent, eux aussi, parfois, mal tourner. Le cours du boisseau de maïs, encouragé par la demande, s’est apprécié, passant de 2.5$ en 2006 à une fourchette de prix comprise entre 3.25$ et 4.25$ cette année .
Mais durant cette même période, les prix du « fuel éthanol » se sont écroulés, passant de près de 2.5$/gallon à fin 2006 à 1.5$/gallon aujourd’hui. Formidable effet de ciseau pour les bouilleurs de cru locaux.
Alors, c’est la crise financière. Les plus faibles vont déposer le bilan et se faire absorber par les gros, les projets d’augmentation de production vont être repoussés ou annulés. Les experts boursiers prévoient des achats à bon compte, par le numéro un du secteur, Archer Daniels Midland, de ses concurrents beaucoup plus petits. En effet, l’industrie pétrolière US ne se bouscule pas pour mélanger de l’éthanol à l’essence, la logistique fait défaut, l’éthanol corrode les pipe-lines. Les hommes politiques du Congrès pourraient intervenir, mais la montée impopulaire des cours du maïs et des prix des produits de consommation courante liés à ceux du maïs, les rend très prudents.
Bien sûr tout cela reviendra, un jour, dans l’ordre, mais on voit là, les écueils d’une approche interventionniste étatique maladroite. Elle a poussé, à force de subventions, à produire à tout va un alcool complexe à mettre en œuvre, sans vérifier que l’aval était prêt à absorber le surcroît de production. De plus, la subite demande à fait grimper les cours de la matière première, le maïs, rendant ainsi la production d’alcool non profitable et hautement impopulaire aux USA.
Une consolation : les cours de l’éthanol sont maintenant inférieurs à ceux de l’essence, ce qui devrait stimuler son utilisation et la résolution des problèmes de logistique.
Le produit idéal, comme ersatz de l’essence, reste à définir. Mais on peut déjà mentionner dans son cahier des charges qu’il devrait être économiquement compétitif sans subventions, produit à partir de produits cellulosiques non alimentaires et être moins polaire que l’éthanol pour pouvoir être incorporé à l’essence au départ des pipe-lines, ce qui simplifierait les problèmes de logistiques et de mise en œuvre, l’éthanol devant être mélangé à l’essence juste avant sa distribution au détail. Certains, comme D. Ramey et Shang-Tian dans l’Ohio, travaillent dans ce sens sur la biosynthèse du butanol. BP et DuPont ont également un projet pilote de synthèse de biobutanol. Mais c’est une autre histoire, on en reparlera.

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