De moindres déboisements en 2008 expliqueraient partiellement la monotonie de la croissance de la teneur moyenne annuelle en CO2 dans l’atmosphère

Il est une observation assez évidente à faire depuis quelques années: malgré la forte croissance des émissions de CO2, dues au développement économique de la Chine, qui a marqué une nette accélération à partir de 2002-2003, résultat de la combustion de charbon dans les centrales électriques et les aciéries chinoises, la moyenne annuelle de la teneur en CO2 dans l’atmosphère à poursuivi une croissance monotone. Cette observation n’empêche paradoxalement pas certains auteurs d’expliquer que les océans ont de plus en plus de mal à absorber du CO2 et qu’ils auraient même tendance à en rejeter plus dans les régions équatoriales, là où remontent les courants chargés de gaz carbonique.

Pour quantifier les émissions annuelles anthropiques de CO2 il faut considérer deux familles de paramètres. La première famille est constituée des émissions aisément quantifiables telles que la combustion des énergies fossiles et la production mondiale de ciment. La deuxième famille beaucoup plus difficile à cerner et à quantifier provient des modifications par l’homme de l’utilisation des terres (LUC ou Land Usage Change). L’exemple le plus parlant est la déforestation des régions tropicales et équatoriales. Or ces émissions LUC qui étaient admises avec une grande incertitude comme étant de l’ordre de 5,5 milliards de tonnes de CO2 par an ont été revues à la baisse en 2008 en raison d’une moindre déforestation en Asie et dans l’Amazonie. La meilleure estimation pour 2008 serait de 4,4 milliards de tonnes de CO2 toujours avec le même niveau d’incertitude à + ou – 2,5 milliards de tonnes près. Les émissions LUC ne représenteraient plus que 12% des émissions anthropiques (FIG.I).

FIG.I Les rejets de CO2 anthropiques annuels subissent à la fois une accélération des rejets liés à la combustion des énergies fossiles et un ralentissement récent des déforestations

Rejets-anthropiques-1980-2008 

Les scientifiques en charge de prévoir l’impact des émissions de GHG sur le climat sont donc fortement handicapés par cette difficile appréciation des variations annuelles d’émissions anthropiques de CO2. Si l’on en croit les données d’entrée de 2008, la baisse des émissions dues au LUC de 1,1 milliard de tonnes de CO2 aurait largement compensé la croissance des émissions fossiles mondiales, estimées à 0,6 milliards de tonnes par l’Agence de l’Environnement Néerlandaise. Mais peut-être que la valeur du LUC en 2007 avait elle aussi déjà décru? Compte tenu de toutes ces incertitudes il est possible de reconstituer un profil de rejets, illustré dans la FIG.I (courbe verte). Les émissions chinoises de CO2 sont encore nettement marquées à partir de 2002.

Pour la suite il sera utile de disposer du rapport entre émissions de CO2 et teneur totale de CO2 dans l’atmosphère terrestre. Cette quantité annuelle est obtenue en multipliant la teneur moyenne annuelle en CO2 en ppm par 1.77 10+14 moles de CO2 soit 7,8 milliards de tonnes. La teneur totale en CO2 dans l’atmosphère a varié de 2640 milliards de tonnes en 1980 à 3000 milliards de tonnes en 2008.

Mais quel a été l’effet de ce changement de pente de l’ampleur des rejets annuels de CO2 sur la teneur en dioxyde de carbone dans l’atmosphère. Et bien, il n’y a eu aucun effet perceptible (FIG.II). L’équation de la corrélation quadratique depuis 1993, présentant un coefficient de corrélation de 0.999 avec la courbe permet de calculer pour chaque année la pente de cette courbe et donc la variation lissée de la teneur en CO2 dans l’atmosphère. La division de cette valeur en chaque point par la teneur mesurée permet d’obtenir la variation annuelle lissée de la teneur en CO2 en pourcents. Cette méthode permet de s’affranchir des fortes variations annuelles de progression de la teneur en CO2, attribuables à des effets non récurrents. La courbe de corrélation conduit à 400 ppm moyens en 2015 et aux 450 ppm tant redoutés vers 2034.

FIG.II : la teneur en CO2 moyenne annuelle de l’atmosphère progresse de façon quadratique. La courbe de corrélation depuis 1983 donne une bonne approximation d’une variation dépouillée des aléas annuels peu significatifs

Teneur-atmosphere-CO2-1980-2008

Disposant de la variation annuelle des émissions de CO2 et de la variation annuelle de la teneur en CO2 dans l’atmosphère, il est aisé par un rapport des deux valeurs de calculer la fraction atmosphérique (FIG.III). Cette fraction du CO2 restant chaque année dans l’atmosphère a crû jusqu’en 2002 pour atteindre un maximum de 0,49, mais depuis cette date une plus grande partie du CO2 émis est absorbé par les terres et les mers. Cette absorption s’est élevée à 55% du CO2 émis en 2008 (aE=0,45). 

FIG.III La fraction atmosphérique est obtenue par le rapport de la croissance annuelle lissée de la teneur en CO2 dans l’atmosphère et de celle des rejets annuels exprimés en pourcent du CO2 atmosphérique total

Fraction atmospherique-1993-2008

La question que l’on doit se poser est de savoir si cet effet est passager ou bien s’il existe des rétroactions attribuables à la montée de la teneur en GHG ou à d’autre paramètres extérieurs tel que l’irradiance solaire qui pourraient expliquer une possible inversion de tendance. Il a été avancé plusieurs hypothèses ici pour expliquer ce phénomène telles que la croissance de la pression partielle, l’accroissement de la dissolution dans l’arctique en raison de la fonte de la banquise durant les 4 mois d’été, l’existence de surfaces océaniques locales plus froides, l’accroissement des précipitations, etc. 

Mais ces fractions ne parlent pas de façon très claire, il est bien préférable de revenir aux milliards de tonnes de CO2 (FIG.IV). Alors qu’avant 2002 les terres et les mers absorbaient annuellement dans les 16 milliards de tonnes de CO2, il apparaît que depuis 2006 la nature se débrouille pour en absorber 20 milliards de tonnes soit 25% en plus. 

FIG. IV : Le CO2 absorbé annuellement par les terres et les mers est passé en quelques années de 16 milliards de tonnes à 20 milliards de tonnes. Pourquoi et comment?

Fraction atmospherique-1993-2008b

Ce résultat n’est pas en désaccord franc avec le travail en référence qui conclut à la moindre disparition de CO2 dans les océans, mais alors il faudra expliquer où passent ces milliards de tonnes de gaz carbonique. Cela risque d’être assez « coton ».

LIRE le travail de Le Quéré, Raupach, Canadell et autres qui vient de paraître. On convertira cette unité absurde qu’est le pétagramme de carbone en milliards de tonnes de CO2 en multipliant par (3 +2/3) ou 44/12.

Le 19 Novembre 2009


 

Commentaires

2 réponses à “De moindres déboisements en 2008 expliqueraient partiellement la monotonie de la croissance de la teneur moyenne annuelle en CO2 dans l’atmosphère”

  1. Avatar de JP
    JP

    cf figure2 http://www.fel.duke.edu/~scafetta/pdf/Scafetta-JASP_1_2009.pdf
    à partir de 2002 l’irradiance diminue…
    certes de quelques millièmes, ce qui parait peu comparé à la variation entre 16 et 20 milliards de tonne
    Mais si on regarde les conditions physiques de la dissolution et du dégazage du co2 dans l’eau océanique, (dans une de ces circulation du type du Gulf Stream), il est vraisemblable que les derniers Watts au m2, en plus ou moins, ont plus d’impact sur le dégazage du co2 que les 1350 premiers Watts « de base » qui ne servent qu’à ramener l’eau froide à la température où le dégazage peut commencer. (je fais l’hypothèse que pendant la phase de refroidissement de l’eau océanique, elle n’absorbe alors qu’une faible partie du CO2 qu’elle pourait absorber, parce qu’elle n’est pas suffisament en contact avec l’atmosphère)

  2. Avatar de JP
    JP

    un calcul à la louche me donne:
    avec un seul petit watt au m2 d’irradiance, en une année la zone tropicale recoit l’énergie requise pour vaporiser 1000 milliards de tonne de H2O
    alors, vaporiser quelques malheureux milliards de tonne de co2 dissous….

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