La consommation d’électricité marqueur objectif du dynamisme économique des Nations

 Au moment où une partie du Japon, troisième économie mondiale et leader incontestable dans de nombreuses techniques de pointes, se retrouve en pénurie de puissance électrique – les autorités japonaises anticipent un manque de puissance électrique qui pourra atteindre les 15000 MW cet été dans la région de Tokyo – il semble utile de rappeler l’importance de la ressource électrique dans le développement économique des Nations. L’importance de l’énergie électrique dans les processus industriels, dans le fonctionnement de tous les équipements informatiques et de communication, dans la gestion des températures et de l’hygrométrie de notre environnement domestique, dans la salubrité de notre alimentation, dans le transport de masse, etc. n’est plus a démontrer. La consommation de cette ressource énergétique particulièrement bien adaptée au milieu urbain en fort développement, ne pourra aller qu’en croissant avec la montée du niveau de vie moyen des populations et l’arrivée de nouvelles applications comme les véhicules électriques.

 Pour convaincre le lecteur incrédule il suffit, à mon avis, de consulter les consommations électriques données par l’EIA d’un vieux pays, aux activités industrielles chancelantes et à la population croissante d’un pour-cent par an : les États-Unis (FIG.I).

Etats-Unis-conso-TWh-PIB

 Après la stabilisation du PIB de ce pays en 2008 et le recul observé en 2009 suivi d’une reprise en 2010, il est possible d’observer que les consommations d’électricité ont parfaitement répliqué ce va-et-vient économique de ces trois dernières années tout en s’inscrivant dans la tendance décennale des consommations d’énergie électrique qui varie de façon sensiblement linéaire avec une pente de 0,165 TWh par milliard de dollars « 2005 » de PIB. La même courbe portant sur les productions nettes montre une pente de 0,176 TWh par milliard de dollars « 2005 » de PIB. Ceci correspond à 0,15 TWh par milliard de dollars de PIB 2010 pour la consommation et à 0,16 TWh pour la production nette.

 Il n’est donc pas nécessaire d’être grand-clerc pour prévoir que malgré les convictions de certains mouvements écologiques d’Outre-Atlantique, les consommations américaines d’électricité vont probablement poursuivre leur croissance avec l’augmentation du PIB et des populations qui affectionnent tout particulièrement les États de la Sun-Belt. Entre 1993 et 2009 le nombre de foyers américains s’est accru de 17 millions d’unités (de 96,6 à 113,6 millions) et le nombre de foyers se chauffant majoritairement à l’électricité s’est accru pendant cette durée de 13,2 millions d’unités en passant de 25 à 38,2 millions . Quand aux équipements électroniques, ils abondent FIG.II (Source EIA, home energy use).

USA-équipements-electronique

Dans le cas de la France, la part de la consommation d’électricité dans le mix énergétique est particulièrement importante, en raison d’une politique tarifaire favorable. Cette consommation présente d’une année sur l’autre une forte variabilité dépendant des conditions climatiques, le chauffage des foyers constituant une part importante de la consommation d’électricité. Pour juger des tendances à moyen-terme des consommations en fonction du PIB il est donc préférable d’utiliser les données de consommation électrique annuelles corrigées des variations climatiques fournies par RTE (FIG.III).

France-conso-TWh-PIB

 Après une année 2006 en stagnation, due à une chute brutale des consommations des grandes industries, les consommations d’électricité corrigées du climat en France sont reparties à la hausse en 2007 et 2008 pour se replier avec la crise en 2009 et reprendre ensuite en 2010. Dans la relation consommation-PIB, la pente de la droite de corrélation de 0,156 TWh par milliard d’euros « 2000 » de PIB correspond à une croissance de 0,13 TWh par milliard d’euros 2010 de PIB.

 Dans l’hypothèse d’une poursuite de la croissance économique de notre pays, liée en particulier à la croissance démographique, il faut donc anticiper une augmentation des consommations d’électricité dans les années à venir. Ceci est d’autant plus vrai pour la France que la croissance observée dépend de plus en plus des consommations des petits ou moyens clients, la part des grands comptes industriels qui représentaient 23% de la consommation hors pertes en 2001, n’en représentaient plus que 17% en 2010.

 Ces résultats portant sur des économies présentant des PIB à intensité énergétique décroissante montrent que malgré un ratio de plus en plus faible des consommations globales d’énergies ramenées au PIB, l’énergie électrique occupe une position privilégiée par rapport à ses concurrentes telles que le pétrole dont les prix deviennent de plus en plus dissuasifs. Il s’opère donc un transfert de la ressource pétrolière vers l’électricité. L’exemple de la gestion des températures et autres fonctions des foyers est facile à identifier. Mais en Europe par exemple il serait possible de citer le succès croissant du trafic dans le tunnel sous la Manche qui se développe aux dépens des transports aériens et surtout maritimes pour les marchandises. Il y a là un exemple d’une substitution directe de la consommation de kérosène ou de fuel lourd devenus trop onéreux vers l’électricité dans les transports et rendue possible par un investissement majeur. La concurrence entre le TGV et le transport aérien sur notre territoire est un autre exemple de ce transfert de ressource énergétique. Les transports de masse ferroviaires (TGV, RER, métro, tramway) de façon générale assurent cette fonction dans le monde. Ils impliquent faute d’évidente rentabilité, le plus souvent au préalable un investissement massif de la collectivité. Il sera intéressant de suivre les péripéties d’un tel développement du train rapide envisagé en Californie.

Le 29 Mars 2011

Commentaires

3 réponses à “La consommation d’électricité marqueur objectif du dynamisme économique des Nations”

  1. Avatar de Ray
    Ray

    « Le progrès des réseaux sociaux et de la société connectée n’a plus grand sens sans électricité et sans domicile… »
    Francis Fukuyama
    http://www.lesechos.fr/economie-politique/monde/actu/0201254429353-francis-fukuyama-dialogue-avec-roger-pol-droit.htm

  2. Avatar de fredo
    fredo

    remarquable analyse!
    Je suis amené à faire de l’enseignement en Master sur l’énergie, et je cite ces statistiques: de 1973 à 1998, la consommation d’énergie dans le monde a cru de 55% et celle de l’électricité de 155% (de 6000 à 15000 TWh). Et les progrès sont surtout dans les pays émergents, que vous ne citez pas dans votre post (évidemment, vous montrez que jamais les progrès de l’électricité ne cessent).
    Cela rappelle Lénine: les soviets et l’électricité..
    Donc, vive le tout électrique (que contestaient nos archéo-écolos et qu’essaient de combattre les stupides règles sur le chauffage dans la loi Grenelle). Une électricité qui n’émette pas de CO2 de préférence…

  3. Avatar de Ray
    Ray

    fredo, je vous avoue que si la référence à Lénine avait pu être passée sous silence cela ne m’aurait nullement gêné. Vous auriez pu tout aussi bien parler de la chaise électrique du cher Thomas Edison où de la « gégène » de nos vaillantes troupes en Algérie…
    Il n’est pas question dans ce papier d’être « Pro » ou « Anti » électricité, je ne possède pas d’actions EDF. L’objectif est de faire un constat le plus objectif possible sur la situation actuelle des consommations et de penser, compte tenu d’un futur prévisible, que cette tendance va se poursuivre dans les décennies à venir. Suggérer comme le fait la Commission Européenne que la consommation d’électricité en Europe va baisser de 10% durant la décennie qui vient grâce à ses actions normatives relève de la supercherie puisqu’elle oublie de parler de toutes les actions qu’elle ne maîtrise pas et qui vont elles faire croître cette consommation.
    A force de caresser les sentiments écologiques de nos contemporains dans le sens du poil on va en arriver à raconter n’importe quoi.
    C’est la raison essentielle pour laquelle il m’arrive de nager à contre-courant des idées intuitives du moment. Il serait tellement plus gratifiant pour moi d’affirmer haut et fort que quelques éoliennes et modules photovoltaïques secourus par du pompage hydraulique devraient largement suffire dans le futur à répondre aux consommations déclinantes d’électricité de notre pays.

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