La trop lourde facture énergétique de la France ne fait pas assez l’objet d’attention

 Il ne se passe pas une journée médiatique sans intervention d’un politique français nous expliquant ce qu’il va faire pour favoriser les exportations agricoles ou industrielles de notre pays. Outre que ces activités relèvent peu de l’Administration et sont généralement la conséquence des actions de Groupes privés qui éprouvent peut-être quelques difficultés à exporter les productions des usines implantées en France, il serait également utile d’entendre ces mêmes personnages d’État nous expliquer ce qu’il serait possible de faire pour importer moins et réserver des ressources pour favoriser l’investissement ou la consommation de services locaux. L’un des postes majeurs dans ce domaine, bien avant celui de l’informatique, l’électronique et la communication, concerne la Facture Énergétique de la France.

Facture énergétique
 Elle avait atteint, selon les Douanes, en 2008, année de toutes les folies, un montant de 59 milliards d’euros dont plus de 40 milliards pour le seul pétrole brut (TAB.). En 2009 avec le reflux des prix et des volumes consommés en raison de la crise économique, le solde énergétique s’était replié avec une facture de 41 milliards d’euros seulement. Mais 2010 ayant connu la reprise des activités et la hausse des prix de l’énergie, c’est une inflation de 19% de la note qui a été enregistrée pour atteindre les 49 milliards d’euros.

 Quelques remarques:

-Le solde des échanges d’électricité affiche un piètre milliard d’euros d’excédent. C’est minable pour un soi-disant leader de la production d’électricité européenne. Une meilleure maintenance de l’outil électronucléaire aurait permis d’atteindre au moins le double. La France de par sa position géographique dans l’Europe, grâce à une politique siouxe d’investissement dans la production d’électricité et une politique tarifaire plus dynamique, pourrait être un grand fournisseur de puissance électrique à ses voisins. Mais les acteurs ont décidé de laisser vieillir l’outil de production, de maintenir des tarifs de misère et d’inciter EDF à aller gaspiller son cash aux États-Unis dans des alliances dépassées. Mais où est le Plan qui fixerait aux acteurs industriels de l’électricité en France de stopper les importations allemandes et de pouvoir exporter pour 5 puis 10 milliards d’euros d’énergie à nos voisins.

-les importations de charbon et de cokes métallurgiques représentent un solde déficitaire de 2 milliards d’euros. Attendons l’échéance du plan de fermeture des centrales au charbon.

-les produits pétroliers raffinés présentent un solde qui s’est très fortement dégradé. Ceci n’est pas étranger aux difficultés du raffinage français qui n’arrive plus à exporter sa production excédentaire d’essence qui allait traditionnellement vers les États-Unis. Ces derniers en consomment moins et utilisent en partie de l’éthanol. La France consomme trop de fuel et de gasoil. Ne faudrait-il pas se poser quelques questions sur les actions correctrices possibles? En particulier sur la consommation de fuel domestique.

-l’approvisionnement en gaz naturel est partiellement plombé en France par les clauses d’indexation des prix sur ceux du pétrole. Il serait temps de se dire qu’il y a un marché libre du gaz dans le monde. Les méthaniers du Qatar ou d’Afrique de l’Ouest puis plus tard ceux de Russie (Shtokman) déroutés des terminaux américains devenus inutiles avec la poussée des gaz non conventionnels locaux pourraient venir livrer leur cargaison sur la façade atlantique européenne.

-enfin le gros du problème: le pétrole brut. Pour l’instant seuls les dockers de Marseille sont capables de faire baisser les importations. C’est tout de même un peu juste comme politique énergétique!

En l’absence de plan d’économie et dans l’hypothèse d’un maintien des cours actuels des produits pétroliers il est fort probable que la facture énergétique de la France en 2011 se rapprochera des 5 milliards d’euros par mois en moyenne pour rejoindre les sommets enregistrés en 2008.

Accéder aux données statistiques des Douanes.

Le 8 Février 2011

 

Commentaires

8 réponses à “La trop lourde facture énergétique de la France ne fait pas assez l’objet d’attention”

  1. Avatar de waccsa
    waccsa

    Et vive l’euro, qui nous permet de creuser notre tombe économique en toute indifférence !

  2. Avatar de Quentin
    Quentin

    Pas d’accord sur les échanges d’électricité. Si la France importe, c’est tout simplement parce qu’à la pointe, c’est moins cher de le faire que de faire tourner ses propres centrales pour répondre à la demande.
    Par ailleurs, les « tarifs de misère » ne sont que le résultat du partage de la rente nucléaire issue des réacteurs dont le contribuable français a financé la construction. Il est donc normal qu’il en bénéficie. On ne va quand même pas s’indigner de tarifs compétitifs et peu élevés, qui sont bons pour l’économie.

  3. Avatar de Devoirdereserve
    Devoirdereserve

    Difficile pour la France de devenir clairement exportatrice d’électricité en poussant seulement EDF : cela violerait les règles européennes de marché et de non-monopole. Ou alors, il faudrait qu’EDF réserve à l’avance une partie significative de sa production à l’export, délaissant le marché français et manquant à ses obligations de service public…
    C’est pourquoi EDF est _obligé_ d’aller se développer ailleurs en Europe. Il leur faut se développer sans être un monopole nulle part.
    Il faudrait que d’autres acteurs en France se développent massivement et exportent. Pas simple. Par exemple GDF pourrait construire un EPR à Penly (rires !)
    Pour Quentin : le contribuable n’a pas financé les réacteurs, sinon ils appartiendraient à l’Etat. Or, ils appartiennent à EDF qui les a financés grâce à des emprunts auprès de banques, et a remboursé grâce aux factures de ses clients. Nuance.
    (il se trouve qu’EDF appartient à l’Etat, mais cela n’a rien à voir).
    Sinon, d’accord avec vous Raymond : avec nos ressources naturelles (montagnes, façade maritime et biomasse) il y aurait déjà de quoi faire, ne serait-ce que pour ne plus importer !

  4. Avatar de el gringo
    el gringo

    On parle beaucoup de la hausse du coût des importations (en particulier pour les matières premières bien qu’en volume elles aient très peu varié ces 10 dernières années) en oubliant que les exportations de la France ont aussi connu un fort développement ces 30 dernières années et représentaient plus de 30% du PIB en 2007 malgré un cours de change très défavorable.
    L’euro est en effet passé de 0.8$ en 2001 à presque 1.6$ en 2007 rendant les exportations hors zone euro très compliqué et les importations venant des pays hors zone euro encore plus compétitifs.
    http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Echanges_ext%C3%A9rieurs_France_1978-2007.png

  5. Avatar de Ray
    Ray

    @Quentin et DDR:
    -E-On est un acteur en France avec les anciennes centrales des Charbonnages de France et a démarré une centrale 2X436MW à cycle combiné à Carling en 2010
    – l’autrichien Verbund possède les anciens actifs de Poweo dont la centrale 225 kW à cycle combiné de Toul
    Il n’y a pas qu’EDF en France et je vous rappelle que GDF voudrait développer en France une centrale nucléaire ATMEA de 1100 MW avec AREVA-MHI.
    Quand aux importations d’électricité d’Allemagne elles ont représenté en 2010 une énergie de 16 TWh (3,2% de la conso intérieure) soit une puissance moyenne de 1836 MW…ce sont vraiment de très grosses pointes.

  6. Avatar de Marvin
    Marvin

    A tous les obsédés de l’Euro…
    Vous savez, n’est-ce pas que le pétrole est facturé en dollars? Vous imaginez la facture rédigée en Francs?
    Quand aux soi-disantes pénalités à l’export, elles valent pour les très gros contrats (type airbus) mais pas vraiment pour les PME… Je vous rappelle que plus de 50% du CE est réalisé au seins de l’UE.

  7. Avatar de waccsa
    waccsa

    A Marvin :
    « Vous savez, n’est-ce pas que le pétrole est facturé en dollars? Vous imaginez la facture rédigée en Francs? »
    Oui, elle serait intenable : on aurait donc mis tout en oeuvre pour éviter d’en arriver là. Mais il est vrai qu’il est plus confortable, pour un temps, de s’abriter derrière l’excédent commercial allemand. Le réveil n’en sera que plus douloureux, et la lente hémorragie du tissu industriel français en faveur de celui de l’Allemagne et de ses sous-traitants PECO ne plaide pas non plus en faveur de l’euro.

  8. Avatar de Ray
    Ray

    A tous, j’ai oublié de préciser dans ce papier que le bilan de la Facture Énergétique ne tenait pas compte du solde déficitaire des « Dispositifs photosensibles à semi-conducteurs y compris les cellules photovoltaïques » de 1,54 milliard d’euros (une paille!).

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