Une accélération trop rapide vers les énergies renouvelables peut-elle être une erreur économique?

Business-update                           Nombreux sont ceux qui, aux Etats-Unis, adoptent une attitude incrédule, sinon critique, devant le désir d’Obama d’accélérer à fond la conversion de l’approvisionnement énergétique de son pays vers les énergies renouvelables. Ces critiques, venant essentiellement des milieux Républicains, s’articulent sur le solde des créations d’emplois et sur l’efficacité économique de telles mesures. La politique de limitation des émissions de CO2 aux Etats-Unis devrait faire disparaître 3 millions d’emplois d’ici à 2020 selon certains. « Le capital ne générant pas la même quantité d’énergie nécessaire à l’économie, c’est l’économie qui tournera de façon moins efficace » expliquent les consultants de CRA International.

                         Que penser de ces critiques sur les choix actuels de l’Administration américaine? Y a-t-il un fond de bon sens qui ne doit pas être négligé dans ces critiques?

                         Une donnée d’entrée du problème est certaine: les énergies renouvelables sont dévoreuses de capitaux. C’est pour cela, d’ailleurs, qu’il faut pour l’instant, d’une façon ou d’une autre, les subventionner.

Le taux de charge: un fonctionnement des équipements  durant 2000 heures par an ou 23% du temps, comme le photovoltaïque dans les contrées ensoleillées et bien moins en Allemagne, ou bien durant  2200 heures comme l’éolien terrestre (25% du temps) ou 3500 heures comme l’éolien offshore (40% du temps), constitue un handicap majeur pour ces énergies par rapport aux centrales à flamme ou nucléaires.

La durée de vie des équipements: une centrale au charbon ou au gaz est construite pour 80 ou 100 ans, une centrale nucléaire moderne pour 60 ans, un parc éolien pour 20 ans.

La nécessité de surinvestir: le caractère aléatoire de ces nouvelles sources d’énergie nécessite de disposer en secours de centrales classiques mobilisables ou de système batteries ou de centrales à inertie pour suppléer aux lacunes d’énergies qui peuvent être de quelques minutes ou de plusieurs heures.

                Investir dans les énergies renouvelables doit donc intégrer qu’il faut laisser le temps aux diverses technologies de progresser et de faire des gains de productivité indispensables. Le contre-exemple espagnol qui en 2008 a complètement affolé l’industrie photovoltaïque mondiale avec plus de 2,5 GW de puissance installée et qui la plante lamentablement en 2009, avec peut-être 0,5 GW à construire, illustre parfaitement ce qu’il ne faut pas faire. L’industrie photovoltaïque dispose de formidables gains de productivité avec les technologies en couches minces et l’amélioration des rendements de conversion. L’industrie éolienne est beaucoup plus limitée dans ses progressions. Il lui reste cependant à atteindre la classe des éoliennes offshores 5MW, produites en grande série de façon industrielle (LIRE Multibrid).

                L’énergie électrique verte sera plus chère que celle produite avec du charbon américain, du lignite allemand ou des centrales nucléaires françaises. Les tarifs spéciaux et autres « feed -in-tariff » qui supportent ces productions nouvelles ne sont autres que des augmentations tarifaires que paient les consommateurs. C’est le consommateur et donc l’économie qui paie le surcoût des énergies vertes.

                 Or, on le sait pour avoir assisté à la scène, un accroissement brusque des prix de l’énergie peut être destructeur. La flambée spéculative des cours du pétrole du printemps dernier a quasiment tué l’industrie américaine du 4X4 et va finalement pousser GM et Chrysler au dépôt de bilan.

                  Il existe cependant une solution évidente à ce problème: il est nécessaire que parallèlement à cette évolution vers les nouvelles formes d’énergie, l’efficacité énergétique des processus progresse RAPIDEMENT.

                 Il est économiquement acceptable de doubler le prix de 20% de l’énergie électrique si en parallèle l’efficacité énergétique des processus s’accroît de 30 à 40%. Apparaît alors la nécessité d’une démarche double et équilibrée. Mais prenons quelques exemples simples.

Ctroën-électrique                  L’électrification d’un modèle de véhicule existant, comme le fit Peugeot-Citroën à l’aide de grosses batteries Ni-Cd il y a quinze ans déjà n’avait aucun sens économique. Une voiture électrique ne peut-être techniquement acceptable que si toute sa définition est focalisée sur les économies d’énergie. Sa masse, sa traînée, ses pertes énergétiques par frottement doivent être réduites au strict minimum. Les rendements de récupération au freinage et d’exploitation de cette énergie électrique doivent être les meilleurs possibles. La démarche japonaise ou coréenne qui consiste à remettre en cause radicalement la définition d’un véhicule électrique est la bonne. Les bêtises de type « Mini électrique » construite à 500 exemplaires, ne sont que des attrapes gogos marketing qui n’ont que peu de sens. Cette démarche accomplie, alors et seulement alors, l’énergie électrique pourra se substituer au pétrole. Dans le cas des constructeurs américains, on ne voit pas pour l’instant apparaître un modèle répondant au cahier des charges, sinon quelques monstres électriques réservés aux happy-few.

                 Le chauffage électrique d’une maison mal isolée est une aberration énergétique. Mais la même maison après de solides travaux d’isolement et équipement du toît d’une série de modules photovoltaïques raccordés au réseau, va pouvoir vendre ou acheter de l’électricité à son opérateur selon l’heure et le temps. La présence d’une batterie en tampon lui permettra même d’effacer certaines heures de pointes qu’elle pourra négocier. On le voit la démarche est complexe, ce n’est pas un simple module à installer.

                 La politique énergétique d’un pays comme les Etats-Unis, où le gaspillage énergétique était de rigueur il y a peu, doit donc s’articuler sur une réelle incitation de la population et des acteurs économiques à faire des gains dans l’efficacité énergétique des processus. Les immenses frigos qui crachent des tonnes de glaçons inutiles et gaspillées doivent être tout d’abord proscrits. Alors il sera possible d’aller faire de l’électricité au vent ou au soleil sans mettre en péril l’économie américaine.

                 Il y a donc un risque dans la démarche Obama, c’est qu’il pousse trop vite les investissements de production d’énergie renouvelable aux dépens des économies d’énergie et de la recherche d’une plus grande efficacité énergétique. Cela passe par de la pédagogie, des incitations fiscales financées par les taxes sur l’énergie…ou par la possible taxe carbone sur les produits importés.

Le 3 Avril 2009.

Commentaires

3 réponses à “Une accélération trop rapide vers les énergies renouvelables peut-elle être une erreur économique?”

  1. Avatar de Loran
    Loran

    Bel article.
    En passant, pourquoi ne lit on plus rien de Patrick Reymond?
    Estc e a cause du conflit sur les hybrides?

  2. Avatar de ray
    ray

    Je pense que nos échanges n’y sont pour rien. Je ne suis pas informé des relations entre Patrick et The Social Media Group. Je regrette beaucoup qu’il n’écrive pas ses « poulets » en ce moment.

  3. Avatar de Werckmann
    Werckmann

    L’article est très interressant mais il mériterait des développements:
    – quelles sont les piste actuelles ou les progrès attendus dans le domaine des énergies renouvelables
    – il y a une urgence à court terme, le réchauffement planétaire, comment y répondre efficacement? Le pb des 4×4 et plus une absence de prévision sur l’évolution de la conscience écologique des américains qu’un retournement du prix du pétrole. La réponse dans quelques mois puisque le prix du pétrole s’est effondré.

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