L’atelier de brousse (suite)

9001_bucu_imgbmezinNous sommes début février 1990.   Bucarest, la capitale de la Roumanie vient de se débarrasser brutalement du dictateur   Ceaucescu, de sa femme, de quelques lampistes du parti et de leurs sbires de la police politique, la  » Securitate « . C’est dans cette ambiance encore tendue mais exultant d’espoir de liberté, que le motard ‘libre’ que j’ai toujours été a découvert ce pays extraordinaire avec le premier convoi humanitaire de   la Croix Rouge …16 ans déjà !

Après avoir apporté l’une des contributions françaises à l’hôpital pédiatrique de Ploiesti et à l’orphelinat de Cîmpina, nous sommes rentrés à Bucarest d’où les 35 camions devaient repartir en France dès le lendemain matin.

Rentrer déjà ? il n’en était pour ma part pas question et Jacques, le chauffeur du camion ariégeois dut se résoudre à affronter les 3000 kilomètres du retour, seul, en hiver, avec une vitre du camion qu’il avait brisé pour récupérer ses clefs oubliées dans la cabine…

En principe à moto ce genre de problème n’arrive pas, mais j’ai vu des pilotes se louper en enduro, sans pouvoir repartir sur la spéciale suivante, à cause de cette inattention de leur assistance.

Il existe pourtant une solution simple : une clef de secours, noyée dans la graisse pour limiter l’oxydation, empaquetée soigneusement dans un pochon et cachée-fixée tout aussi soigneusement dans un coin discret du bas de caisse du véhicule (a vous de trouver la cache) Ce truc m’a sauvé la mise à plusieurs reprises…

5 février 1990 : Seul à Bucarest, avec en poche 20 balles et le numéro de téléphone hypothétique de la Fédé Moto Roumaine (FRM) , confiée  » sous toutes réserves  » par la la Fédé Moto Française (FFM)avant mon départ.C/FONT>

Je glisse une pièce de 20 Lei dans un taxiphone (à l’époque, une poussière de centimes de Franc) et miracle on me répond, et en français s’il vous plait ! Au bout du fil, c’est Mihai Mezincescu, le nouveau président de la Fédé Roumaine, ingénieur de formation (à droite sur la photo en compagnie de l’un de ses poulains) Elu par un coup de force des pilotes, juste après les évènements de décembre 89. Mihai, 50 ans à l’époque, était le champion incontesté de vitesse 50cc, sur Mobra-Hoinar. Son grand-père est le fondateur de la raffinerie de pétrole de Ploiesti. Raison suffisante pour qu’il en soit puni par le système laCeaucescu. Relégué avec femme et enfants dans les caves de la maison familiale, il vivait misérablement depuis 20 ans quand je l’ai connu. Sans lumière du jour ni chauffage. Malgré tout, Mihai s’est battu pour la moto, sa passion. Il a su résister. Il est de ceux qui ont permis au motocyclisme de survivre en Roumanie, souvent au prix de sa liberté. Son amour de la moto et ce qu’il a fait pour elle fut son unique moyen de résistance face à la dictature.

Mihai Mezincescu est l’esprit de l’ » atelier de brousse « . Il va nous suivre tout au long de ce récit et il va aussi nous apprendre beaucoup ; à nous … les enfants gâtés.

Commentaires

2 réponses à “L’atelier de brousse (suite)”

  1. Avatar de Elisabeth

    « le chauffeur du camion ariégeois dut se résoudre à affronter les 3000 kilomètres du retour, seul, en hiver, avec une vitre du camion qu’il avait brisé pour récupérer ses clefs oubliées dans la cabine… » …
    toute correspondance avec personne ayant existé … n’est peut être pas à 100 % fortuite ? 😉
    Pour ma part , j’ai eu plus de chance , juste Puigcerda / Toulouse avec 28° C … m’enfin , bon , ca fait quelque chose de voir une masse s’attaquer – même gentillement – à la vitre de sa voiture 😉
    Va falloir prévoir une cache …

  2. Avatar de Elisabeth
    Elisabeth

    es-ce qu’il existe des clés commandées à distance via envoi de frequence dédiée, pour les motos ?

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