Complainte pour des jours meilleurs, suite et fin

Sportster
La famille Sportsters

Les temps sont durs, on est tous frileux, on ne prend plus de chances parce qu’il n’y a plus place à l’erreur, et la règle numéro 1 de l’innovation, c’est le droit à l’erreur.
Ce droit n’existe plus, car il est assorti d’une condamnation à mort. Un produit qui ne trouve pas preneur est un produit inutile, de la valeur négative qui de nos jours ne peut plus être supportée par une valeur positive, car même cette dernière peine à s’y maintenir.

L’autre jour, ma première complainte était un plaidoyer pour l’innovation, mais c’était le point de vue du motard, qui veut boire autre chose que de l’eau plate (savez, un minimum de bulles), et qu’importe la forme de la bouteille, le contenu demeure inodore, incolore, donc franchement ennuyeux, mais va falloir s’y faire.

Terminé l’époque des Tamburini, Terreblanche, JT Nesbitt? Terminé l’époque d’une vérité, bienvenue dans l’ère de La vérité, puisqu’elle émerge du consensus d’une multitude de voix. C’est le design participatif qui nous donne ce que l’on demande, une demande diluée certes, comme tout ce qui émerge d’un consensus, mais comment pourrait-on être contre ce que l’on désire?

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On ne créé plus, on recréé, variation sur un même thème, une plateforme, de multiples itérations. Plusieurs s’excitaient à l’annonce, l’année dernière, par Ducati de plusieurs nouveaux modèles, alors qu’en fait, une même moto va se voir offrir une garde-robe diversifiée, d’où la multiplication de l’offre.
C’est l’école Harley-Davidson qui divise sa production en famille, Sportster, Softail, Touring, etc. et on brode autour du noyau de base. D’année en année, on transforme, on améliore, rabote les irritants, c’est meilleur et moins cher, nouveau (sic) et amélioré, dans de truculentes saveurs populaires.
C’est le changement dans la continuité, pas de vagues surtout, pour ne pas briser le lien émotif, le sentiment d’appartenance, qui s’est créé entre l’usager et le produit.

Mais innover, c’est être émotif, alors que transformer, c’est être rationnel, le premier poursuit un rêve pendant que l’autre tente de tuer le temps entre 9 et 5.
Pourtant, la vie est transformation. Notre vie, de la naissance à la mort est une continuelle transformation, mais qui chemine le long d’un arc qui atteint rapidement un pic, physiologiquement parlant, c’est vers les 15, 16 ans chez l’humain (j’y vais de mémoire), et ce pic appartient aussi au monde des objets.
On aura beau transformer ma moto préférée selon mes désirs, la limite sera vite atteinte. D’abord parce que mes désirs changent, se transforme, quand ce n’en n’est pas des nouveaux entièrement (eh! les rêves sont gratuits, pourquoi se priverait-on d’innover en cette matière?), et que la lassitude de l’usuel finira bien par prendre le dessus.

Parce qu’il y a une limite à la transformation simpliste que l’on nous afflige en ce moment, c’est ce pic, qui une fois atteint, est condamné, soit à disparaître pour en figer l’image, devenant figure de musée, ou à dépérir.
Innover, c’est Madonna, transformer, c’est Britney Spears, c’est Sid Vicious par rapport à Boy George, c’est le iPod versus le Zune.
Transformer, c’est le système Windows de votre PC, toujours le même depuis le début, on rafraîchit juste le crémage en couches supplémentaires.
Innover, c’est trouver une solution inédite à un problème. Une moto, pour un constructeur, c’est un problème. Il peut transformer, améliorer ses freins à tambour, ou innover et arriver avec des freins à disques. On ne fera pas le tour de la moto, mais vous voyez le portrait.

Aujourd’hui, et c’est l’époque qui veut ça semble-t-il, on investit dans la nostalgie, on fouille dans son passé pour le réinterpréter, ne proposant de neuf que le logo. On est frileux alors qu’il faudrait être frivole, qui osera alors se jeter à l’eau pour aller pêcher la perle qui brille au fond?

Commentaires

5 réponses à “Complainte pour des jours meilleurs, suite et fin”

  1. Avatar de B1B1

    J’aime beaucoup cet article, et cette réflexion, car elle me pousse à me faire l’avocat du Diable et voir le on coté des choses.
    Es-tu si certain que l’époque est si morose que tu le prétends?
    Qui a t’il dans « l’offre moto » d’aujourd’hui, qu’il n’y avait pas hier?
    – la diversification des moteurs. Aujourd’hui, il n’y a pas d’hégémonie d’une architecture en particulier. Les constructeurs donnent le choix entre 1,2,3, ou 4 cylindres. La raison est que les motoristes ont travaillé à améliorer les performances et l’agrément de ces architectures, pour offrir cette diversité.
    – la diversification des types de motos. Il y a 10 ans, il n’existait ni supermotard, ni hypermotard, ni même roadster hyper sportifs. Que dire de la Ducati Multistrada, qui représente à elle seule une famille? Quel constructeur aurait aurait lancé sur un tel concept il y a 10 ans?
    – innovations globales. Comme toujours, la compétition moto apporte beaucoup au grand public, notamment en terme d’éléments dynamiques (freinage, suspension, cadres).
    Cependant les évolutions récentes me semblent superflues. Profite-t-on vraiment au quotidien d’un freinage full radial?
    L’innovation vient plutôt aujourd’hui de la route. La sécurité prend le pas sur la performance: ABS, assistance électroniques en tous genres, la moto se transforme. Les tentatives sont là, prémisses du futur: Moto automatique, électrique, à 3 roues. Celui qui pense que ces évolutions vont tuer la moto, en as, comme tu le dis, une vision figée.
    Je ne pense pas non plus que les constructeurs (sérieux) conçoivent leurs motos à partir des retours clients, pourtant si faciles à obtenir aujourd’hui grâce au web. C’est plutôt une façon de fédérer ses clients, ses fans et tester des idées.
    Personnellement, j’aime le choix qui nous est offert dans le paysage moto. Basique, roadster, sportive, trail, routières, supermot, hypermot, custom, caféracer, du mono-cylindres, jusqu’au 6, seul le budget peut nous freiner, de la CBR qui change tous les ans ou presque, à la vieille Bonneville qui évolue en conservant son charme.
    Alors, que me manque-t’il? Certainement des designers, ou des ingénieurs, en un mot des hommes, pour incarner ces objets, ces marques.

  2. Avatar de Marcus
    Marcus

    Ben dite donc, c’est très philosophique tous ça…

  3. Avatar de mister mo
    mister mo

    Mais vous allez pas le lacher Boy george bordel !!!

  4. Avatar de mister mo
    mister mo

    On reste philosophique avec les gens qui le méritent, pas avec les ignorents

  5. Avatar de Fawkes
    Fawkes

    Go to Oprah !!!

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